FranceSport

Open d’Australie : Spectaculaire, fils de joueur pro… Qui est Ben Shelton, la révélation de Melbourne ?

Pour trouver trace d’un Américain vainqueur d’un tournoi du Grand Chelem, il faut toujours remonter à 2003, avec le succès d’Andy Roddick à l’US Open, quelques mois après celui d’André Agassi en Australie. Difficile de dire que la disette va bientôt prendre fin pour le pays roi du tennis à la fin du XXe siècle, avec, outre le mari de Steffi Graf, Pete Sampras et Jim Courier comme porte-drapeaux. Mais la Team US brille actuellement à Melbourne, en plaçant quatre représentants en 8es de finale et trois en quarts : Sebastian Korda ainsi que Tommy Paul et Ben Shelton, qui se rencontreront.

Ce dernier, puissant gaucher tombeur de son compatriote moustachu Jeffrey John Wolf en 8es, est le moins connu. Assez logique, étant donné qu’avant de découvrir les terres australes, le jeune colosse de 20 ans (1,93 m, 88 kg) n’avait jamais quitté la mère patrie. Même pas pour des vacances, comme il l’avait indiqué sur Twitter le 29 décembre, en répondant à un tweet d’un journaliste portugais. « J’ai utilisé mon passeport pour la première fois il y a deux jours », avait lâché l’actuel 89e mondial (qui sera au pire 43e lundi prochain), lequel naviguait au-delà du Top 500 jusqu’en mai dernier.

Le champion universitaire américain de tennis 2022, qui s’imaginait un avenir dans le football US jusqu’à ses 12 ans, se contentait donc jusqu’à présent de briller à domicile, tout en étudiant la finance, ce qui laisse tout de même plus de choix qu’en Andorre ou même en France. Il écumait les courts du pays avec son équipe des Florida Gators, sous la houlette de son père Bryan Shelton, 55e à l’ATP en 1992 et 8es de finaliste à Wimbledon deux ans plus tard, après avoir maté le spectaculaire Allemand Michael Stich, alors 2e mondial. Sa mère Lisa a aussi brillé chez les juniors et le frère de cette dernière, Todd Witsken a été 43e mondial en simple et 4e en double avant de décéder à 34 ans en 1998, quatre ans avant la naissance de Ben, digne enfant de la (petite) balle.

Les bons conseils de Papa

Le paternel se trouve à l’origine du côté casanier de son fils qui, adolescent, lui demandait de pouvoir aller se frotter à la concurrence étrangère : « Il m’a répondu : « Pourquoi irait-on jouer dans un autre pays alors que tu n’es même pas le meilleur ici ? » », a confié Shelton Jr au site de l’ATP.

Jusqu’à cette quinzaine à Melbourne, le principal coup d’éclat du fiston restait un succès sur le Danois Casper Ruud (5e mondial), en août dernier lors du 2e tour du Masters 1000 de Cincinnatti, pour lequel il avait bénéficié d’une invitation, suivie d’une nouvelle « wild card » à l’US Open, juste après son passage chez les pros (défaite au 1er tour contre le Portugais Nuno Borges).

Lauréat de trois Challengers consécutifs (la 2e division du circuit) en novembre, le jeune Américain a reconnu avoir souffert du décalage horaire à Adélaïde (défaite au 1er tour contre le local James Duckworth) puis à Auckland (échec contre Quentin Halys en 8es) avant de tracer sa route à Melbourne. Certes, son tableau n’a pas été des plus féroces : le Chinois Zhang Zhizen pour commencer (battu seulement au super tie-break du 5e set), puis le Chilien Nicolas Jarry, l’Australien Alexei Popyrin (expédié tous deux en trois manches) et, donc, Wolf, battu après cinq sets et 3h51 de jeu.

Des études de finance en parallèle du tennis

Cependant, cet énorme serveur a impressionné avec son jeu tout en puissance, pas vraiment comparable à celui de son idole Roger Federer. Même s’il est capable de quelques fantaisies entre deux parpaings, comme ce lob en tweening qui a bien tourné sur les réseaux sociaux, lors de sa victoire sur Ruud à Cincinnati…

En Australie, Shelton réussit aussi à emballer le public, à l’américaine, avec moult comportements démonstratifs qui ne collent pas trop au métier de conseiller financier auquel il se destinait s’il ne perçait pas dans le sport. Le jeune joueur continue d’ailleurs à étudier à distance, en soirée, comme il le confiait au site de l’ATP avant le début du tournoi, entre deux digressions sur son envie de voir des koalas et des kangourous :  « C’est vraiment bien d’avoir quelque chose en dehors du tennis dans lequel je peux me plonger ou passer du temps à faire, pour ne pas être centré sur une seule chose. »

Un serveur hors pair

Les leçons du soir vont rapidement passer au second plan si la prophétie de Popyrin se réalise : « S’il continue à jouer comme ça, le gars est Top 10 dans six mois, avait lâché l’Australien après sa défaite face au désormais quart de finaliste à Melbourne. Il frappe les lignes, il possède un deuxième service moyen à 190 km/h, vous ne pouvez pas faire grand-chose pour attaquer cette deuxième balle, et c’est encore plus dur parce que c’est un gaucher. »

La surprise de la quinzaine se montrait plus raisonnable, sur Eurosport : « Mes objectifs ? Le Top 30 d’ici la fin de l’année, et une participation aux Jeux olympiques l’an prochain. » D’ici le rendez-vous parisien, Ben Shelton aura sans doute découvert l’Europe et la capitale de la France dès ce printemps, à Roland-Garros.