France

Procès Le Scouarnec : « Je te demande pardon »… Les excuses systématiques et monocordes de l’ex-chirurgien

A la cour criminelle du Morbihan, à Vannes,

C’est presque devenu un rituel. A chaque fin d’audition d’un témoin, Joël Le Scouarnec se lève, prend le micro et livre un seul et même discours. D’une voix posée, souvent empreinte par l’émotion, l’ancien chirurgien s’adresse systématiquement aux témoins appelés à la barre de la cour criminelle du Morbihan. « Ce que j’ai fait est impardonnable. Mais pour ce que je t’ai fait à toi, je te demande pardon ». Ces mots, l’accusé les a adressés à ses deux plus jeunes fils, à son ex-femme, à sa cousine ou encore à son frère. Toujours avec le même ton. Toujours habillé de la même veste zippée noire. Toujours avec ce même regard impassible. Toujours avec cette même tête, rentrée dans les épaules. Toujours avec cette même impression de contrôle.

Vendredi, il a répété les mêmes mots avec un ton monocorde « je te demande pardon » à son fils aîné. Il venait pourtant de lui apprendre qu’il avait « commis des actes sexuels » sur sa fille, sa propre petite-fille donc, alors que cette dernière n’était âgée que de 2 ans. « C’est peut-être, sans doute, la dernière fois que je le vois. J’ai entendu sa colère et son désarroi, il a su l’exprimer. Je respecte cette colère », a-t-il déclaré.

« Je ne peux pas revenir en arrière »

Jugé pour des faits de viols et d’agressions sexuelles sur 299 enfants et adolescents, Joël Le Scouarnec « reconnaît une très grande majorité des faits » qui lui sont reprochés. Son avocat avait prévenu : « Il ne cherche à se défausser de ses responsabilités ». Dès le premier jour, il avait fait part de ses remords à l’égard des victimes, avec ce même ton monocorde. « J’ai commis des actes horribles sur des personnes qui n’étaient alors que des enfants. Je suis parfaitement conscient que ces blessures sont ineffaçables et irréparables. Je ne peux pas revenir en arrière. Je leur dois d’assumer la responsabilité de mes actes, qu’ils porteront pour le reste de leur vie », avait-il déclaré avant de se rasseoir.

Écoutant religieusement l’ensemble des débats, l’accusé a parfois été ému aux larmes, notamment quand ses garçons ont déposé. Ou quand il était question de son propre père, accusé d’avoir abusé sexuellement de son deuxième fils. A chaque fois, Joël Le Scouarnec a voulu prendre la parole pour lâcher quelques mots à chacun des témoins. « Ce sont des paroles très convenues », analyse l’avocate d’une dizaine de victimes, Me Elodie Grelot, sans vouloir en dire plus. « Il y a des regards entre lui et les témoins qui font très mal », témoigne Ophélie *, une des victimes qui a assisté aux débats.

Notre dossier sur le procès Le Scouarnec

Selon l’avocat de l’accusé, ces excuses systématiques sont à l’unique initiative de son client. « Il n’y a rien d’écrit, c’est lui qui souhaite s’exprimer. Cela fait des années qu’il s’excuse pour ce qu’il a fait. Il l’a souvent fait en garde à vue. C’est sa volonté […] d’assumer », assure l’avocat rennais Me Maxime Tessier.

Le procès de Joël Le Scouarnec se tient depuis le 24 février devant la cour criminelle du Morbihan, à Vannes. Il devrait durer quatre mois.
Le procès de Joël Le Scouarnec se tient depuis le 24 février devant la cour criminelle du Morbihan, à Vannes. Il devrait durer quatre mois.  - C. Allain/20 Minutes

Mardi, un enquêteur en personnalité avait décrit Joël Le Scouarnec comme un « calculateur » qui semblait « anticiper chaque question comme lors d’une partie d’échecs ». Le procès de l’ancien médecin se poursuivra jusqu’au mois de juin devant la cour criminelle du Morbihan. Il devrait être entendu lundi ou mardi prochain pour une étude de sa personnalité, de son parcours professionnel, avant d’être questionné sur les faits.

* Le prénom a été modifié