Pyrénées : C’est quoi ce problème de consanguinité chez les ours ?
Près d’une centaine d’ours ont été recensés en 2024 sur l’ensemble du massif des Pyrénées. Vingt-deux oursons sont nés en une année et l’ours continue de se développer dans le pays, selon l’Office national de la biodiversité. Si c’est une bonne nouvelle, une ombre menace tout de même l’espèce : la consanguinité.
« Les individus présents sont majoritairement apparentés. Ils sont liés par leurs ancêtres. En réalité, environ 90 % de la population présente descendent de trois individus. Le coefficient de consanguinité de la population a dépassé les 16 % en 2024, celui des oursons de l’année est au-delà du seuil critique de 20 % pour la troisième année consécutive. Cela n’augure rien de bon », explique Alain Reynes, directeur du Pays de l’ours-Adet, à 20 Minutes.
Cette hausse de la consanguinité peut venir de deux situations différentes. La première, si une population naturelle se réduit, les individus qui restent se reproduisent entre eux. La deuxième se déclare en cas de restauration de population comme dans les années 1990 dans les Pyrénées. « On n’en lâche pas forcément assez et tous ne se reproduisent pas », précise le spécialiste des ours.
Pyros, le papa ours
A l’époque, deux femelles et un mâle avaient été réintroduits dans le massif. Pyros, l’unique mâle adulte dominant en 1997 l’est resté jusqu’en 2013. Il était donc le « père » de tous les nouveau-nés dans les montagnes. Pour remédier à ce problème, un jeune mâle est lâché en 2006, « mais il s’est très peu reproduit et il a disparu en 2014. Son unique ourson a été empoisonné en Espagne », développe Alain Reynes. Goiat, un autre mâle introduit en 2016 par les Catalans n’arrive pas non plus à se reproduire…

Malgré l’aide humaine, Pyros reste donc l’ancêtre d’une grande majorité des près de 100 ours dans les Pyrénées et c’est problématique. Ici pas question de consanguinité pour garder le sang pur d’une monarchie française, la survie de l’espèce est en jeu.
Une altération de la reproduction en jeu
« S’ils sont consanguins, il y a un risque de sensibilité aux maladies. Imaginons qu’il y ait une épidémie, s’ils ont la même génétique, ils seront tous des cibles », informe le directeur du Pays de l’ours-Adet. Les ours sont également victimes de malformations internes ou externes, mais surtout : la consanguinité baisse la performance de reproduction. « On constate déjà que les portées consanguines donnent moins d’oursons. La population pourrait donc baisser. Même si cette année on a compté davantage d’individus, on constate les premiers effets. »
La diminution de la diversité génétique « pourrait potentiellement altérer cette dynamique dans les années futures », met en garde le Réseau ours brun. Une étude est actuellement menée pour quantifier les effets de la consanguinité sur la démographie des ours des Pyrénées, avec des résultats complets attendus fin 2026.
Mais une première solution existe et les associations la martèlent : la réintroduction d’autres individus différents génétiquement. « C’est indispensable », lâche Alain Reynes en attendant un signe de l’Etat.