Un chiot acheté chez un éleveur véreux décède deux jours plus tard.
L’association QUATRE PATTES alerte sur le commerce derrière la vente de chiots en ligne, où beaucoup proviennent d’élevages véreux. Le 1er décembre, un chiot vendu à une famille de Pays-de-la-Loire décède après avoir été diagnostiqué avec une méningite et une mâchoire déplacée.

« Mignon. Maintenant. Malade ». Avec sa campagne, l’association QUATRE PATTES met en garde depuis plusieurs années contre le commerce obscur derrière la vente de chiots en ligne. Sur Facebook, Instagram ou Le Bon Coin, les annonces pullulent et si tous les vendeurs ne sont pas à mettre dans le même panier, de nombreux chiots vendus sur ces plateformes proviennent d’élevages illégaux. Nés et élevés dans des conditions déplorables, ils sont parfois vendus illégalement par de faux éleveurs, arrivant chez leurs nouveaux propriétaires malades ou mourants, souvent avec des documents falsifiés.
Une famille des Pays-de-la-Loire a fait la triste et douloureuse expérience fin novembre. Tout a commencé, comme souvent, par un coup de cœur. À la retraite depuis peu, Thérèse* souhaitait depuis longtemps reprendre un chien après le deuil de son premier compagnon, perdu plusieurs années auparavant. Le 24 novembre, en parcourant Le Bon Coin, elle craque pour un chihuahua âgé de trois mois, proposé par une éleveuse de Bretagne. Deux jours plus tard, elle se rend déjà à l’élevage. « Cela ne sentait pas très bon et c’était assez sale, mais elle a eu l’impression que les chiens étaient heureux », raconte Adrien*, son fils.
Lors d’une deuxième visite chez l’éleveuse, Thérèse, étonnée de découvrir de nouveaux chiots à vendre, parvient à convaincre son mari, qui était jusqu’alors réticent à l’idée de reprendre un chien. Le samedi 29 novembre, la transaction est conclue et le jeune chihuahua rejoint sa nouvelle famille. « Tout semblait en règle car il avait une carte d’identification, un certificat vétérinaire datant de la veille et il était pucé », poursuit Adrien. La première journée se passe à merveille, le chien étant actif, joueur et affectueux envers ses nouveaux maîtres.
« Certains vétérinaires sont complices »
Mais, le dimanche matin, la situation change. Le chiot ne tient plus sur ses pattes et ne mange plus. Thérèse se rend le jour même dans un centre d’urgences vétérinaires. L’équipe de soignants détecte des puces sur l’animal, mais essaie de rassurer sa propriétaire. « Ils lui ont dit de ne pas trop s’inquiéter, que c’était probablement lié au stress de la première journée », précise le jeune homme. Le dimanche soir, le chiot semble avoir retrouvé des forces et rentre à la maison. Cependant, Thérèse, inquiète, prend rendez-vous avec le vétérinaire de sa commune pour le lundi matin, car le chiot n’a pas dormi de la nuit et semble à nouveau K.-O.
Et pour cause. Le vétérinaire diagnostique une méningite avec un pronostic vital engagé et découvre que le chiot présente une mâchoire déplacée. Plongé dans le coma et perfusé, le malheureux animal décède quelques heures plus tard, dans la nuit du 1er au 2 décembre. « En deux jours, nous sommes passés des rires aux larmes, de la joie à la douleur et l’incompréhension », raconte Adrien. Depuis ce drame, Thérèse, dévastée, a tenté de recontacter l’éleveuse. « Elle a dit qu’elle ne comprenait pas car le chiot était en bonne santé quand il a quitté l’élevage, qu’elle était désolée et qu’elle nous a directement proposé un chiot d’une autre portée », raconte-t-il.
Devant le refus de Thérèse, l’éleveuse s’engage maintenant à rembourser une partie des frais vétérinaires, mais sans aucune garantie. « Elle nous balade un peu et nous venons de découvrir qu’elle avait souscrit une assurance juste avant », dénonce Adrien, qui préfère ne pas révéler l’identité de l’éleveuse « par peur des représailles ». Il reproche également au premier vétérinaire d’avoir délivré un certificat sans mentionner la malformation du chiot ni la méningite. « Les éleveurs cachent des vices, des malformations pour vendre leur animal plus cher et certains vétérinaires sont complices, c’est inadmissible », s’indigne-t-il.
Photos truquées et fausses infos sur les annonces
À l’écoute de ce témoignage, Clémence Scialom n’est malheureusement pas surprise. Au bureau de QUATRE PATTES, on dénombre de nombreux dossiers similaires, même si les issues ne sont pas toujours aussi tragiques. « C’est à peu près toujours le même procédé, souligne la chargée de programmes de l’association. Ces faux éleveurs utilisent ces plateformes en ligne pour attirer les acheteurs avec des photos truquées et des informations mensongères sur les chiots. » Une fois le contact établi avec un potentiel acquéreur, les vendeurs mettent la pression pour finaliser la vente le plus rapidement possible. « Certains annoncent même des dons gratuits, mais c’est souvent une arnaque », assure Clémence Scialom.
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Face à la multiplication des cas et à l’ampleur du trafic, l’association QUATRE PATTES a mis en ligne plusieurs conseils pour distinguer un vendeur fiable d’un vendeur sans scrupule. « Nous recommandons d’adopter un chien dans un refuge ou auprès d’une association reconnue plutôt que d’acheter, souligne la bénévole. Mais si l’achat est souhaité, il faut s’assurer de la réputation de l’éleveur et éviter les ventes sur Internet. » Certains signaux permettent d’identifier les arnaques en ligne. « Si le profil de l’éleveur montre qu’il vend de nombreux chiens de races différentes ou que ses annonces changent rapidement, cela doit alerter, prévient Clémence Scialom. De même pour les annonces indiquant vente urgente ou livraison à domicile. »
L’achat ou l’adoption doivent être un acte réfléchi
Avant tout achat, le futur propriétaire doit se rendre sur l’élevage pour vérifier les conditions de vie des animaux. « Il est impératif que la mère du chiot soit présente dans l’élevage ; son absence est un signe de trafic ou de pratiques douteuses, explique la chargée de programmes de QUATRE PATTES. Certains forcent aussi l’achat en plaçant directement l’animal entre les bras de l’acheteur, le rendant incapable de revenir en arrière. Un vrai éleveur, en revanche, pose des questions, comme le ferait une association lors d’une adoption. » En cette période de fêtes, propice aux achats impulsifs, l’association rappelle que l’achat ou l’adoption d’un chien doit être un acte mûrement réfléchi.
Pour mettre fin au commerce illégal des animaux de compagnie, QUATRE PATTES espère beaucoup de l’accord conclu fin novembre à Bruxelles, qui doit permettre d’instaurer un système de vérification en ligne pour les animaux vendus sur Internet. « Ce système devrait déjà s’appliquer en France depuis 2021 avec la loi sur la maltraitance animale, mais cette loi n’est pas respectée par les plateformes », déplore Clémence Scialom, qui espère que la future réglementation européenne permettra de « stopper les ventes illégales à la source. »
* Les prénoms ont été modifiés à la demande de la famille.

