Mort de Bertrand Blier : Cinq films pour comprendre le réalisateur
Bertrand Blier pourrait-il réaliser certains de ses films aujourd’hui ? Probablement pas… Beau-père (1981) où Patrick Dewaere couche avec sa belle fille de 14 ans qui veut absolument faire l’amour avec lui ou Préparez vos mouchoirs (1978) où Carole Bouquet dépucelle un gamin de 13 ans ne passeraient clairement plus en 2025. Le fils de l’acteur Bernard Blier (Les Tontons flingueurs) s’est fait un prénom en s’affranchissant du « cinéma de papa » dans tous les sens du terme.
Qu’on apprécie ou non son humour et ses provocations, il aura clairement marqué le cinéma français par son sens des dialogues et son don pour la direction d’acteurs. Cinq films importants de sa filmographie démontrent que le sexe n’était pas son unique préoccupation et qu’il pouvait aussi se montrer tendre et subtil pour attirer de grands noms devant sa caméra.
« Les Valseuses »
C’est sans doute le titre qui a le plus marqué la carrière de Bertrand Blier et est associé à jamais au nom du cinéaste. Sorti en 1974, Les Valseuses était un prolongement des évènements de mai 1968, du vent de révolte et de la libération sexuelle de ces années-là. Le duo formé par Gérard Depardieu et Patrick Dewaere ne respecte rien et se tape tout ce qui bouge (Miou-Miou, la très – trop ? – jeune Isabelle Huppert et Brigitte Fossey) sur les routes de France. Ce road-movie libertaire a connu un succès international pour ses répliques cultes ( « On n’est pas bien là, décontractés du gland ») même si, à l’aune du mouvement MeToo, son sujet pose question.
« Buffet froid »
On est en droit de considérer que Buffet froid (1979) est le chef-d’œuvre de Bernard Blier. Beaucoup moins orienté « cul », ce petit bijou d’humour noir surréaliste permet à Bertrand Blier de retrouver son complice Gérard Depardieu et de diriger son père, Bernard Blier, en même temps que Jean Carmet. Les aventures d’un chômeur, d’un flic et d’un assassin tournent à l’absurdité totale autour de Carole Bouquet, ange de la mort d’une intense beauté. Le film n’a pas pris une ride tant il est d’une irrésistible drôlerie.
« Tenue de soirée »
Avec son affiche provocatrice et son slogan « Putain de film ! » qu’on a souvent pris à tort pour un titre, Tenue de soirée (1986) tourne joyeusement au « trouple » entre Miou-Miou, Gérard Depardieu et Michel Blanc qui découvre avec bonheur le sexe entre hommes. Michel Blanc reprenait un rôle que devait jouer Patrick Dewaere mort en 1982. Il a gagné un prix d’interprétation à Cannes pour sa composition d’homme fragile finissant par faire le trottoir en travesti avec ses deux complices. Cette comédie grinçante a connu un énorme succès public.
« Trop belle pour toi »
Gérard Depardieu délaisse son épouse jouée par la sculpturale Carole Bouquet pour tomber dans les bras d’une secrétaire incarnée par Josiane Balasko. Réflexion sur les apparences et la beauté, Trop belle pour toi (1989) offre un rôle poignant à cette dernière. Cette histoire d’amour, qui a reçu un prix du Jury à Cannes et cinq César, est sans doute l’œuvre plus ouvertement sentimentale de son auteur. Elle parle de désir avec une délicatesse inhabituelle chez le cinéaste. Elle offre à Josiane Balasko et Carole Bouquet, bouleversantes, des rôles prouvant que Bertrand Blier pouvait aussi mettre les femmes en valeur.
« Les Acteurs »
Il ne s’agit sans doute pas du film le plus réussi de son auteur mais Les Acteurs (2000) marque par la façon dont Bertrand Blier est parvenu à réunir une pléiade ahurissante d’interprètes. Les plus grands noms –, Alain Delon, Jean-Paul Belmondo, Jean-Pierre Marielle, Claude Brasseur, entre autres – sont entrés dans le jeu du réalisateur. Si la distribution peut sembler un peu datée, elle offre un coup de projecteur très doux sur de grands noms du cinéma français en incluant une séquence iconique et touchante où le cinéaste rend hommage à son père, Bertrand Blier.