Mort du pape François : A l’extrême droite, des réactions contrastées et de vieilles intox recyclées

Fervent défenseur de l’accueil des migrants ou encore d’une écologie « intégrale », instigateur d’une timide ouverture théologique aux couples divorcés… Le pape François, mort lundi au Vatican, n’avait pas que des admirateurs du côté le plus conservateur de l’échiquier politique. A plusieurs reprises, des figures ou partis d’extrême droite l’ont ouvertement critiqué pour ses prises de position. En 2023, Jordan Bardella, du Rassemblement national, avait par exemple affirmé que ce dernier n’avait « pas conscience du problème de l’immigration », disant lui préférer « la sagesse de son prédécesseur Benoît XVI ».
A l’annonce de la mort du souverain pontife, une partie de l’extrême droite s’en est donc tenue à des hommages sobres, à l’image de Marine Le Pen. « Une figure spirituelle s’éteint, laissant derrière elle un héritage de foi, de paix et de dialogue », a écrit l’ancienne patronne du RN dans un message sur X, adressant ses « pensées pour la communauté catholique endeuillée par la disparition [du pape] ». Jordan Bardella a quant à lui souligné un pontificat « marqué par une attention constante portée aux oubliés et à la dignité des plus fragiles ». Éric Zemmour, polémiste à la tête de Reconquête !, est lui aussi resté dans une certaine sobriété, assurant qu’« aujourd’hui, les polémiques doivent se taire », tout en soulignant que « pour certains catholiques, son pontificat fut une épreuve dans leur foi dans l’Eglise ».
Un pape « woke » pour Philippe de Villiers
Les critiques ont également été parfois plus marquées, à l’image de celles adressées par le très conservateur Philippe de Villiers. Tout en faisant part de sa « tristesse », il a sur Europe 1 blâmé un pape « woke », « des minorités » et « des périphéries » qui a « toisé la France, il lui a montré du mépris à plusieurs reprises ». Julien Odoul, porte-parole du RN, n’a pas non plus mâché ses mots, s’en prenant aux hommages de la gauche et assurant que « les torrents d’éloges funèbres des islamo-gauchistes de LFI en disent long sur le véritable bilan du pape Francois », dans un message sur X.
« Une insulte à la tradition catholique » ?
Les critiques l’égard du pape François se sont aussi appuyées sur des éléments parfois trompeurs, notamment sur les réseaux sociaux. A l’image du message partagé par le référent de Seine-Saint-Denis du parti Les Patriotes, fondé par Florian Philippot. Dans une publication postée sur Facebook et visionnée plus d’un million de fois sur X, il a repartagé une ancienne séquence montrant le pape retirant ses mains à plusieurs reprises lorsque des fidèles tentent de les embrasser, écrivant que ce dernier « avait publiquement humilié les fidèles en refusant qu’ils embrassent l’anneau du pêcheur. Une insulte à la tradition catholique. »
La séquence, filmée en mars 2019, avait déjà beaucoup fait parler à l’époque. Mais comme le relèvent certains internautes sur X, et comme l’expliquait à l’époque La Croix, François ne portait pas l’anneau du pêcheur (insigne que reçoit le pape lors de l’inauguration de son pontificat), mais un autre anneau. La séquence complète montre d’ailleurs que le pape laisse bien certaines personnes embrasser ses mains. Mais cette pratique n’est en réalité plus une obligation du protocole, et n’était pas non plus toujours appliquée par ses prédécesseurs, explique également le quotidien. Un porte-parole du Vatican avait également mis en avant des raisons d’hygiène, notamment « pour éviter la contagion quand il y a de longues files de personnes ».
Une citation de Jean-Paul II qui n’a rien de fiable
Le jour du décès du pape, Jean Messiha s’est quant à lui fendu d’un hommage, non pas à François, mais à Jean-Paul II, « l’avant-dernier vrai pape ». Le porte-parole du parti d’Eric Zemmour Reconquête a publié sur X une longue citation attribuée au pape mort il y a vingt ans, prophétisant l’arrivée « d’une plaie mortelle », qui « se nomme l’islamisme ». « Ils envahiront l’Europe. J’ai vu les hordes venir de l’Occident vers l’Orient, du Maroc à la Libye en passant par l’Égypte, et ainsi de suite jusqu’à la partie orientale », peut-on lire dans la citation. Mais l’origine de cette citation n’a rien de fiable.
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Ces propos attribués à Jean-Paul II ont une seule source : Mauro Longhi, prêtre de l’Opus Dei, cité dans un article du journal italien La Stampa en 2017. Selon lui, c’est en 1992 que Jean-Paul II lui aurait fait part de cette vision qu’il aurait eue pendant la nuit. Mais le principal intéressé est par la suite partiellement revenu sur ses déclarations, exprimant être « attristé par l’utilisation qui a été faite de ses propos », et rapportant une autre anecdote, où le pape aurait cette fois-ci déclaré : « La guerre ne sera pas entre les religions, mais entre les athées et les croyants, entre ceux qui sont sans Dieu et les croyants ». L’authenticité de cette vision est d’autant plus contestée que Jean-Paul II a prôné le dialogue avec l’islam durant son long pontificat.