France

« Un doigt dans le cul, c’est de gauche ? » : « Fleur bleue » analyse la société à travers le sexe.

La première saison de Fleur Bleue, lancée en 2024, a totalisé 57 millions de vues sur YouTube et MyCanal. La seconde saison, lancée en 2025, a été sacrée Meilleure série moins de 20 au Festival de la Fiction de la Rochelle.

Une série humoristique, héritière revendiquée de Bref ! Fleur Bleue est un programme court mettant en scène une trentenaire consciente et féministe, Fleur, et ses divers rendez-vous d’un soir, le tout dans le même décor, son lit. Lancée en 2024, la première saison de Fleur Bleue a enregistré 57 millions de vues sur YouTube et MyCanal. La seconde saison, débutée en 2025, a été récemment désignée Meilleure série de moins de 20 minutes au Festival de la Fiction de La Rochelle.

« Un doigt dans le cul, c’est de gauche ? », se demande l’héroïne dans le premier épisode. Au-delà de cette protagoniste qui enchaîne les aventures sans lendemain et des dialogues parfois crus, Fleur Bleue dresse un tableau à la fois politique et personnel des relations amoureuses à l’époque de Tinder. Le sexe sert ici de prétexte pour interroger notre société. Explications.

« Fleur Bleue est née d’une rupture »

« Fleur Bleue est née d’une rupture et de la découverte d’un nouveau monde du célibat », explique Enya Baroux, créatrice, réalisatrice et interprète de la série humoristique, que 20 Minutes a interviewée au Festival de la Fiction de La Rochelle. Ses amis de cette « romantique » lui conseillent d’essayer le dating 2.0 sur Tinder : « Devoir faire l’effort de ces rencontres un peu éphémères me déprimait un peu », confie Enya Baroux.

Elle en discute avec Martin Darondeau, avec qui elle a co-réalisé le court métrage Cache-Cash en 2018. L’idée d’en faire une série humoristique est alors née. « Ce phénomène de zapping permanent, d’application de rencontre et cette quête un peu désespérée de l’amour caractérisent pas mal notre génération », souligne la trentenaire. Une génération « tiraillée entre l’envie de rester seul et libre de s’amuser, tout en souhaitant construire un schéma plus classique », résume-t-elle.

La pertinence de Fleur Bleue réside dans sa capacité à capturer avec finesse la difficile quête de l’amour dans notre société actuelle. Un récit abordant la solitude, les désillusions et les contradictions. La saison 2 illustre notamment cette jeune femme déchirée entre son désir d’indépendance et la pression de devenir mère.

« Raconter quelque chose sur la société »

Dans cette intimité, Fleur se confronte à divers personnages incarnant chacun un thème de notre société : la parentalité, la politique, les préjugés, l’égalité des sexes, le consentement, l’écologie… « On regarde la planète brûler en se branlant la nouille ou on va s’éteindre parce qu’on est cons ? », questionne Fleur dans l’épisode 5 de la première saison face à un homme préoccupé par l’écologie. Ces thèmes sont abordés avec humour, illustrant les relations d’aujourd’hui et les interrogations qui en découlent.

« En réfléchissant, on s’est dit qu’il serait intéressant d’aborder un thème de société à chaque fois, afin que ce ne soient pas simplement des blagues gratuites », explique Enya Baroux. « Nous souhaitions raconter quelque chose sur la société, pas juste faire un sketch pour le sketch », complète Martin Darondeau.

Le duo élabore d’abord les thèmes sociétaux qu’ils souhaitent explorer. « Une fois le thème identifié, nous réfléchissons à un angle. Nous essayons de déterminer quel type de personnage pourrait le représenter. Nous tirons sur ce fil et mettons en place les situations et toutes les vannes », précise Martin Darondeau.

« On arrive un peu à une limite du programme »

« En réalité, la capote, ça casse un truc », lance l’un des partenaires de Fleur dans le premier épisode de la saison 2. Cet épisode, qui parvient à traiter avec humour l’importance de la protection, est déjà utilisé par certains établissements scolaires pour aborder des questions de prévention. « C’est de l’humour, c’est un sketch, c’est facile à regarder, tout en traitant de véritables problématiques », se réjouit Martin Darondeau.

Cependant, en 2 ou 4 minutes, il est difficile d’approfondir. « Nous atteignons un peu la limite du programme. On en vient à un certain bout », estime Martin Darondeau. Que les amateurs de cette série piquante et hilarante se rassurent, il n’est pas question d’abandonner Fleur Bleue. « Nous ne souhaitons pas laisser le personnage en l’état. Nous voulons aller plus loin », confie Martin Darondeau. Le duo est actuellement en pourparlers pour évoluer le format de Fleur Bleue. « Nous souhaitons prendre plus de temps pour raconter les histoires. Réaliser des épisodes plus longs afin d’explorer l’intimité du personnage, sa psychologie, sa narration, et faire évoluer un personnage », poursuit-il. Car une chose est certaine, Fleur est un « personnage que nous n’avons vraiment pas envie de quitter », conclut Enya Baroux.