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Toulouse : Un cas de contamination au plomb à Fondeyre et des questions sur les risques encourus par la population

En novembre 2020, la société STCM, implantée sur la zone de Fondeyre, au nord de Toulouse, fermait définitivement ses portes. Cette usine Seveso, spécialisée dans le recyclage des batteries et qui a exploité une fonderie au plomb jusqu’en 2011, a laissé des traces de son passage. Sous forme de pollution au plomb des sols.

Les analyses menées début 2022, sur une distance pouvant aller jusqu’à 700 m autour de ce site ont montré des concentrations pouvant dépasser les 300 mg de plomb par kg de sol, supérieures au seuil déterminé par le Haut conseil pour la santé publique (HCSP) et entraînant l’instauration d’une surveillance sanitaire spécifique. Une zone qui concerne 2.400 personnes qui résident ou travaillent dans la zone.

Les autorités sanitaires ont décidé d’élargir le secteur de surveillance là où la teneur était de 100 mg de plomb par kg de sol, soit une zone de 12.000 riverains, dont 1.200 enfants de moins de 7 ans. En octobre dernier, la population concernée était ainsi invitée à réaliser une plombémie, une prise de sang permettant de déterminer la concentration de plomb dans le sang.

Un cas de contamination d’une femme enceinte

Selon les données collectées par l’Agence régionale de santé, au 15 février 2023, 183 personnes avaient effectué ce test, parmi lesquels 47 enfants de moins de 7 ans et 14 femmes enceintes, soit un tiers du public cible du HCSP et 20 enfants âgés de 7 à 17 ans.

Si aucun cas de saturnisme infantile n’avait été détecté mi-février, et que les résultats des mineurs se situent « même au-dessous du premier seuil de vigilance », « un dépistage a révélé qu’une personne adulte a un seuil supérieur à 50 mg/litre. Cette personne fait l’objet d’une prise en charge spécifique qui déterminera les causes de ce taux de plombémie », indique la préfecture de la Haute-Garonne.

Mais cette femme enceinte ne serait pas la seule victime de cette pollution au plomb qui a duré durant des décennies si on en croit les témoignages de personnes présentes lors d’une réunion publique mi-décembre. Et surtout, les comités de riverains ne veulent pas qu’elle fasse encore plus de victimes au cours des années à venir.

Si les services de l’Etat assurent poursuivre leur campagne d’information de la population assurant que « l’incitation au dépistage et la surveillance sanitaire restent la priorité », les habitants du quartier sont, eux, sur le qui-vive. Notamment sur l’éventuelle pollution des sols, que ce soit des jardins où certains font pousser leurs légumes, des cours d’école ou ceux des terrains en construction.

Des travaux et des questions sur leurs conséquences

C’est ce qu’ils ont répété mardi lors d’une réunion de la commission de suite de site de Fondeyre qui se tenait en préfecture. « J’ai été contacté par beaucoup de parents d’élèves du collège Rosa Parks, qui est en cours de reconstruction depuis de nombreux mois. Quand ils ont reçu le flyer d’information sur le dépistage de l’ARS, ils se sont inquiétés et m’ont dit que leurs enfants étaient depuis des mois sur le site alors qu’il y a des travaux. On nous a dit qu’étude avait été réalisée et qu’il n’y avait rien d’alarmant. Mais il faut qu’ils nous la communiquent », a insisté Brigitte Morhain, la présidente du comité de quartier de Lalande.

Ils pointent aussi un vaste projet immobilier sur les anciennes parcelles de Peugeot et Citroën, où près de 800 logements et un groupe scolaire devraient à l’avenir sortir de terre. Deux parcelles qui se trouvent respectivement à 450 m et 300 m du site de l’ancienne usine STCM. Et donc directement dans la zone de surveillance sanitaire. Pour donner le feu à la réalisation de ce projet, la Métropole s’appuie sur un avis rendu par la Mission Régionale d’Autorité Environnementale (Mrae) en janvier dernier qui dispense la modification du plan local d’urbanisme d’une nouvelle évaluation environnementale. Or, quelques mois plus tôt, la même Mrae avait indiqué que cette évaluation était nécessaire en raison « des excavations, mises à nu et transferts de matières plombées, susceptibles de générer des incidences sur l’exposition des personnes au plomb ».

Un changement de braquet qui a poussé les élus d’opposition à monter au créneau pour demander l’application du principe de précaution pour la santé de la population et freiner ce chantier. « Entre les deux rapports de la Mrae nous avons repris le dossier et apporté des précisions », explique François Chollet, vice-président de la métropole chargée de l’écologie. En l’occurrence, les résultats des études de sols réalisées par le promoteur qui montreraient que les teneurs en plomb sur cette zone n’empêchent pas la construction. « Nous avons demandé les résultats de cette expertise. Mais aussi celle sur les courbes de concentration du plomb sur tout le périmètre qui se trouve dans la zone de surveillance, notamment celle où il y a les plus fortes concentrations dans le sol entre 350 et 1.000 mg de plomb par kg », réclame de son côté Serge Baggi, le président du comité de quartier Minimes-Barrière de Paris.

Les zones de surveillance sanitaire suite à une contamination au plomb du quartier de Fondeyre, autour de l'ancienne usine STCM.
Les zones de surveillance sanitaire suite à une contamination au plomb du quartier de Fondeyre, autour de l’ancienne usine STCM. – ARS

Lors de la réunion du comité de suivi, les riverains ont appris qu’il y allait avoir un plan de gestion sur le périmètre le plus contaminé. « On ne sait pas trop pour l’heure en quoi il va consister. Il y aura des échantillons réalisés chez les personnes qui habitent dans cette zone et en font la demande. La question après, c’est qu’est-ce qu’ont fait des terres sur la pollution est établie ? Qu’en sera-t-il de la prise en charge de la baisse du prix de vente de ces habitations ? », interpelle Serge Baggi, en écho aux questions que se posent encore aujourd’hui beaucoup d’habitants du quartier.