Procès des viols de Mazan : Gisèle Pelicot affirme « La seule victime, c’est moi »
Gisèle Pelicot a exprimé son exaspération face aux dénégations d’Husamettin D., l’accusé, lors de son procès à la cour d’appel de Nîmes en ce mercredi. Le verdict de cette affaire, qui a lieu après la révélation des faits par la police d’Avignon le 2 novembre 2020, est attendu jeudi.

À la cour d’appel de Nîmes,
Sa colère, bien que contenue, est palpable. « À quel moment allez-vous reconnaître que vous avez violé ? » « À quel moment ai-je donné mon consentement ? Jamais. » Droit comme un « i » à la barre de la cour d’appel de Nîmes, Gisèle Pelicot, identifiable grâce à son impeccable carré auburn, manifeste son exaspération à l’égard des dénégations répétées d’Husamettin D., le seul mis en cause dans ce nouveau procès. Assis sur une chaise aux côtés de ses avocats, cet homme de 44 ans, aux cheveux noirs gominés, avec une barbe de trois jours et des lunettes à monture dorée, l’écoute d’un air impassible, les yeux perdus dans le vide.
Un peu plus tôt dans la matinée, il s’était montré intransigeant, niant fermement les accusations de viol, parfois de manière absurde. « Je suis venu pour un plan libertin. On m’avait vendu un scénario », a-t-il répété plusieurs fois. Ces déclarations ont été faites juste après la diffusion de quatorze vidéos incriminantes, où l’on peut voir la victime totalement immobile, ronflant par moments, se faire pénétrer à de nombreuses reprises. « Elle est victime d’une machination, je n’y suis pour rien », insiste-t-il. Selon lui, il serait tombé dans un « piège » tendu par Dominique Pelicot et aurait été contraint par son « hôte ». Sur les images, on peut le voir se mouvoir furtivement, on l’entend chuchoter.
« Cette dame-là, elle est plus victime que moi »
« Considérez-vous qu’il y a deux victimes dans cette affaire ? », lui demande Me Stéphane Babonneau, l’un des avocats de Gisèle Pelicot. « Oui, je suis une victime, mais cette dame-là est plus victime que moi », répond-il instantanément. En entendant cela, Gisèle Pelicot lève les yeux au ciel et soupire. « La seule victime, c’est moi. Vous êtes victime de quoi ? », lui rétorque-t-elle avec vigueur. Elle ajoute : « J’ai honte pour vous, assumez vos actes. »
Gisèle Pelicot, élégamment vêtue d’une chemise blanche et d’un veston jacquard, évoque en quelques mots la déflagration qui a suivi les révélations faites par la police d’Avignon, le 2 novembre 2020. « Il va falloir que je me reconstruise sur ces ruines », avoue-t-elle. Bien qu’elle considère avoir fait des progrès, son drame la rattrape tous les jours. La semaine dernière, par exemple, elle a dû subir une biopsie du col de l’utérus après la découverte de cellules potentiellement cancéreuses. Cela fait partie des suites de l’une des quatre MST contractées durant son calvaire. « Aujourd’hui, je suis avec vous, mais aussi en attente de ces examens. »
Ses mots pour Caroline
Il y a aussi le « tsunami » provoqué par cette affaire dans sa famille. « Nous étions une famille très unie », souligne-t-elle. Depuis lundi, seul son fils cadet Florian l’accompagne. Ses relations avec sa fille, Caroline Darian, sont particulièrement tendues. Celle-ci ressent que sa mère ne la soutient pas suffisamment, alors que deux photos d’elle endormie en sous-vêtements ont été trouvées dans les fichiers de Dominique Pelicot. « C’est beaucoup plus difficile pour elle, elle est dans le doute, je comprends sa souffrance et je l’entends », admet la septuagénaire. « J’espère qu’elle aura les réponses que je n’ai pas pu lui donner », souligne-t-elle en parlant de la plainte de sa fille contre son père. Des paroles qui ressemblent à une main tendue.
Bien que Gisèle Pelicot souhaite aujourd’hui ne plus jamais se retrouver dans un tribunal, elle n’a jamais regretté sa décision de lever le huis clos. Rejetant le statut d’icône – « je suis une femme ordinaire » – elle se positionne comme la porte-parole des victimes. « C’est toujours aux victimes de se justifier », déplore-t-elle. Comment lui donner tort alors que les avocats de la défense l’interrogent sur le fait qu’il lui arrivait de se baigner nue dans sa piscine lorsqu’elle était seule ? Ou lui demandent comment elle vivait le fait que Dominique Pelicot la photographiait régulièrement en sous-vêtements ? Le verdict est attendu jeudi.

