France

Salon de l’Agriculture : Mais où finissent les tonnes de crottes des animaux ?

Au Salon de l’Agriculture, derrière les animaux,

« Pour savoir gagner une élection, il faut savoir tâter le cul des vaches », disait Jacques Chirac. Et pour faire vivre un salon, il faut savoir évacuer tôt ou tard ce qu’il en sort. Soit en moyenne 40 kg de bouse et 50 litres d’urine par bovin. Multipliez par 4.000 animaux présents et neuf jours de Salon de l’Agriculture, et cela donne… 680 tonnes de merde au total.

L’énormité du chiffre n’étonnera guère ni les visiteurs, dont les narines sont titillées dès l’entrée. C’est qu’évidemment, vaches, porcs ou brebis ne vont ni aux toilettes ni dans les espaces verts parisiens faire leurs besoins, mais se vident directement dans leur enclos. D’où « le bruit et les odeurs » toute la journée, pour reprendre une autre expression chiraquienne, un peu moins fameuse.

« Torcher la vache avec de la paille »

L’occasion d’écouter un autre type de poésie : celle de Denis, éleveur accompagné de ses Prim’Holstein, la race superstar des vaches en France, et de leurs bouses. « Rien de plus simple à gérer. Quand une vache chie, il faut sortir le sceau au plus vite pour en récupérer un maximum afin d’éviter de gâcher de la paille ». Le signal est souvent donné lors d’un lever de queue, indicateur que la vidange va bientôt commencer, nous renseigne Maëlys deux stands plus loin.

Didier et ses vaches de concours (elles sont belles n'est ce pas ?)
Didier et ses vaches de concours (elles sont belles n’est ce pas ?) - JLD/20 Minutes

D’autres agriculteurs, moins regardant sur la paille, laissent leurs animaux se soulager tranquilles, puis viennent ensuite avec une fourche-bèche dégager les tiges souillées sur les rebords de l’enclos et les remplacer par du foin neuf. Pour tous, le rituel est ensuite le même, explique Denis : « Torcher la vache et la nettoyer avec de la paille, puis re-brosser ses poils ».

Une vingtaine de vidanges par jour

C’est que, renseigne Didier, une vache se doit d’être belle et propre, particulièrement au Salon où elle est exposée à des centaines de milliers de yeux inquisiteurs. Plus important encore pour les animaux destinés à passer des concours. Alors il faut répéter le geste, car une vache, « ça chie beaucoup ». Une vingtaine de fois, estime Denis. Surtout avec le stress : « En réalité, c’est difficile de comparer. D’habitude, on ne compte pas leur nombre de bouses », poursuit notre éleveur, pour qui le service propreté effectué au Salon de l’agriculture n’est pas nécessairement très différent de celui en temps normal.

C’est ensuite que la brume apparaît. Bernard voit bien que les seaux et la paille salie stockés en rebord de stand de ses vaches bazadaises sont sorti chaque matin « dans des petits wagons » … Mais pour aller où ? Il l’ignore. Le mystère s’épaissit au rayon brebis, ou François nous sort qu’il ignore tout du sort des déjections de ses animaux.

« Sûrement utilisé comme fumier dans un champ d’Ile-de-France », estime Didier. Le service presse du Salon n’ayant pas répondu à nos demandes d’informations, il a fallu fouiller nous-mêmes dans les arcanes d’Internet. On y apprend que différentes entreprises, dont la plus importante l’entreprise Buscoz, s’occupent de stocker la paille en dehors, le temps que la fermentation commence. Après un tri, le fumier est évacué dans différents céréaliers d’Ile-de-France pour le traitement final, et redistribué dans les nombreux champs comme engrais. On avait commencé par Jacques Chirac, finissons par Lavoisier : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ».