PFAS : Canoë sur le Rhône pour tester la pollution de l’eau
Rémi Camus descend le Rhône en packraft depuis le 15 septembre pour prélever de l’eau et analyser la présence de PFAS, des polluants considérés comme éternels. Les résultats des analyses de ces échantillons sont attendus pour le premier semestre 2026.
Plus de 800 km, 51 sites répertoriés et un mois pour les parcourir. Après avoir descendu le Mekong en hydrospeed, couru à travers l’Australie et nagé autour de la France, Rémi Camus, explorateur de 40 ans, se lance dans un nouvel défi : descendre le Rhône en packraft (un canoë gonflable) pour examiner la pollution du fleuve par les PFAS, depuis sa source jusqu’à son embouchure, soit du glacier à la Méditerranée.
Ce midi-là, juste après le barrage de Vienne, à Ampuis, près de Lyon, l’aventurier débarque avec son équipe. Vêtu de chaussures Crocs roses, d’un short de bain et d’une casquette, il se prépare à prélever plusieurs échantillons au milieu du fleuve : un à la surface, un autre en profondeur.
« C’est le laboratoire Wessling, avec lequel nous travaillons, qui a identifié les points où faire les prélèvements », explique-t-il en rinçant les contenants au bord de l’eau, avant de s’installer sur son packraft. « Pour être le plus neutre possible, on prend des échantillons à 30 cm et à 2 m de profondeur, à chaque changement sur le fleuve. Par exemple, nous avons fait des prélèvements avant et après que la Saône rejoigne le Rhône, ainsi que avant et après un barrage. »
Rémi Camus, membre de la Société des explorateurs français depuis quinze ans, a été formé par le laboratoire à suivre un protocole strict. « C’est du bon sens, notamment respecter l’amont et l’aval, mais cela permet d’obtenir des résultats conformes, sans que l’on puisse nous reprocher un travail mal fait. C’est d’ailleurs la plus grande difficulté de cette descente : prélever de l’eau à un point précis sur le packraft qui se déplace avec le courant. »
À quoi vont servir tous ces prélèvements ? « Réaliser une cartographie des PFAS », répond fièrement l’aventurier, qui confie en même temps qu’il ne « savait pas vraiment ce que ces quatre lettres voulaient dire avant ». Il s’est intéressé à ce sujet en juin 2023, lorsqu’il a nagé de Calvi à Monaco, en totale autonomie. « C’étaient les prémices de cette aventure du Rhône, dit-il. Avec le laboratoire Wessling, nous voulions déjà travailler sur ces polluants invisibles, présents partout. Les résultats étaient intéressants mais pas assez approfondis pour que nous puissions les interpréter, la Méditerranée étant trop vaste. Nous avons donc resserré notre zone de travail pour comprendre comment les PFAS évoluaient dans le Rhône. Pour moi, les PFAS représentent réellement le défi du XXIe siècle. »
Depuis le 15 septembre et son départ de Gletsch, en Suisse, les journées de Rémi et de son équipe sont rythmées par « environ neuf heures de packraft », mais aussi par la vie de bivouac, la communication, des intervenants pour son documentaire qui sera réalisé après cette aventure, et les échanges avec les laboratoires pour envoyer les échantillons « dans de bonnes conditions, environ tous les deux jours ». En plus de Wessling, l’équipe collabore avec le laboratoire Deep de l’INSA, chargé d’interpréter les résultats.
« L’interprétation est très importante, souligne-t-il. Si nous faisions cette aventure en avril-mai, nous n’aurions pas du tout les mêmes informations. Il y aurait une fonte des glaces plus importante, donc plus d’eau dans le Rhône, ce qui pourrait sous-entendre une dilution de l’information et peut-être des quantités de PFAS moins importantes. Alors que les polluants sont toujours là, c’est juste qu’il y a plus d’eau. »
Être accompagné scientifiquement est essentiel pour lui. « Sans cela, il est difficile de faire comprendre à la population que cette eau qui semble limpide peut être complètement polluée », insiste-t-il en faisant couler de l’eau translucide du Rhône sur ses gants. Le laboratoire pourra analyser 56 PFAS parmi le millier existant.
En plus de son travail scientifique, Rémi Camus est soutenu par une équipe qui réalise un documentaire de 52 minutes, car il souhaite sensibiliser le public à cette « pollution invisible ». Il envisage également de « revenir » sur son parcours avec les résultats, afin d’inciter à l’action, montrant qu’il existe des solutions pour éviter l’utilisation des PFAS. Les résultats des analyses sont attendus pour le premier semestre 2026.

