Les biscuits apéros pour bébé, est-ce vraiment une bonne idée ?

Les amuse-bouche, un nouveau terrain de jeu pour nos bouts de chou ? Les chips, soufflés et autres biscuits pour apéritif destinés aux nourrissons occupent de plus en plus en place dans les rayons et aiguisent l’appétit des marques. France bébé bio, Good Goût, Hero Solo ou encore Blédina ont lancé sur le marché ces snacks pour bébés, à base de farine de blé, de riz et de maïs mélangés à des poudres de légumes ou légumineuses (butternut, tomate, lentilles, carotte, chou frisé). Alors, les apéros pour bébé, une bonne idée ? Réponse avec Sandra Brancato, pédiatre, experte en nutrition de l’enfant et membre de l’Association française de Pédiatrie Ambulatoire (AFPA), qui a lancé le site Mpedia.

« Faire patienter bébé avant le repas »

L’idée derrière ces nouveaux produits de snacking ? « Faire patienter bébé avant le repas », lance Marie-Lou Palous, cheffe de produit sénior Blédina. Et d’expliquer : « Tous les parents savent que c’est parfois un moment compliqué en rentrant du boulot quand bébé s’impatiente et qu’il a faim et que le repas n’est pas encore prêt. »

La marque numéro 1 sur le secteur de l’alimentation pour bébé a ainsi lancé en septembre une gamme composée de trois références (Mes Premiers Soufflés Maïs et Carotte, Mes Premiers Soufflés Carotte/Butternut et Tomate et Crousti à Dévorer Lentilles Corail & Maïs, 1,15 euro le sachet de 20 g). « On a lancé deux recettes pour les bébés dès 10 mois à base de légumes et de céréales et une recette à partir de 15 mois à base de maïs et de lentilles corail », résume la cheffe de produit.

Et d’ajouter : « Quelque chose qui est clé pour tout produit et encore plus sur la gamme des biscuits, c’est de communiquer sur les quantités qui peuvent être consommées, la fréquence et le moment de consommation. C’est quelque chose que l’on indique clairement sur nos produits, parce qu’en effet, il y a un nombre de soufflés à consommer par portion, le moment de consommation que l’on positionne juste avant le repas, que ce soit le déjeuner ou le dîner et la fréquence d’une fois par jour maximum ».

« La communication doit dire que cela doit être de l’ordre de l’exceptionnel, mais pas quelque chose que l’on donne avant le repas pour initier l’enfant à grignoter avant le repas », avertit de son côté la pédiatre.

« Plus safe qu’un biscuit apéro pour adultes »

La composition de ces produits semble plutôt saine. « Le problème n’est pas là, c’est plus dans la symbolique que c’est dérangeant », poursuit Sandra Brancato. Ces biscuits sont sans huile de palme, sans résidus de pesticides ou de métaux lourds, sans sel et adaptés aux besoins des tout-petits (combo de céréales, légumes ou légumineuses et féculents). « On a une réglementation très stricte pour les produits pour bébé, bien plus que celle pour adultes », rappelle Marie-Lou Palous.

« On est d’accord que la qualité et l’exigence des produits bébé en France, c’est bien meilleur que les produits pour adultes. Mais, pour autant, ce n’est pas quelque chose qu’il faut conseiller à prendre de façon systématique avant les repas », insiste la pédiatre.

La consommation de ces produits de snacking doit rester rare, à l’occasion d’un apéro chez des amis par exemple : « Avoir son paquet chez les copains, c’est bien mieux que les deux mains de bébé dans le paquet de chips. Peu d’ingrédients sont autorisés chez les bébés, les colorants sont notamment interdits dans l’alimentation, donc techniquement, vous avez un produit beaucoup plus safe qu’un biscuit apéro pour adultes », concède le docteur Sandra Brancato.

« C’est plus dans la symbolique que c’est dérangeant »

A l’instar des galettes de riz soufflé, ces biscuits soufflés ont cependant un indice glycémique haut et ne remplacent pas les apports nutritionnels d’une vraie portion de légumes. « Les marques disent que c’est pour les besoins nutritionnels de l’enfant, mais que nenni ! Les besoins nutritionnels d’un bébé, c’est de manger des morceaux préparés avec de vrais légumes. Quel besoin ont-ils de fabriquer des pseudo-biscuits apéritifs ? On avait les cigarettes en chocolat et le Champomy, allons-y ! On les prépare », s’agace la pédiatre.

Et d’expliquer « Donner quelque chose avant le repas pour faire patienter bébé, c’est donner des habitudes. Les parents donnent pour l’instant un petit biscuit bébé et ils finiront par aller acheter des Curly, parce que je ne sais pas si vous avez vu le prix mais on tape à plus de 50 euros le kg ! »

« Un produit transformé qui met en scène l’apéro »

Surfant sur la tendance finger food (ou nourriture préparée pour être mangée directement avec les doigts) associée à l’essor de la DME (ou diversification alimentaire menée par l’enfant), ces biscuits sont également censés participer à l’autonomie de bébé, en travaillant à la coordination mains et bouche.

Ils contribuent aussi à l’éveil des sens de bébé : « La variété permet d’élargir la découverte des goûts de bébé sur le plan gustatif, mais aussi les nutriments qu’il va consommer, la texture qu’il va découvrir selon les produits », défend encore la cheffe de produits.

« S’ils sont capables de manger un petit biscuit dans la main, ils sont capables de manger un bâtonnet de légume. C’est beaucoup plus sain. Ce n’est pas un produit transformé qui met déjà en scène ce que sera l’apéro », rétorque la professionnelle de santé.

Concernant ces biscuits apéritifs pour bébé, « c’est un produit qui doit rester une alternative exceptionnelle, mais ce n’est pas quelque chose que l’on doit insérer au quotidien dans l’alimentation de l’enfant », assène encore la pédiatre en conclusion. Bref, les apéros pour bébés, c’est comme pour les adultes, avec modération !