France

Quel était le sort des homosexuels et des lesbiennes sous le régime nazi ?

Avant l’arrivée de Hitler au pouvoir, le positionnement du parti nazi sur l’homosexualité est resté longtemps ambigu. « Le régime lui-même valorisait les relations masculines au sein d’unité comme la SA et la SS » explique Florence Tamagne, spécialiste de l’histoire de l’homosexualité et de ses représentations. Ernst Röhm, chef de la SA, était lui-même un homosexuel notoire. « Néanmoins, un discours homophobe extrêmement virulent était porté par Henrich Himmler, nuance l’historienne. Il considérait que l’homosexualité était une forme de dégénérescence. L’homosexuel n’avait aucune valeur sociale. »

Entre 5.000 et 15.000 homosexuels déportés

Lorsque Hitler arrive au pouvoir en février 1933, toute ambiguïté est levée. En 1935, le paragraphe 175 du Code pénal allemand, condamnant les relations sexuelles entre les hommes en Allemagne, est aggravé. À partir de ce moment, les condamnations s’élèvent jusqu’à dix ans de prison et peuvent être associées à l’envoi en camp de concentration. Ce paragraphe ne s’appliquait qu’aux ressortissants du Reich, soit les Allemands et les habitants des territoires annexés comme l’Alsace-Moselle.

Entre 5.000 et 15.000 hommes ont été déportés dans des camps de concentration, où ils portaient le triangle rose. « A peu près la moitié d’entre eux a péri dans les camps, explique Florence Tamagne. Ils étaient souvent affectés aux compagnies disciplinaires, donc aux travaux les plus durs. Ils ont pu être victimes aussi d’expériences médicales supposées les guérir. »

Le cas des lesbiennes

L’homosexualité féminine n’étant pas criminalisée lors de la refonte du paragraphe 175, la majorité des lesbiennes ont échappé à la répression, cela n’empêchant pas les discriminations. « On voit qu’elles pouvaient perdre leur emploi. Certaines ont été envoyées en hôpital psychiatrique ou ont perdu la garde de leurs enfants, continue Florence Tamagne. Néanmoins, on connaît des cas de femmes qui ont été déportées en tant que résistantes, qu’asociales, en tant que juives et en tant que lesbiennes, le lesbianisme constituant une circonstance aggravante. »

Une longue reconnaissance

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le paragraphe 175 reste en vigueur en Allemagne, cela rendant extrêmement difficile le témoignage des victimes. Le premier témoignage d’un triangle rose, celui de l’autrichien Heinz Heger, est médiatisé en 1972. « Il faut attendre les mouvements de libération gay et lesbien des années 1970 pour que le sujet commence à être abordé ouvertement et discuté dans le grand public », conclue l’historienne Florence Tamagne.