France

Municipales 2026 : Les insoumis plein d’ambitions rêvent de « faire tomber les socialistes »

N’allez surtout pas croire que La France insoumise n’a que la présidentielle 2027 en tête. A un an des élections municipales, prévues en mars 2026, le parti de Jean-Luc Mélenchon dévoile peu à peu ses ambitions. Les insoumis, qui avaient enjambé le précédent scrutin, entendent cette fois décrocher de nombreuses villes. Au risque de la confrontation avec les autres partis de gauche, et notamment le Parti socialiste, inquiet de l’appétit grandissant des insoumis quelques mois avant l’élection présidentielle 2027.

Aux dernières municipales, en 2020, La France insoumise avait préféré se placer plus en retrait, soutenant çà et là des listes citoyennes, pour mieux anticiper un échec annoncé. « Il n’y a pas de listes LFI aux municipales. Il n’y a en a nulle part. Nous avons décidé autre chose que chacun peut découvrir sans mal s’il n’a pas un QI de journaliste ou de sondeur », écrivait avec entrain Jean-Luc Mélenchon sur son blog quelques mois avant le scrutin. Cinq ans plus tard, la stratégie a changé. Les très bons scores du tribun à la présidentielle 2022 dans de nombreuses communes, ajoutés à ceux de la liste menée par Manon Aubry aux européennes de juin, ont fait évoluer la doctrine.

« Dans les villes où nous avons fait plus de 40 % ou 50 %, il est évident que nous avons des ambitions. Il y a des dizaines de villes dans lesquelles nous allons progresser, et même gagner », assure Paul Vannier, député LFI du Val-d’Oise. Le mouvement ne dirige aujourd’hui qu’une poignée de villes, dont la plus grande est celle de Faches-Thumesnil, dans la banlieue de Lille (18.000 habitants). Et malgré ses 71 députés, il manque d’élus locaux et n’a aucun sénateur.

Tensions avec le PS

« On était un parti jeune en 2020, notre mouvement a grossi et arrive à maturation. On souhaite maintenant s’enraciner et donner à voir ce que peut être une municipalité dirigée par des insoumis », souligne David Guiraud, député LFI du Nord et candidat ambitieux à Roubaix. Pour ses dix ans, le parti de gauche entend s’offrir quelques mairies, et préparer dans le même temps les sénatoriales de septembre 2026, en faisant gonfler le nombre de grands électeurs. « C’est un rendez-vous important dans le développement de notre mouvement. Aujourd’hui, notre ancrage local ne correspond pas à notre force, de premier parti de gauche », ajoute Paul Vannier, en charge des élections au parti.

Mais ces ambitions nouvelles inquiètent les partenaires du fragile Nouveau Front populaire. En premier lieu les socialistes, avec qui les relations sont toujours plus tendues. « L’implantation territoriale n’a jamais été l’obsession des insoumis, mais cette fois leur objectif est clair : faire tomber les socialistes », s’agace Patrick Kanner, président du groupe PS au Sénat. Les insoumis ont ciblé plusieurs villes détenues par le parti à la rose, comme Marseille, Lille, Montpellier, Brest et bien d’autres. « Ils veulent nous affaiblir à un an de la présidentielle pour éviter que l’on taille des croupières à Mélenchon », regrette le sénateur. « Certains élus PS nous en mettent plein la tête en nous accusant d’antisémitisme ou de communautarisme, ça rend compliqué les discussions. On n’a rien à faire avec eux », réplique David Guiraud.

Les socialistes s’inquiètent particulièrement d’une alliance que LFI envisage de nouer avec les écologistes. « Nous proposons des alliances sur un programme de rupture. Cela déplaît à une frange ultra-sectaire du PS, celle qui ne vote pas la censure et visiblement n’aime pas la démocratie », évacue Paul Vannier. Le cadre insoumis confirme la tenue d’une réunion nationale dans les prochains jours avec les responsables d’EELV sur une éventuelle entente.

L’échec de Louis Boyard à Villeneuve-Saint-Georges

Si La France insoumise nourrit de grandes ambitions pour les municipales 2026, l’exemple récent de Villeneuve-Saint-Georges a montré que ravir des villes n’était pas une mince affaire. Le candidat insoumis Louis Boyard, qui s’imaginait élu dès le premier tour de ce scrutin partiel, a été sèchement battu en février dernier par la candidate de droite. Et ce, malgré la forte implication des cadres insoumis dans la campagne, dont Jean-Luc Mélenchon en personne.

« Cela montre qu’on ne peut pas transposer des résultats nationaux à l’échelon local, et que les insoumis ne peuvent gagner seuls. Mais peut-être ambitionnent-ils surtout de faire perdre la gauche pour mieux préparer la présidentielle ? », interroge un cadre communiste. « Les insoumis veulent jouer sur le vote communautaire et l’essentialisation des quartiers pour l’emporter, c’est regrettable. Mais ils ne sont pas en capacité de rassembler », analyse un cadre PS. Au sein de LFI, on préfère retenir de ce cuisant échec la hausse de mobilisation des électeurs de gauche.

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L’exemple de Villeneuve préfigure les tensions qui risquent de fracturer la gauche en mars 2026, dans un contexte bouillonnant de pré-campagne présidentielle. « Tout le monde a compris que ce scrutin aura une dimension particulière », remarque Patrick Kanner. « En mars 2026, la bataille présidentielle sera déjà lancée », abonde Paul Vannier. Voilà au moins un point d’accord entre les deux meilleurs ennemis.