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Séries Mania : Ukraine, réforme des retraites, droits des femmes… Le festival lillois secoué par l’actualité

Les séries sont le reflet de nos sociétés contemporaines et de leurs bouleversements. Guerre en Ukraine, révolte iranienne, réforme des retraites et 49.3… A la manière du vent de contestation qui s’était invité sur la scène du Palais des festivals à Cannes en 1968, l’actualité a pointé le bout de son nez à plusieurs reprises à Séries Mania. La rançon du succès ?

Les femmes iraniennes sur le tapis violet

Tout a commencé sur le tapis violet de la soirée d’ouverture de Séries Mania vendredi dernier. Le festival accueillait l’invité d’honneur de sa 6e édition, la star de Succession, Brian Cox. A ses côtés, son épouse Nicole Ansari-Cox a ému en arborant un châle en hommage aux femmes iraniennes où il était brodé « femme, vie, liberté ».

« Je suis si fière d’elle. Elle est à moitié iranienne. Les femmes iraniennes et afghanes vivent des moments épouvantables. C’est inacceptable. Téhéran est complètement hypocrite. Les femmes peuvent avoir accès aux meilleures universités, mais après toutes les portes se ferment. Elles n’ont accès à aucune opportunité. Cette souffrance, cette répression montrent à quel point le patriarcat est un échec. Il est temps de basculer dans le matriarcat », a défendu son époux, Brian Cox, lors d’une table ronde devant une poignée de journalistes.

L’Ukraine et les femmes afghanes au Nouveau Siècle

« Nous sommes réunis pour une semaine de fête, de célébrations, de découvertes autour des séries internationales et de ceux qui les font », a lancé Laurence Herzberg, sur la scène du Nouveau Siècle, qui accueille la cérémonie d’ouverture et les projections.

La directrice générale du festival a ensuite tenu à rappeler : « Il y a un an, dans cette même salle, j’accueillais sur cette scène la présidente du jury, Julia Sinkevych, une productrice ukrainienne alors que la guerre venait d’éclater en Ukraine, malheureusement la guerre n’est pas terminée, j’ai une pensée pour Julia et tous les Ukrainiens. » Et de poursuivre : « Je voudrais y associer le peuple iranien, saluer le courage extraordinaire des femmes iraniennes, et avoir une pensée plus qu’émue et solidaire pour les femmes afghanes ».

La réforme des retraites et le 49.3 au Tripostal

Ce dimanche au Théâtre du Nord dans le cadre de Séries Mania, Florence Aubenas, grand reporter au journal Le Monde, et Pierre Haski, chroniqueur à France Inter et président de l’association Reporters sans frontières, avaient donné rendez-vous aux festivaliers pour une conférence sur un thème passionnant, hélas, éminemment d’actualité : « Peut-on représenter la guerre en séries ? ».

Cette conférence fut interrompue par l’arrivée inopinée sur la scène d’une vingtaine de manifestants opposés à la réforme des retraites, brandissant une banderole « 49.3 : la guerre dans la rue, pas sur vos écrans », dénonçant des séries déconnectées de la réalité. L’organisation du festival a permis aux manifestants de prendre la parole quelques instants et un dialogue avec le public s’est instauré. « Désolée d’avoir donné l’impression qu’on fait du divertissement, on n’a pas l’impression de faire cela quand on fait nos reportages », s’est défendu Florence Aubenas, une fois que la conférence a repris normalement.

Plusieurs dizaines d’opposants à la réforme des retraites sont également entrées ce lundi au Tripostal, juste avant la remise du prix Vidocq de la série policière à Syndrome E, adaptation d’un roman de Franck Thilliez pour TF1. Une intervention pas choisie au hasard puisque le jury de cette récompense est essentiellement composé de membres de forces de l’ordre.

Après avoir fait pression sur la sécurité pour forcer les portes, les contestataires, majoritairement des étudiants, accompagnés par le syndicat SUD-Rail de Lille, ont été autorisés à entrer dans le calme par l’organisation du festival.

Les manifestants contre la réforme des retraites ont également donné de la voix alors que Marcia Cross, l’inoubliable Bree Van De Kamp de Desperate Housewives, était en train de faire des selfies avec ses fans sur le tapis violet du festival juste avant la projection de la série norvégienne The Fortress. Les contestataires ont provoqué une bousculade. Les forces de l’ordre sont rapidement intervenues.

Des stars à la direction du festival en passant par les contestataires, Séries Mania est devenu un lieu d’expression de l’indignation ou de la solidarité envers certaines causes et un espace de revendications. Leur objectif est similaire, tous profitent d’un événement médiatisé à l’échelle internationale pour faire passer des messages. Cela prouve, s’il était encore nécessaire, la popularité des séries et la vitalité de Séries Mania.