Shaka Ponk solde son bilan carbone et s’autodétruit à l’Accor Arena de Paris
Ce samedi 30 novembre, ce sera la der des ders à l’Accor Arena. Après une tournée sold out de près de soixante dates, le groupe de rock alternatif Shaka Ponk a décidé de s’autodétruire « pour la planète ».
20 Minutes a assisté ce jeudi 28 novembre à l’une des ultimes dates de la formation qui, par sa démarche, veut faire passer ses convictions environnementales, mais aussi sociales, avant son propre plaisir et son intérêt.
Extinction, de l’espèce
Shaka Ponk, 2004-2024. Ci-gît le groupe d’électro rock déjanté, ce samedi… à l’Accor Arena de Paris. Après une folle tournée baptisée The Final F*cked Up Tour, la formation s’autodétruit. « Extinction de l’espèce », avait-elle annoncé en dévoilant les soixante dates de ses ultimes concerts, après 20 ans d’une carrière électrisante et sept albums. Dont acte.
Pas de doute possible quant à savoir si ces promesses seront tenues. Samaha Sam et Frah, chanteuse et chanteur du groupe aux six membres, l’ont encore affirmé ce jeudi à l’Accor Arena, alors que nous assistions à l’un de ses quatre derniers concerts. L’ambiance risque d’être bien triste pour la dernière ce samedi 30 novembre à Bercy. Et folle aussi.
« Nous sommes malmenés, blessés, abusés »…
Arène comble, évidemment. Comble d’un public majoritairement constitué de quadras et de quinquas parfois venus avec leurs enfants, qui suivent sans doute les Shaka depuis leurs débuts. Public qui fait partie intégrante du show.
C’est au milieu de la fosse remplie jusqu’à la gueule, après dix minutes d’entrée dans la salle en serrant les mains et prodiguant des accolades, que la formation s’installe, prend la parole face à une foule déjà conquise.
« L’une des raisons de cet arrêt, c’est que nous sommes malmenés, malmenés par un gouvernement. Nous sommes blessés, nous sommes abusés, nous sommes meurtris par la folie destructrice de ces gens qui nous gouvernent et essayent de nous priver des plus beaux trésors de cette vie. Ils essayent de nous priver des uns des autres, ils s’attaquent à l’environnement, au vivant, mais aussi à des trésors de société, comme la liberté, la démocratie, la solidarité, l’éducation, l’hôpital, la santé. Tout ça nous rend un peu dingue et l’on a l’intention d’œuvrer contre une fois séparés », balance Frah. Et le show démarre avec I’m Picky en version acoustique («Je suis difficile »), l’un des tubes de Shaka Ponk, sans doute encore plus d’actualité que jamais.
Communion, revendications
Deux heures quarante-cinq durant, le groupe ne fait jamais relâche, sinon pour accueillir sur scène l’astrophysicien Aurélien Barrau, venu lire son texte J’aime pas les gens, « un texte humain, profondément humain », dixit Samaha Sam, un texte qui pointe les faux pas de l’Occident et ceux qui « dégueulent des obus et avalent du pétrole », mais qui honore ceux qui « sont poing levé contre l’injustice ». Ovation.
Sur une scène façon salon avec canapés et piles de livres géants, mais aussi dans la fosse où Frah multiplie sauts et slam (sans oublier une monstrueuse danse qui fera tourner autour de lui des milliers de fans au risque qu’ils finissent piétinés), le spectacle est total, à 360°. Communion.
Mention à la chorale urbaine et gospel Sankofa Unit dont dix-huit membres nimbent le show de ses voix et danses tout de blanc vêtu.
Et invitation à signer la pétition pour la libération de Paul Watson, l’activiste des océans arrêté au Groenland en juillet 2024, toujours en détention, grâce à un QR Code projeté sur un écran géant. « Ce QR Code c’est l’un des rares qui sert à sauver l’humanité. Signez cette pétition pour libérer le capitaine Paul Watson ! », lâche Frah, en véritable ambassadeur. Revendication.
Boycotter les marques pour changer les choses
Run, run, run ; Je m’avance… en passant par la très attendue reprise (culte) de The House of The Rising Sun de The Animals, le set à la scénographie imposante est ainsi entrecoupé de prises de paroles, parfois virulentes : « Si vous voulez qu’on change cette industrie musicale et qu’on la rende plus saine, il faut boycotter ces marques. Boycottez Coca-Cola, boycottez Sprite, boycottez Nestlé, boycottez Louis Vuitton, boycottez Mac Donald, boycottez KFC, boycottez Zara, boycottez H & M, et comme ça les choses changeront ! Moi, j’veux pas du Coca ici. Fuck Coca-Cola ! », hurle Frah. Ce qui n’empêche visiblement pas la vente de boissons gazeuses dans les coulisses de l’UE Arena. Partenariat avec la salle oblige ?
Les Shaka ont le souci de leur héritage : « Y’a des gosses qui ont besoin de nous ici. Faut leur faire comprendre que le plus important, c’est l’amour, c’est le vivant, c’est l’environnement. Y’a des gosses au bout du monde qui ont besoin de nous, y’a des gosses qui meurent en Palestine, en Israël et tous ont besoin de nous, OK ? ».
Qu’adviendra-t-il des six membres de la formation ? Seuls eux le savent désormais. Nul doute qu’ils se réinventeront… autrement. Reste, évidemment, des images plein les yeux, des albums à réécouter (dont le dernier, un double testamentaire, sous forme de compilation, avec des live), et un engagement environnemental sans faille, cohérent, sacrificiel en « prenant conscience que l’on était une partie du problème », selon la formation.
Si vous ne faites pas partie du 1,5 million de spectateurs qui ont assisté au The Final F*cked Up Tour, un save the date s’impose sur votre calendrier 2025. Le tout dernier concert des Shaka, intégralement filmé ce 30 novembre, sera projeté le 3 avril prochain dans les salles de cinéma.