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Que signifie le code « SSSS » sur votre carte d’embarquement vers les Etats-Unis ?

Les personnes qui se sont déjà rendues aux Etats-Unis en avion ont peut-être déjà eu la mauvaise expérience de voir inscrit sur leur carte d’embarquement le code « SSSS ». Mais si ces voyageurs ont pu constater que cela implique un traitement spécial de la part des autorités aéroportuaires, il y a peu de chances qu’ils sachent pourquoi ils ont été discriminés. D’aucuns évoquent un choix aléatoire parmi les passagers d’un vol. Peut-être, ou peut-être pas…

On ne compte plus les vidéos sur les réseaux sociaux de voyageurs étonnés d’avoir eu droit à des contrôles de sécurité plus poussés que les autres passagers du même avion en saison d’une simple mention sur leur carte d’embarquement. Âge, sexe, nationalité, pays de départ, compagnie… Ces passagers « SSSS » n’ont a priori rien en commun, exception faite de leur destination : les Etats-Unis. Et tous rapportent la même histoire que résume Juliette* à 20 Minutes : « La veille du départ, j’ai pu enregistrer mon mari et mes enfants en ligne, mais pas moi. Je devais le faire au guichet de la compagnie le jour du vol », raconte-t-elle. Assez étrange pour qu’elle suspecte quelque chose et découvre avoir été sélectionnée avec mention « SSSS ».

« Je passe au détecteur manuel de la tête aux pieds »

Bingo ! « Quand on me donne mon billet, je vois les 4S en bas à droite », poursuit Juliette. Au contrôle des passeports à l’embarquement, elle est dirigée dans une file différente spécifique avec quelques autres personnes. « Là, j’enlève mes chaussures, mon manteau. On me passe au détecteur manuel de la tête aux pieds. L’intérieur de mes chaussures, mes semelles, mes poches de manteau, mon sac à dos, mon sac à main sont passés au contrôle chimique de détection d’explosifs », détaille-t-elle, sans oublier les « questions sur où j’allais et pourquoi ». Finalement Juliette a pu rejoindre sa famille à bord de l’avion sans autres surprises.

Le code « SSSS » signifie « Secondary Security Screening Selection », ou « Sélection de contrôle de sécurité secondaire ». Encore faut-il savoir qui décide de vous estampiller ainsi. Contactés par 20 Minutes, plusieurs aéroports français nous ont renvoyés vers les compagnies aériennes, lesquelles ont rejeté la balle dans le camp des autorités américaines, les « US Marchal » selon Air France. En fait, c’est l’Administration de sécurité des transports (TSA) qui est derrière tout ça, et l’on découvre que le choix des passagers « SSSS » n’est pas si aléatoire qu’on voudrait nous le faire croire.

« En sûreté on a besoin de discriminer les passagers »

« Officiellement, on va toujours vous dire qu’il s’agit d’un algorithme aléatoire », assure à 20 Minutes Christophe Naudin, criminologue et spécialiste de la sûreté aérienne. « Mais en sûreté, on a besoin de discriminer les passagers, de les trier, de faire un choix subjectif », poursuit-il. Pour cela, l’expert explique qu’il existe une quinzaine de critères. « Un passager sur un vol long-courrier sans bagage, certains passeports, payer son billet deux jours avant en liquide… », liste-t-il.

Dans un document confidentiel qui a fuité en 2008, la TSA détaille ses procédures de contrôle et évoque ce qu’elle appelle les « selectee », ces passagers présélectionnés par ordinateur qui feront l’objet d’un « dépistage spécial ». L’étiquette « SSSS » peut être mise automatiquement « au moment de la demande d’ESTA ou de visa, mais aussi par « tiltage », c’est-à-dire manuellement au moment de l’achat du billet », explique Christophe Naudin.

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Si le code « SSSS » est spécifique aux Etats-Unis, d’autres destinations ont soit des codes équivalents, soit d’autres moyens de discriminer les passagers. « En plus des algorithmes, Israël utilise encore des officiers du Mossad comme profilers aux escales par exemple », affirme l’expert. Alors si vous faites l’objet de contrôles plus poussés que les autres, c’est qu’il y a sans doute une raison, même si elle peut être anodine.

*le prénom a été modifié