France

Sécheresse : La situation « inédite » des nappes phréatiques est « inquiétante »

Alors que le printemps n’est pas encore arrivé, la crainte d’une sécheresse dans les prochains mois est déjà bien présente. La situation des nappes phréatiques françaises est « inquiétante » et toujours « dégradée » alors que l’hiver touche à sa fin, estime lundi le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM), qui invite à la vigilance. Pour février, « l’ensemble des nappes affichent des niveaux sous les normales et 80 % des niveaux sont modérément bas à très bas », indique le BRGM.

Les zones du couloir rhodanien, du Limousin, des Causses et de la plaine du Roussillon sont particulièrement touchées, affichant des niveaux « rouge » et des nappes « très basses ». « On a déjà connu une situation avec beaucoup plus de points rouges » à cette époque, en 2012 et en 2017, « mais ce qui est inédit c’est que toute la France est touchée », a souligné Violaine Bault, hydrogéologue du BRGM, lors d’une conférence de presse.

Février, quatrième mois le plus sec depuis 1959

Le mois de février, qui selon Météo-France a été le 4e le plus sec en France depuis 1959 avec notamment une série record de 32 jours sans précipitations entre le 21 janvier et le 21 février et un déficit global des précipitations dépassant les 75 %, a été particulièrement dommageable, avec un « arrêt brutal de la recharge », note Violaine Bault.

A l’issue de ce mois, les niveaux sont « généralement en baisse » sur les nappes réactives – les plus sensibles à la pluie – et ce alors que la période de recharge 2022-23 a débuté « avec un à deux mois de retard » et « reste déficitaire ». Pour les prochains mois, le BRGM fait état d’une « grande incertitude ».

Vers un été encore plus sec qu’en 2022 ?

L’évolution des tendances « dépendra essentiellement de la pluviométrie », ajoute l’institut géologique, qui estime toutefois que « la reconstitution des stocks d’ici le printemps reste difficilement envisageable sur les nappes réactives affichant des niveaux très bas ». Est-ce à dire que l’été 2023 sera pire que celui de 2022, déjà marqué par une sécheresse exceptionnelle ? La recharge pourrait reprendre dans certains secteurs en mars mais « les prochaines pluies auront probablement peu d’impact », dans la mesure où dès courant avril, la reprise de la végétation absorbera la majeure partie de l’eau.

« Là début mars il pleut mais il faut d’abord que ça humidifie les sols avant de permettre une infiltration vraiment en profondeur », note Violaine Bault. Un processus d’autant plus long que la sécheresse des sols est déjà particulièrement marquée, selon Météo-France, qui fait état d’une situation à fin février qui correspond à celle de mi-avril voir mi-mai pour certains secteurs.

Le BRGM souligne par ailleurs que les pluies de l’automne et de l’hiver, période de recharge essentielle pour la reconstitution des stocks, ont été « très insuffisantes pour compenser les déficits accumulés durant l’année 2022 ». Donc s’il ne pleut pas abondamment dans les prochaines semaines alors que Météo-France annonce pour les trois prochains mois des températures probablement plus élevées que la normale, « on risque d’avoir toute la France concernée par des arrêtés de restriction d’eau », estime Violaine Bault.

Un plan gouvernemental

Actuellement 14 départements sont déjà en vigilance ou en alerte, selon le site officiel Propluvia. Le gouvernement s’apprête à lancer un plan pour améliorer la gestion de l’eau en France. Il sera publié « dans quelques jours », a promis samedi le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu. Ce plan, censé tirer les leçons de la canicule historique de l’été 2022, « est très complet, il comporte une cinquantaine de mesures, il traite de la sobriété, de la quantité, de la qualité, des moyens financiers, de la gouvernance », a ajouté le ministre.

Pour préserver les eaux souterraines, le BRGM a esquissé des pistes, comme de désimperméabiliser les sols pour favoriser l’infiltration des eaux ou recharger les nappes par des eaux « non conventionnelles », y compris des eaux usées traitées. Il est aussi possible de limiter les prélèvements. « Faire des économies d’eau avec chaque petit geste qui permet d’économiser l’eau peut compter », affirme encore Violaine Bault.