Sports d’hiver : « L’angoisse » des skieurs de ne pas trouver de saint-nectaire
Il fait partie des fromages préférés des champions du monde du fromage. Avec sa texture crémeuse et sa croûte grise, le saint-nectaire tient une place dans le choix dans le cœur des Français. Pur produit de l’Auvergne, il est protégé par une appellation d’origine contrôlée depuis 1955. Répartie dans 50 communes du Puy-de-Dôme et dans 19 communes du Cantal, toutes situées autour du village de Saint-Nectaire, l’AOP fait partie des plus petites d’Europe. Elle est pourtant capable de fournir près de 15.000 tonnes de fromage chaque année, seulement devancée par l’indétrônable comté et par le reblochon.
Oui, mais voilà, parfois, le fameux fromage auvergnat vient à manquer. « C’est la troisième boutique qu’on fait. On n’en trouve pas et ça commence à m’angoisser. » A deux jours de quitter la station de ski de Super-Besse, ce couple craignait de pas pouvoir se fournir en « saint-nec ».
Dans plusieurs boutiques de la station de sports d’hiver du Sancy, des écriteaux annonçaient des ruptures de stock. « C’est parce que la demande est de plus en plus forte. En période de vacances, ça nous arrive d’être en rupture de stock. Mais en général, ça ne dure pas. Il faut savoir attendre », explique le gérant de la Ferme de l’Oiseau. Cette exploitation située à Chambon-sur-Lac accueille des visiteurs depuis quarante ans et peut sortir jusqu’à 250 saint-nectaires par jour.
Malgré cette solide production, elle est parfois dépassée par l’appétit des visiteurs hivernaux. Surtout par les gourmands venus de l’ouest de la France, qui profitent de leur deuxième semaine de vacances. « Je n’ai pas eu de remontées de rupture de stock », rassure Emilie Rousset, directrice de l’interprofession. « Il arrive qu’on soit en rupture en août. Mais à cette période, en général, on ne manque pas de saint-nectaire. Ça reste localisé autour de Super Besse ou du Mont-Dore. Tout le monde veut ramener du fromage chez lui, donc ça peut occasionner quelques ruptures localisées. »
Un prix hyper attractif en vente directe
Il faut dire que les prix pratiqués sont très attractifs. Sur le marché de Besse ou directement à la ferme, les producteurs proposent le fromage entier d’environ 1,6 kg pour une vingtaine d’euros. A ce prix-là, vous n’avez même pas un quart du fameux fromage à Paris. Alors chacun fait ses stocks avant de rentrer. « On en ramène pour la famille, les copains », explique le couple toujours en quête. « On a des dizaines de commandes », confirme un autre commerçant de Super-Besse.

Alors que la deuxième semaine de vacances a démarré, faut-il s’inquiéter pour les stocks ? « Il n’y a aucun manque de saint-nectaire, on peut vous l’assurer. Ce matin, on n’a vendu que la moitié de ce que l’on avait apporté », rassurent Jean-Valère et son associée, producteurs à Aurières, dans le nord de la zone géographique de l’AOP. Pour eux, la pénurie est surtout localisée autour des stations de ski, notamment parce que les touristes d’hiver « bougent moins loin » et se fournissent au plus près.
Si les producteurs sont dévalisés depuis deux semaines, c’est aussi parce que la fréquentation était très forte, avant même le début des vacances scolaires. « On est à un taux d’occupation de 85 % à Super Besse et de 72 % dans le Sancy. Ce sont nos plus grosses semaines quand les habitants de Bretagne, des Pays-de-la-Loire et du Centre sont en vacances », assure Luc Stelly, le directeur de l’office du tourisme du Sancy.

Mais ne vous trompez pas, les premiers consommateurs de saint-nectaire, ce ne sont pas les touristes, mais bien les Auvergnats. « Les vaches et les champs façonnent les paysages de la région. C’est une vraie fierté ici. C’est un peu notre champagne », assume Luc Stelly.
La filière doit encore communiquer
Si la filière se porte globalement bien, elle doit pourtant batailler pour garder la ligne. En 2023, près de 14.000 tonnes de saint-nectaire avaient été consommées. Pour 2024, la tendance devrait être à la stabilité voire à une légère baisse, malgré d’importantes opérations de communication. « L’inflation est là, les gens doivent faire des choix. On subit aussi la baisse du nombre de lieux proposant le fromage à la coupe », reconnaît Emilie Rousset. Il faut alors embarquer le fromage en entier. Cap ou pas cap ?