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Lille : Mais que deviennent les carcasses de vélos abandonnées ?

A Lille, c’est un phénomène mais pas encore une problématique, les épaves de vélos abandonnées aux quatre coins de la ville. Ici, on ne les compte pas encore par centaines, au contraire de Strasbourg, où la municipalité a dû se saisir sérieusement de la question. Néanmoins, Lille a tout de même mis au point une procédure d’enlèvement des carcasses en « état manifeste d’abandon » à laquelle il manque peut-être un volet recyclage.

En septembre 2021, 20 Minutes lançait sur sa page Facebook un appel à témoins pour tenter de retrouver les propriétaires de deux superbes vélos, attachés ensemble au pied de ses bureaux à Lille. Des VTC BTwin quasiment neufs, solidement arrimés à un arceau à l’aide de trois antivols. Depuis, les cadenas ont été découpés et l’un des vélos s’est envolé. Le deuxième, toujours au même endroit, est dans un piteux état, réduit au statut de carcasse abandonnée, comme des dizaines d’autres un peu partout. « Cela fait trois ans que nous avons établi un protocole pour retirer des épaves de la voie publique, un peu sur le même modèle de ce qui peut se faire ailleurs », explique Jacques Richir, adjoint au maire de Lille en charge de l’espace Public, du cadre de vie et des mobilités.

« Quinze jours pour le récupérer avant enlèvement »

Il y a deux cas de figure. Si l’épave est jugée dangereuse pour les piétons, parce que des morceaux contondants dépassent, elle est immédiatement enlevée par les services de la ville sous la supervision de la police municipale. Si la carcasse ne risque de blesser que le regard d’autrui par son côté inesthétique, un délai est laissé au propriétaire : « S’il manque juste une ou plusieurs pièces, une affichette de constat d’abandon est fixée sur le vélo pour prévenir le propriétaire qu’il a quinze jours pour le récupérer avant enlèvement », précise Jacques Richir. Là encore, pour que les choses soient carrées, c’est un fonctionnaire assermenté de la police municipale qui se charge de rédiger le mot doux.

Quand les épaves sont signalées ou dangereuses, les services de la ville laissent 15 jours aux propriétaires pour récupérer leur vélo avant enlèvement.
Quand les épaves sont signalées ou dangereuses, les services de la ville laissent 15 jours aux propriétaires pour récupérer leur vélo avant enlèvement. – M.Libert / 20 Minutes

Et après ? La police n’est pas au taquet et les délais sont souvent supérieurs à deux semaines. Selon la mairie, l’avertissement écrit suffit à convaincre une bonne partie de propriétaires de récupérer les restes de leur bien. Pour les vélos qui restent, c’est direction les objets trouvés ou la déchetterie s’ils sont irrécupérables. « On les garde pendant un an pour des questions juridiques, mais il faut reconnaître que peu de personnes viennent les récupérer », concède l’élu. « Peut-être qu’il faudrait réfléchir à organiser une filière de recyclage de ces vélos, soit pour les remettre en état, soit pour qu’ils servent de banque de pièces », avance Julien Vitse de l’Association pour le droit au vélo (Adav). Une idée que de nombreuses communes ont déjà mis en place, notamment à Suresnes, Paris ou Rennes. A Lille, si ce n’est pas encore institutionnalisé, « on en donne quand même à l’association Lille-Sud insertion », glisse Jacques Richir.

« Sans doute des étudiants »

Tout cela ne nous dit pas qui en arrive à abandonner son vélo, et pourquoi. Pour les deux vélos près de nos bureaux, c’est un mystère. Pour les autres, il existe quelques hypothèses. « Dans la majorité des cas, il s’agit de vélos anciens, sans doute achetés d’occasion peu cher et pour lesquels les propriétaires ne veulent pas ou ne peuvent pas payer les réparations », estime Julien Vitse. « Sans doute des étudiants, renchérit l’élu, puisque la plupart des épaves sont retrouvées près des écoles, des universités ou dans les quartiers avec des logements étudiants. »

Alors certes, il n’y a pas des milliers de carcasses agonisant à Lille, « une centaine sont retirées chaque année », assure l’adjoint au maire. Mais, comme un bouton au milieu du front, ça fait tache. « En termes de visibilité et de communication, ça donne un mauvais signal aux nouveaux utilisateurs du vélo », déplore l’Adav. 

Reste que les enlèvements d’épaves se font sur signalement et que peu de gens se donnent la peine de le faire. Il ne faut pas non plus que ce soit abusif, comme ce fut le cas à Lyon, en octobre 2019, lorsque la ville avait placé en fourrière de nombreux vélos en amont d’une couse à pied.