France

Procès des viols des Mazan : Un seul condamné fait appel.

Husamettin D. est l’unique condamné à avoir maintenu son appel après sa condamnation à neuf ans de réclusion criminelle pour « viol aggravé ». Simone M., voisin des Pelicot, a été condamné à neuf ans de prison et a également déclaré devant la cour criminelle du Vaucluse être tombé dans un « piège ».


Husamettin D. n’a jamais « remis en question sa décision ». Cet homme de 44 ans, accusé d’avoir violé Gisèle Pelicot alors qu’elle était inconsciente, est le seul des condamnés à avoir maintenu son appel. « Mon client a toujours dit et répété qu’il n’avait pas l’intention de violer cette femme », précise son avocate, Me Sylvie Menvielle. Il souhaite pouvoir expliquer son expérience, soutenant qu’il a été dépassé par la personnalité de M. Pelicot. Dix mois après sa condamnation à neuf ans de réclusion criminelle pour « viol aggravé », cet homme marié, père d’un enfant trisomique et souffrant lui-même de polyarthrite, comparaît à partir de ce lundi devant la cour d’appel de Nîmes. Seul.

À l’issue du premier procès, Dominique Pelicot, condamné à vingt ans de réclusion criminelle – la peine maximale – avait été l’un des premiers à annoncer qu’il ne ferait pas appel du verdict. De nombreux autres accusés ont suivi son exemple. Pour certains, le calcul était rapide : entre la détention provisoire déjà effectuée et le jeu des remises de peines, ils espéraient une sortie rapide de prison. Un choix pragmatique mais pas toujours simple, car renoncer à faire appel équivaut à accepter d’être définitivement condamné pour viol. Cependant, beaucoup contestaient cela.

Au terme du délai légal de dix jours, dix-sept hommes ont interjeté appel. Pour certains, il s’agissait surtout de prendre le temps de réfléchir à la meilleure stratégie. « Avec mon client, nous avions convenu que si la peine était trop lourde, nous ferions appel, quitte à nous désister. Ce temps nous semblait nécessaire pour réfléchir sereinement », se remémore Me Christophe Huguenin-Virchaux.

Son client, Charly A., a été condamné à treize ans de réclusion criminelle pour être allé à six reprises chez les Pelicot. Lui aussi n’a cessé de nier toute « intention » de viol, soutenant qu’il pensait participer à un « scénario libertin ». Son cas a également retenu l’attention, car il avait échangé avec Dominique Pelicot sur la possibilité de faire la même chose à sa mère. À la cour, il avait affirmé n’en avoir jamais eu réellement l’intention.

Après plusieurs mois, le trentenaire a finalement décidé de renoncer à poursuivre la procédure. « Entre le tapage médiatique autour de ce dossier et la vindicte populaire, il a l’impression que son discours n’aurait pas pu être audible », explique son avocat. Ce dernier ajoute : « On a le sentiment que dans ce dossier, quoi qu’on dise, quoi qu’on fasse, les dés étaient jetés d’avance. » Cette réflexion est d’autant plus d’actualité que ce procès se déroulera dans des conditions bien différentes. En première instance, le jury était composé de magistrats professionnels. En appel, ce sont des citoyens tirés au sort qui siégeront. Un élément non négligeable mais dont les avocats ont du mal à évaluer l’impact.

« Est-ce que les jurés seront capables de s’extraire de toute la médiatisation et de la pression autour de cette affaire pour examiner le dossier à blanc ? Les magistrats n’en ont pas été capables », estime Me Yannick Prat. Son client, Simone M., voisin des Pelicot, a été condamné à neuf ans de prison. Comme Husamettin D., il a affirmé devant la cour criminelle du Vaucluse avoir été piégé. Il fait partie des derniers à s’être désisté. « Je n’ai pas influencé mon client dans sa décision parce que moi-même, je n’ai aucune idée de ce que ça peut donner », précise son avocat. « Il y a une telle hystérisation mondiale autour de ce dossier qu’on est en droit de se demander si les jurés seront capables d’apprécier seulement les faits. »

Les enjeux sont cruciaux : en interjetant appel, Husamettin D. s’expose à une peine pouvant aller jusqu’à vingt ans de réclusion criminelle. « Comme dans n’importe quel procès, il y a un risque d’une peine plus lourde. Faire appel, ce n’est jamais sans risque », insiste Me Christophe Huguenin-Virchaux. L’absence de Dominique Pelicot dans le box des accusés – il sera entendu comme simple témoin en raison de son absence d’appel – sera-t-elle à l’avantage de l’accusé ? En première instance, il avait systématiquement affirmé que ses coaccusés savaient parfaitement ce qu’ils faisaient, se comportant parfois en procureur. Cependant, dans son verdict, la cour avait clairement distingué entre Dominique Pelicot, présenté comme le « chef d’orchestre », et les 50 autres accusés, les « musiciens », en échelonnant les peines de manière très nette. Cette distinction se retrouvera-t-elle à Nîmes ?