France

Marseille : Un administrateur judiciaire jugé pour tentative d’extorsion sur un ex-dirigeant de l’OM

Un administrateur judiciaire a-t-il tenté, avec deux proches du milieu marseillais, d’extorquer un million d’euros à Jean-Pierre Bernès, ex-dirigeant de l’Olympique de Marseille devenu agent de joueurs de foot ? Le tribunal correctionnel de Marseille a commencé à répondre à cette question lundi.

En 2014, Me Michel Gillibert avait été chargé de relancer la procédure visant à faire régler 11 millions d’euros à Jean-Pierre Bernès. Cette somme correspondait aux dommages et intérêts auxquels cet ex-directeur général de l’OM (1988-1993) et d’autres dirigeants – mais pas son ex-président Bernard Tapie – avaient été condamnés, en décembre 1998, dans un dossier d’abus de biens sociaux au préjudice du club phocéen.

Pendant dix-sept ans, les prédécesseurs de Michel Gillibert s’étaient heurtés au refus obstiné de Jean-Pierre Bernès de régler le moindre centime. Pour parvenir à le « faire raquer », selon son expression, l’homme de loi avait tenté une voie détournée, faisant appel à un de ses amis, Simon Fedon, pour approcher Jean-Pierre Bernès. Associé à Richard Laaban, lui aussi considéré comme un proche du milieu marseillais et condamné à plusieurs reprises, leur rôle était de convaincre l’agent de joueurs d’accepter une transaction.

« Ils me disaient que j’avais intérêt à partir très loin »

Selon l’accusation, Jean-Pierre Bernès s’était vu proposer de transiger à hauteur de deux millions d’euros pour solder officiellement sa dette civile, moyennant un dessous-de-table d’un million d’euros. Lors de la sonorisation d’un rendez-vous dans un grand hôtel marseillais, Simon Fedon, aujourd’hui décédé, évoquait la ventilation de ce bakchich : 600.000 euros pour Me Gillibert et 400.000 euros pour ses hommes de main.

L’ex-administrateur judiciaire, 70 ans, aujourd’hui retraité, conteste le moindre arrangement, regrettant d’« avoir fait appel à des Pieds nickelés dans ce dossier ». Il est poursuivi pour complicité de tentative d’extorsion, association de malfaiteurs et violation du secret professionnel.

« Je n’ai jamais demandé, ni même parlé d’argent avec Jean-Pierre Bernès », s’est défendu lundi Richard Laaban, 78 ans, après s’être présenté comme un simple intermédiaire, un petit facteur : « Je n’ai jamais effrayé M. Bernès, je n’ai jamais vu qu’il était inquiet de moi », a insisté l’ex-patron de brasserie et de discothèques alors reconverti en gérant de la boutique de l’OM et agent de joueurs.

Un climat de pressions

Jean-Pierre Bernès, que le tribunal entendra ce mardi, n’a certes jamais évoqué de menaces de mort, mais un climat pesant de pressions : « Ils me disaient que j’avais intérêt à partir très loin si je ne payais pas », avait-il expliqué aux enquêteurs.

Lors d’un tête-à-tête avec Me Gillibert, le 20 avril 2015, Jean-Pierre Bernès avait discrètement enregistré son interlocuteur : « Avec ces gens-là, c’est toujours angoissant, je ne tiens pas à me prendre une balle dans la tête », lui avait lâché celui-ci, sibyllin.

Quelques semaines plus tard, Michel Gillibert avait remis cette procédure sur les voies classiques, avant d’être finalement rattrapé par l’enquête. Trois ans plus tard, en juin 2018, c’est un autre administrateur judiciaire qui allait parvenir à un protocole d’accord, Jean-Pierre Bernès s’engageant finalement à verser 2,3 millions d’euros au mandataire ad hoc. Le procès doit s’achever mercredi.