Le ciné d’horreur n’a pas pris de vacances cet été : « Ces films sont comme ces polars qu’on aime lire sur la plage »

Halloween n’a plus le monopole des films fantastiques réussis. Ces derniers se sont multipliés sur les écrans depuis juin dernier. De The Ugly Stepsister d’Emilie Blichfeld, relecture fort gore de Cendrillon à La Nuit des clowns, d’Eli Craig, variation circassienne de tueur en série en passant par le Dracula de Luc Besson, c’est un festival d’horreurs qui fait frissonner en pleine canicule.
« Halloween est une fête anglo-saxonne, explique Gauthier Jurgensen, journaliste au site corporatif Satellifacts. Dans ces pays, le public a pour tradition d’aller voir des films d’horreur durant cette période. Ces derniers sortent chez nous en même temps pour limiter le piratage. » Petit à petit, les Français ont embrassé cette coutume mais, chez nous, l’été semble aujourd’hui plus porteur de succès enrichis à l’hémoglobine.
Eviter le piratage
Cela fait maintenant des années que des blockbusters sortent l’été en parallèle de leur distribution américaine. Un décalage serait catastrophique pour des œuvres souvent disponibles sur des sites de téléchargement illégaux quelques jours après leur apparition sur les écrans américains. Une autre raison justifie la recrudescence de films d’horreur estivaux. « Cette période est celle où les jeunes ont le temps d’aller au cinéma parce qu’ils sont en vacances », insiste Gauthier Jurgensen. Cette démographie de spectateurs est celle que visent, en priorité les films d’horreur. « Ce sont souvent des œuvres qui n’ont pas coûté cher, précise Gilles Penso, journaliste au Point Pop et à Mad Movies. On ne prend pas de risque énorme en les sortant en été ».
Exception notoire en 2025, le Dracula de Luc Besson, production luxueuse revisitant le mythe du vampire, est le parent riche de la famille du fantastique cinématographique. Ses 45 millions d’euros de budget en font le film français le plus cher de 2025. Il est difficile d’évaluer si les plus de 500.000 spectateurs et les ventes à l’étranger ont suffi à le rendre rentable.
Un ciné sans prise de tête
Il semblerait que les distributeurs se soient donné le mot pour sortir un film par semaine : de quoi satisfaire la demande sans encombrer les écrans en donnant sa chance à chaque film. Majors comme Sony pour Souviens-toi… l’été dernier ou compagnies indépendantes comme pour Together de Metropolitan FilmExport ont fait le même choix estival pour lancer leurs œuvres. « En été, le public n’a pas forcément envie de voir des films d’auteur, il souhaite se distraire ce qui explique la multiplication de films animation, d’actions et de comédies destinés aux familles », précise Gauthier Jurgensen. L’horreur entre dans cette dynamique de « cinéma de genre » divertissant sans se prendre la tête mais touchant un public un peu plus âgé ». Le jubilatoire Dangerous Animals de Sean Byrne correspond d’autant mieux à cette description que ses requins évoquent les vacances de touristes malchanceux. Tout ce qu’il faut pour se projeter dans l’action sans courir le moindre danger.
Et c’est là qu’intervient, l’élément de surprise de longs métrages qui avancent masqués. Loin d’être uniquement des « slashers » décérébrés comme Souviens-toi… l’été dernier, certains longs métrages se révèlent sérieux voire tragiques en abordant des thèmes aussi dramatiques que le deuil, la disparition d’enfants ou la crise d’un couple trop fusionnel. « Together part d’un postulat romantique pour tourner au « body horror » façon David Cronenberg », détaille Gilles Penso. Certains spectateurs ont dû être plutôt surpris par l’intensité graphique de l’ensemble. Il en est de même pour Substitution de Michael et Danny Philippou et le grand succès américain Evanouis de Zach Cregger. « Ces films sont comme ces polars qu’on aime à lire sur la plage, soutient Gillles Penso. Evanouis correspond tout à fait à cela. Le film est haletant à souhait et fait penser aux livres de Stephen King tant il tient en haleine ».
Une tendance qui se poursuit en septembre
On est loin des triomphes des années 1990 comme Scream de Wes Craven sorti en juillet 1997 et ses plus de deux millions de spectateurs. « Il y avait sans doute alors un élément de nouveauté », déclare Gilles Penso. Entre réalisateurs inconnus du grand public et sagas éprouvées, les films d’horreur se font benoîtement leur place dans le paysage des salles estivales. La sortie de Conjuring, l’heure du jugement de Michael Chaves devrait poursuivre cette tendance le 10 septembre. Les franchises partent toujours avec l’avantage que le public est en terrain connu mais la rentrée sera une redoutable concurrente pour ce quatrième volet des aventures d’Ed et Lorraine Warren.

