France

« Le président a écouté »… Les porteurs du projet de musée du terrorisme rassurés après son maintien

En décembre, le précédent gouvernement avait enterré le projet de musée-mémorial du terrorisme pour « coupes budgétaires », sans aucune consultation préalable. Un mois plus tard, en pleine commémoration des dix ans des attentats de Charlie Hebdo et de l’Hypercacher, Emmanuel Macron a finalement annoncé le maintien d’un projet qu’il avait lui-même proposé en 2018. Elisabeth Pelsez, directrice générale de la mission de préfiguration du musée-mémorial du terrorisme, nous éclaire sur ce revirement, après son entretien lundi à l’Elysée avec le président.

D’où vient l’idée de ce musée mémorial ?

La genèse du projet date de 2018. Dans un discours prononcé lors de l’hommage national aux victimes du terrorisme, Emmanuel Macron estime que le pays « doit savoir regarder en face les réalités que ça implique et mener un travail mémoriel, scientifique et pédagogique […] ». Le président souhaite alors « qu’un musée mémoriel du terrorisme menant ce travail dans toute son ampleur soit créé. » Il reprend ainsi les préconisations d’un rapport sur le terrorisme remis quelques jours plus tôt au ministère de la Justice. L’année suivante, l’historien Henry Rousso est nommé président de la mission de préfiguration du musée mémorial, puis un groupement d’intérêt public est monté en 2021, avant d’être renouvelé par arrêté en 2023.

Les associations de victimes sont associées au projet. Les futures collections seront composées de « dons de victimes, de témoignages et de scellés judiciaires », a détaillé Henry Rousso lors d’une vidéo de présentation. « Il n’y a pas beaucoup de musées-mémoriaux dans le monde, la France en aura un, comme la Norvège, l’Espagne, le Pérou, les Etats-Unis », se réjouit Elisabeth Pelsez, en rappelant que ces musées internationaux soutiennent l’initiative française.

Pourquoi ce revirement de l’Etat sur le projet ?

Le gouvernement Barnier a annoncé l’abandon début décembre du projet de musée-mémorial, remplacé par un musée hors les murs. Le coût (95 millions d’euros) avait notamment été avancé pour sabrer le projet. Avant, donc, cette volte-face et l’entretien accordé par le président à Elisabeth Pelsez et Henry Rousso. « Il nous a demandé de lui exposer à nouveau le projet et ses avancées. Il a beaucoup écouté et a posé des questions sur le fond », dévoile l’ancienne déléguée interministérielle à l’aide aux victimes.

La décision d’installer le musée-mémorial au Mont-Valérien avait notamment froissé plusieurs fondations de la Résistance qui craignaient « un risque de concurrence des mémoires ». Là encore, le chef de l’Etat a tenu à rassurer les porteurs du projet. « Il a réfuté ce risque en estimant qu’il peut justement y avoir une convergence des mémoires », relaie la magistrate. Le musée-mémorial sera donc construit au Mont-Valérien, dans l’ancienne école de plein air, un bâtiment historique qui doit être rénové.

Les hésitations de l’Etat ont-elles retardé le projet ?

L’ouverture du musée-mémorial est prévue pour 2027. Et les tergiversations de l’Etat ne vont pas bouleverser le calendrier, assure Elisabeth Pelsez. « Le retard sera de quelques mois, ça ne se chiffre pas en année », relativise-t-elle, alors que les travaux devaient initialement débuter en mai 2024. D’ici là, le président devrait consulter les ministres pour évoquer le sujet. « Pour nous, la prochaine étape va être de remobiliser les acteurs du projet. On a aujourd’hui beaucoup plus de certitudes. Le président n’a pas fait une promesse, il a pris un engagement », conclut la magistrate.