France

« Un monde sans aucun empereur »… Comment BlueSky veut révolutionner les réseaux sociaux

«Un monde sans aucun César ». C’est avec ce message inscrit en latin sur son tee-shirt noir que Jay Graber, directrice générale de la plateforme BlueSky, a salué son public cette semaine au festival South by Southwest (grand rassemblement de la tech), une pique contre Mark Zuckerberg, le patron de Meta (Facebook, Instagram).

Il y a quelques mois, ce dernier a en effet porté un tee-shirt proclamant « Aut Zuck aut nihil », reprenant l’expression latine « Soit César, soit rien », mais en remplaçant le nom de l’empereur romain par son propre nom.

En cliquant sur« J’accepte », vous acceptez le dépôt de cookies par des services externes et aurez ainsi accès aux contenus de nos partenaires.

Plus d’informations sur la pagePolitique de gestion des cookies

Une réponse à « l’impuissance apprise »

Le contre-slogan de Jay Graber « était notre manière insolente de dire qu’il ne devrait pas y avoir une seule personne qui prenne toutes les décisions », a expliqué Rose Wang, directrice des opérations de BlueSky. « Nous avons vu ce qui se passe quand quelqu’un prend le contrôle d’une plateforme du jour au lendemain », a-t-elle ajouté.

Le blogueur Mike Masnick, qui a inspiré la création de BlueSky avec l’un de ses articles, décrit la plateforme comme une réponse à « l’impuissance apprise » : l’état dans lequel les gens acceptent sciemment mais à contrecœur que « quelqu’un d’autre contrôle les principales interactions de la vie ».

Identité en ligne transférable

BlueSky (littéralement « ciel bleu ») est né chez Twitter, mais est devenu indépendant avant l’acquisition par Elon Musk. Deux femmes, Jay Graber et Rose Wang, dirigent aujourd’hui une équipe d’une vingtaine de personnes réparties dans le monde entier. La plateforme compte plus de 30 millions d’utilisateurs et connaît une expansion rapide.

Elle repose sur un principe majeur : les utilisateurs peuvent transférer leur identité en ligne sur d’autres applications utilisant la même technologie. Une différence cruciale par rapport aux grandes plateformes contrôlées par des milliardaires (X et Meta) ou possiblement influencées par des gouvernements étrangers (ce dont TikTok est accusé). « L’idée est que si un milliardaire venait à prendre BlueSky en otage, tout le monde pourrait partir et construire GreenSky » (« ciel vert »), explique Rose Wang.

« Fatigués d’être au service d’un algorithme »

Sur TikTok ou Instagram, « les créateurs sont fatigués d’être au service d’un algorithme qui ne les sert pas », estime la patronne. Sur BlueSky, les utilisateurs peuvent naviguer entre différents flux, suivre des comptes spécifiques ou explorer des contenus grâce à l’algorithme Discover de la plateforme.

BlueSky se distingue d’alternatives telles que Mastodon, où l’inscription nécessite de sélectionner des serveurs et de comprendre la complexe technologie sous-jacente. Mais la simplicité de l’accès à BlueSky et son ouverture s’accompagnent de compromis. Ses contenus ont ainsi été utilisés pour l’entraînement de modèles d’intelligence artificielle générative.

« Cette année sera celle de notre sortie au grand jour »

Jasmine Enberg, analyste chez Emarketer, observe que les utilisateurs privilégient de plus en plus les réseaux offrant davantage de contrôle, ce qui « pourrait profiter à BlueSky, en particulier lorsqu’elle introduit des fonctionnalités favorables aux créateurs, comme des vidéos plus longues ». Il lui manque cependant « les outils sophistiqués des plateformes établies », précise-t-elle.

Rose Wang reste cependant optimiste. « Cette année sera celle de notre sortie au grand jour », promet-elle. « Les gens veulent savoir ce qui se passe dans le monde et ont besoin d’un espace sûr pour discuter, s’amuser et se faire des amis. Pour l’instant, ils ne trouvent cela nulle part ailleurs. »