France

Sophie voulait un enfant et se retrouve amputée des jambes et des doigts

Il y a un an, la vie de Sophie et Thomas, un jeune couple de Douvrin (Pas-de-Calais), a littéralement basculé dans un cauchemar dont ils ne sont pas près de voir le bout. Un cauchemar qui a commencé en février 2024, lorsque les deux amoureux ont franchi les portes du centre hospitalier d’une grande ville du département.

« Depuis plusieurs années on essayait d’avoir un enfant naturellement, mais ça ne fonctionnait pas. Alors nous avons entamé un parcours de procréation médicalement assisté », raconte Thomas. Dans cet hôpital, Sophie a subi sa première ponction ovarienne, c’était un vendredi matin. « Dès la nuit suivante, j’ai eu des vomissements, des nausées, des maux de ventre », se souvient la jeune femme. Le lendemain matin, au téléphone, sa gynécologue lui conseille de prendre des anti-inflammatoires et des anti-douleurs, sauf que « c’était de pire en pire », explique Sophie. Dans la nuit de samedi à dimanche, Thomas contacte le Samu cette fois : « On a bien précisé au médecin qu’il y avait eu une ponction ovarienne le vendredi mais lui, il pensait plutôt à une intoxication alimentaire ou de simples maux de ventre. »

Sophie se réveille amputée des deux jambes

Deux heures plus tard, voyant que rien ne s’améliore, Thomas emmène sa compagne aux urgences. « Ça a été très vite, en fin de matinée, Sophie était admise en réanimation où elle a été plongée dans un coma artificiel, assure-t-il. Son état se dégradait rapidement, ses organes, le foie, le sang étaient infectés. » Un coma dont Sophie ne sort que deux semaines plus tard après avoir frôlé la mort.

Admise pour des douleurs abdominales, la jeune femme se réveille amputée des deux jambes et de plusieurs phalanges sur ses deux mains. « On m’a ensuite expliqué que j’avais subi un choc septique avec défaillance multiviscérale due à une infection à streptocoque A », se souvient-elle.

Un choc inimaginable pour cette jeune femme de 26 ans et pour son compagnon. Mais le couple ne se laisse pas abattre. Lui aménage son temps de travail de comptable pour assister son amoureuse dans sa nouvelle vie. De son côté, Sophie avale neuf mois de rééducation au terme desquels elle marche avec ses prothèses sans béquille et « apprend même à courir ». Oui, « le regard des gens est différent parfois, mais aujourd’hui je m’en fiche », lance-t-elle. Et son handicap ? « Je m’y suis fait, reconnaît Sophie. De toute façon, je n’ai pas le choix. »

« On ne sait toujours pas ce qu’il s’est passé »

Au combat de Sophie pour remarcher succède celui de la justice. Le couple a en effet lancé une action devant le tribunal, « parce qu’à ce jour, on ne sait toujours pas ce qu’il s’est passé », déplore-t-elle. Et si la jeune femme n’imagine pas pouvoir chiffrer la perte de ses jambes, tous deux espèrent qu’une indemnisation suffisante pourra leur faciliter la vie.

« Tout est hors de prix, assure Thomas. Les prothèses de doigts ne sont pas remboursées, ni les prothèses bioniques de jambes. Les aménagements de la maison, un véhicule adapté pour Sophie », liste-t-il. Une première expertise doit d’ailleurs avoir lieu en mai. En attendant le résultat d’un procès qui pourra durer « quatre à cinq ans », le couple a pu bénéficier d’un vaste élan de solidarité avec des dons à hauteur de 25.000 euros.

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Le plus ironique dans cette dramatique affaire, c’est que la ponction ovarienne ayant failli tuer la jeune femme a finalement été un succès. Plusieurs embryons ont été congelés, laissant au couple la possibilité de poursuivre son parcours de PMA. Pour Sophie, « c’est une possibilité » qu’ils n’envisagent pas pour l’instant « mais qui reste dans un coin de la tête ». « La peur est là aujourd’hui, parce qu’on sait qu’il y a un risque », regrette Thomas.