France

Lyon : 18 ans de prison pour un ex-opérateur du Samu, viols sur mineurs

Un ancien opérateur du Samu et bénévole à la Croix-Rouge, Laurent Moussière, a été condamné jeudi à Lyon à 18 ans de prison pour de multiples viols et agressions sexuelles, la plupart commis sur des mineurs. Lors du procès, l’avocat général, Vincent Auger, avait demandé 20 ans de prison en déclarant qu’il fallait « empêcher de nuire le plus longtemps possible » ce « prédateur sexuel ».


Un « prédateur sexuel ». Un ancien opérateur du Samu et bénévole à la Croix-Rouge, désigné comme un « prédateur » par l’accusation, a été condamné jeudi à Lyon à 18 ans de prison pour plusieurs viols et agressions sexuelles, principalement sur des mineurs. Après deux heures de délibération et près de deux semaines de procès, le président de la cour criminelle du Rhône, Éric Chalbos, a énoncé la liste des victimes de Laurent Moussière, 60 ans, et a prononcé une peine assortie d’une période de sûreté des deux tiers et d’obligations de soins.

Le verdict est légèrement inférieur aux réquisitions : l’avocat général, Vincent Auger, avait demandé 20 ans de prison contre ce « prédateur sexuel », affirmant qu’il fallait « l’empêcher de nuire le plus longtemps possible ». Lors du procès, le magistrat avait reproché à l’accusé de ne montrer aucune émotion.

Avant que la cour ne se retire pour délibérer, Laurent Moussière s’est levé, a retiré ses lunettes et s’est tourné vers l’audience. Lui qui avait jusqu’alors gardé le regard fixé sur les juges s’est adressé aux victimes pour exprimer sa « honte ». « Je vous demande pardon pour les dégâts que j’ai causés, pour les gestes, les actes qui vous ont agressés », a-t-il déclaré. « J’espère que vous pourrez après cela guérir vos blessures ». Laurent Moussière était accusé d’avoir profité de son statut pour se rapprocher de jeunes garçons et d’avoir fait environ quarante victimes à Lyon et dans sa région entre le début des années 1990 et jusqu’à son arrestation à Périgueux en 2021.

Des témoins et des experts ont mis en évidence un modus operandi constant ciblant des victimes au profil similaire : de jeunes adolescents, rencontrés en moyenne entre 13 et 16 ans, souvent « isolés » et « vulnérables », et parfois en manque de soutien familial. Il les attirait chez lui en organisant des fêtes et en leur proposant de l’alcool et du cannabis. Il réussissait à établir des liens de confiance avec ces jeunes en jouant de sa position de bénévole à la Croix-Rouge et d’opérateur du Samu, ayant même brièvement travaillé à la police judiciaire.

« Ami de la famille », « grand frère », cet homme avait suscité la confiance de ses victimes et parfois celle de leurs proches. Le terme « emprise » a été répété tout au long du procès. Une emprise qui n’était « pas intentionnelle », selon son avocat, Me Baptiste Bouillon. Laurent Moussière a adopté un comportement criminel, manifestant « une indifférence au consentement », « mais ce n’est pas la même mécanique qui impose force et violence », a-t-il plaidé. Son confrère de la défense, Me Clément Stievet, a dénoncé, quant à lui, des « défaillances » de la Croix-Rouge, de l’institution judiciaire qui avait été alertée à la fin des années 1990 sur le comportement de M. Moussière, ainsi que de l’entourage de l’accusé et des victimes. L’avocat a avancé qu’il était illusoire de demander à son client de mettre fin de lui-même à ses pulsions.

Ce n’est qu’en 2019 qu’une de ses victimes l’a dénoncé, lors d’une audition par des gendarmes dans le cadre d’une toute autre affaire — il avait été témoin d’une bagarre. L’instruction a ensuite permis de recenser 38 victimes. En raison du temps écoulé, seules 21 ont été retenues par la justice, dont 15 avaient moins de 15 ans au moment des faits. Jeudi, dans l’un des cas, Laurent Moussière a été déclaré non coupable.

« Il est le champion de la prescription », a déploré Me Jean Sannier, conseil de plusieurs parties civiles et de l’association Innocence en danger, lui reprochant également son manque d’empathie jusqu’à la dernière minute : « Rien ne l’émeut, rien ne l’atteint, rien ne l’humanise. » Selon Me Mélissa Masseron, conseil d’une partie civile, « la prédation est innée, instinctive » chez lui. À la barre, les victimes ont défilé pour raconter leurs vies « bousillées », selon l’expression de l’une d’entre elles, partageant pour certaines leurs addictions et leur incapacité à s’attacher.