Pour la première fois en 50 ans, la France importera plus de produits agricoles.
La France, premier pays agricole européen, connaît une crise avec une perspective d’une balance commerciale agroalimentaire négative en 2025, pour la première fois depuis 1978. Entre 2015 et 2024, les exportations de produits agricoles ont baissé de 20 % en volume, tandis que celles de vins et spiritueux français ont reculé de 4 % en valeur en 2024, après une baisse de 6 % en 2023.
Vive concurrence, tensions géopolitiques et commerciales, crise des vocations, aléas climatiques… Bien que la France soit le premier pays agricole européen, elle fait face à une crise sur tous les fronts. En conséquence, la balance commerciale alimentaire pourrait devenir negative en 2025, une première depuis près de 50 ans.
« De septembre 2024 à septembre 2025, en glissant, la balance agroalimentaire française est déficitaire de 158 millions d’euros, ce qui signifie qu’on est en train de s’orienter vers une balance commerciale agroalimentaire française négative en 2025, pour la première fois depuis 1978 », a souligné Dominique Chargé, président de la Coopération agricole, lors des assises dédiées à relancer les exportations.
La France connaît une chute de 20 % de ses exportations en volume de produits agricoles entre 2015 et 2024, ainsi qu’une baisse de 7 % pour les produits agroalimentaires. Autrefois deuxième exportatrice européenne en 2000, elle se classe désormais sixième, derrière les Pays-Bas (45 milliards d’euros d’excédent), la Pologne et l’Espagne, qui se distinguent notamment dans les secteurs du porc, du vin, des fruits et légumes.
Concernant les exportations de céréales, premier secteur d’exportation pour la France (14 % du total), celui-ci a généré plus de 82 milliards d’euros en 2023, surpassant l’aéronautique, les véhicules et équipements, et la chimie. Cependant, cet excédent diminue depuis plusieurs années, avec la menace d’un bilan annuel négatif en 2025 si la tendance se maintient.
Bien que la France soit le premier producteur et exportateur de céréales de l’Union européenne, elle perd du terrain. En 2022, les exportations avaient atteint 11 milliards d’euros, dopées par la flambée des prix suite à l’invasion de l’Ukraine. En 2024, les exportations ont chuté de plus d’un milliard d’euros, à cause d’une baisse des prix et des volumes. Les rendements améliorés ne compensent pas la réduction des surfaces cultivées en blé, qui ont atteint leur niveau le plus bas en vingt ans, ni la concurrence féroce des céréales en provenance de la mer Noire.
La production viticole française rencontre également des difficultés. Bien qu’une hausse de production pourrait permettre d’exporter de 16 à 17 millions de tonnes de blé entre 2025 et 2026, dont 10 millions vers des pays tiers (hors UE), atteindre cet objectif semble complexe sans l’Algérie, qui a cessé d’acheter du blé français, ou la Chine, qui a considérablement réduit ses achats dernièrement.
Le dérèglement climatique, la chute de la consommation de vin rouge, un conflit douanier avec les États-Unis, le repli du marché chinois et l’inflation des coûts s’accumulent contre la viticulture, particulièrement touchée en Occitanie et Nouvelle-Aquitaine. En 2024, tandis que l’Italie, premier exportateur mondial, voit ses commandes augmenter, les exportations de vins et spiritueux français ont reculé de 4 % en valeur, après une baisse de 6 % en 2023, même si les volumes se stabilisent. De plus, la vente de vin sur le marché américain, principal marché du secteur, subit une imposition de 15 % de droits de douane. Concernant la vendange de 2025, elle pourrait être la plus basse depuis 1957 à cause de la canicule et de la sécheresse estivales.
En ce qui concerne les fruits et légumes, la France continue d’importer plus de la moitié de sa consommation. Pour la viande, 25 % de la viande bovine consommée en France provient d’importations (55 % dans la restauration). En 2024, 59 % de la viande ovine est également importée. La production de volailles françaises a diminué de près de 30 % depuis son pic de 1997, dépassée par la Pologne, numéro un européen dont la production a quadruplé, ainsi que par l’Espagne et l’Allemagne. Parallèlement, la demande nationale augmente de 35 %, entraînant la balance commerciale dans le rouge.

