Salon des maires : « On nous enfonce encore la tête sous l’eau »… Les élus s’agacent des coupes budgétaires
Au Congrès des maires à Paris,
« Elles sont où les écharpes noires ? » Des milliers d’élus se sont retrouvés ce mardi, porte de Versailles à Paris, pour le traditionnel Congrès des maires. Mais cette année, l’Association des maires de France (AMF) a distribué aux édiles venus de toute la France des écharpes tricolores recouvertes d’une large bande sombre. Un symbole pour mieux dénoncer les cinq milliards d’euros d’efforts demandés aux collectivités pour l’année 2025. Dans les travées du salon, les maires expriment leur colère contre cette coupe budgétaire du gouvernement Barnier pour assainir les comptes publics.
« Est-ce qu’on pourra avoir des cantines de qualité » ?
« Cette écharpe noire, c’est pour montrer que les collectivités sont en train de mourir, on est en train de tuer les communes », soupire Béatrice de François. La maire PS de Parempuyre (Gironde) regrette une nouvelle baisse des dotations à venir. « On se serre déjà la ceinture, alors que nous, contrairement à l’Etat, on a des budgets à l’équilibre. J’ai déjà perdu 1 million d’euros de dotations de l’Etat en dix ans… », soupire celle qui est aussi vice-présidente de Bordeaux métropole.
L’élue socialiste anticipe déjà l’impact des coupes budgétaires à venir. « Est-ce qu’on va devoir faire moins de services périscolaires ? Est-ce qu’on pourra encore maintenir un service de qualité dans les cantines ? J’ai mis en place des transports gratuits pour les activités sportives et culturelles des enfants dont les parents travaillent, mais cela a un coût, donc je ne suis pas certaine de pouvoir tout maintenir. Ces restrictions auront un impact sur la qualité de vie des gens ».
Un peu plus loin, Jean Nadal soupire : « Ces annonces sont une très mauvaise nouvelle. Ça nous contraint dans notre budget », peste l’édile de Maubourguet, petite commune de 2400 têtes dans les Hautes-Pyrénées. Il évoque un cas concret dans sa ville : « On a mille platanes et certains sont touchés par le chancre coloré, un champignon qui provoque leur mort. Il faudrait abattre les arbres malades pour éviter la propagation mais cela coûte 800 euros par tête, sans compter le replantage. Aujourd’hui, je ne sais pas combien je pourrais en sauver… ».
« On nous enfonce encore la tête sous l’eau »
De nombreux élus évoquent l’impact négatif pour les projets d’investissements. « On nous a déjà enlevé des fonds avec la suppression de la taxe d’habitation en 2020, là on nous enfonce encore la tête sous l’eau », grince Jean-Louis Anglade, maire de la commune rurale de Cadéac dans les Hautes-Pyrénées. « Si on n’a plus d’argent, on sera obligés de reporter les investissements, par exemple sur le nombre de logements sociaux à construire ». Même constat pour l’ancien député Jacques Myard, désormais maire de Maisons-Laffitte (Yvelines). « On a des normes drastiques pour les crèches, mais on sera dans l’impossibilité de les respecter. Il va falloir faire des choix, entre les routes à entretenir, les bâtiments à repeindre… », fustige le maire de droite. Béatrice de François évoque une autre conséquence indirecte : « Il y aura aussi un impact négatif pour les entreprises du secteur, car lorsqu’on fait des travaux pour un gymnase ou une école, on emploie des entreprises de la région, c’est un cercle vicieux », avance la maire socialiste.
Vincent Chauvot, maire du village de Saint-Marc-sur-Seine, a lui déjà prévu de renoncer à certains projets. « On avait prévu de refaire la salle des Fêtes, mais c’est 500.000 euros, donc on va devoir réduire la voilure », dit-il. L’élu de Côte-d’Or, qui renonce déjà à une partie de ses indemnités pour tenir ses comptes, évoque la mise en place d’un système D. « Quand je fais le plein d’essence de ma voiture, je remplis parfois un bidon pour les débroussailleuses de la ville. Quand il faut repeindre un établissement, je demande aux habitants qui peuvent de filer un coup de main ». Il hausse les épaules et ajoute : « C’est notre réalité, on se débrouille comme on peut ».