France

Le monde de l’immobilier n’en peut plus des « atermoiements » de l’exécutif

C’en est trop pour les professionnels du logement. Face aux « hésitations » du chef de l’Etat, les présidents des principales fédérations patronales de la construction et de l’immobilier (FFB, Pôle Habitat, Fnaim, FPI, Unis) dénoncent le comportement d’Emmanuel Macron dans une lettre ouverte publiée lundi par Le Parisien. Ils exigent un « électrochoc » pour relancer la production de logements neufs. Le point sur leurs revendications.

Quelles sont les raisons de leur colère ?

Censé répondre à aux problématiques de la crise du logement en France, à l’issue de plusieurs mois de concertation avec les acteurs, le volet Logement du Conseil national de la refondation (CNR) devait rendre le 9 mai ses conclusions, très attendues, mais la restitution a été reportée au 5 juin, « en raison d’une contrainte d’agenda » selon le ministère. Un délai qui passe mal.

« C’est l’incompréhension la plus totale. Nous avons planché pendant quatre mois, nous avons été bons élèves. Nous savons que nous ne serons pas entendus », déclare à l’AFP, dépité, Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim). « L’heure n’est plus aux constats, aux atermoiements ni aux hésitations », attaquent les signataires.

Emmanuel Macron n’a pas arrangé les choses. Dans une interview à Challenges publiée le 10 mai, le président de la République a appelé à une nouvelle « conférence des parties » pour répondre à la crise du logement. « On ne peut tout attendre de la réforme gouvernementale », a dit le chef de l’État, fustigeant « un système de surdépenses publiques pour de l’inefficacité collective ».

Quelles sont leurs revendications ?

L’impatience est grande du côté des professionnels. « Quand l’État prendra-t-il la véritable mesure du risque de bombe économique, sociale et sociétale que représente la crise du « pouvoir d’habiter » à laquelle font face nos concitoyens ? », demandent alors les représentants. « Un électrochoc est indispensable : des mesures applicables immédiatement et puissantes sont nécessaires pour éviter que cette crise ne s’accentue encore », écrivent-ils.

« Nous attendons désormais non plus une énième concertation, mais l’expression d’une volonté présidentielle claire et ambitieuse ainsi que des mesures chiffrées, un calendrier de mise en œuvre rapide et des moyens financiers adaptés aux enjeux », répondent les fédérations patronales à Emmanuel Macron.

« Après tout ce qui a été fait, les commissions, colloques, comités, assises, débats… sur le logement, je crois qu’aujourd’hui, tout le monde a donné ce qu’il avait à donner comme propositions, et il faut décider parce que l’urgence est là », peste Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment.

Quelles difficultés rencontrées dans le milieu ?

Le monde du logement dans son ensemble – promoteurs, bailleurs sociaux, associations… – faisait déjà entendre son impatience, face à une situation qui se dégrade sur tous les fronts. Le rythme de la construction de logements neufs a dégringolé ces derniers mois, victime du renchérissement des coûts de construction et des difficultés d’accès au crédit. Et le nombre de ménages en attente d’un logement social n’a jamais été aussi élevé (2,42 millions).

« L’exaspération, en effet, est générale parce que la situation du logement est très mauvaise », affirme Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’habitat, qui représente les bailleurs sociaux. « On a un sentiment d’embolie de l’ensemble de l’accès au logement, et en face, nous n’avons aucune proposition, aucune perspective, aucune réponse. Et ça explique en partie ces réactions », poursuit-elle.

« On ne sait pas pourquoi, aussi bien au ministère du Logement qu’un peu partout, on est d’accord avec nous, mais au niveau du président de la République, ça bloque », rapporte Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), qui voudrait « lui faire comprendre qu’il est dans l’erreur : le logement rapporte. »

Quelle est la réponse du gouvernement ?

« Nous ne découvrons pas les difficultés actuelles et le gouvernement est pleinement mobilisé depuis plusieurs mois », répond le ministre délégué à la Ville et au Logement, Olivier Klein, dans une déclaration transmise à l’AFP. La restitution des propositions du CNR Logement « permettra à la fois de formuler des solutions immédiates » et « des réponses structurelles », ajoute-t-il.