France

Nantes : « Je découvre les arts »… Une exposition avec des œuvres en 3D à toucher pour les aveugles

Une exposition sans panneau « Interdiction de toucher », ça existe ! Depuis lundi, le passage Sainte-Croix dans le centre de Nantes accueille Tactile Tour, une exposition itinérante qui voyage dans toute la France depuis un an. Présentées par l’association Valentin Haüy (AVH), ce sont douze œuvres bien connues, recréées en 3D pour permettre aux personnes aveugles et malvoyantes de les découvrir au toucher.

Le Mariage de la Vierge de Raphaël, une partie de la tapisserie de Bayeux, L’Homme de Vitruve et La Vierge aux rochers de Léonard de Vinci… « Je découvre les arts », souffle Nathan, un jeune collégien aveugle de 15 ans. Faisant courir ses doigts sur les reliefs, il énumère : « Je sens un bateau à voiles, c’est un drakkar non ? Je sens un paysan avec une cape, ici c’est sa tête ! » Ravi d’accéder à tout un pan de la culture qui lui était inconnu, c’est la première fois qu’il se rend à une exposition comme celle-ci.

« Des détails que je ne connaissais pas »

C’est Rémy Closset, architecte de formation et malvoyant, qui a eu l’idée de modéliser des œuvres existantes en 3D pour les rendre accessibles. Dans le processus de fabrication, il y a une grande partie de création : c’est lui qui décide quel élément du tableau il va mettre en avant.

Bruno a 74 ans et est malvoyant : il ne voit pas plus loin que 5 mètres devant lui. « Je découvre des détails que je ne connaissais pas », affirme-t-il en touchant la modélisation 3D du Mariage de la Vierge. Dans certains cas, les déficients visuels accèdent même à plus d’informations que les voyants ! Devant la reproduction de L’Homme de Vitruve de Léonard de Vinci, Michel, 70 ans et aveugle, plaisante : « Je sens même ses fesses ! Vous n’avez pas ça sur l’œuvre originale, vous ».

En partenariat avec l’Association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh) dans le cadre du festival Handiclap, l’exposition Tactile Tour entend « sensibiliser sur les besoins des personnes aveugles et malvoyantes », selon Martine Routon, présidente du comité de Loire-Atlantique de l’AVH. À l’avenir, elle aimerait aller plus loin. Elle est confiante : « La technologie évolue : on aura de plus en plus la possibilité d’aménager les musées pour les rendre plus inclusifs ».

« Une grande différence de perception »

À l’entrée de l’exposition, les personnes voyantes peuvent prendre un masque pour se bander les yeux et vivre l’expérience des déficients visuels. « On s’aperçoit qu’il y a une grande différence de perception entre nous et les non-voyants », explique Martine, qui confie que c’était la première fois qu’elle entendait parler d’œuvres à toucher.

Pour Raphaëlle Leterrier, programmatrice au passage Sainte-Croix, le pari est réussi. Le Tactile Tour était aussi l’occasion de se former sur l’accessibilité aux déficients visuels : « Maintenant, on sait comment faire des audio descriptions pour les non-voyants. C’est très différent des audio guides ! »

L’exposition gratuite Tactile Tour reste à Nantes jusqu’à samedi, pour ensuite passer deux semaines à Saint-Nazaire, avant de continuer son tour de France à Reims, Grenoble, Versailles, Cherbourg et Rennes.