Laure Miller propose une loi pour interdire les réseaux sociaux aux moins de 15 ans.
L’Assemblée nationale a reçu mercredi une proposition de loi incluant plusieurs mesures issues du rapport de la commission d’enquête sur TikTok, défendue par Laure Miller, et qui pourrait être examinée début 2026. La commission d’enquête a constaté que l’accès aux réseaux sociaux avant 15 ans représente un désastre sanitaire, avec des implications sur la santé physique, le sommeil et la santé mentale des jeunes.

Fini les enfants sur les réseaux sociaux. Une interdiction d’accès avant 15 ans, un couvre-feu numérique et la création d’un délit de négligence sont parmi les mesures proposées par le rapport de la commission d’enquête sur TikTok, désormais inscrites dans une proposition de loi déposée mercredi à l’Assemblée nationale. Le projet, dont la rapporteuse est Laure Miller, pourrait être examiné début 2026. La députée Renaissance de la Marne précise les contours de cette future loi.
**Quels sont les principaux constats de la commission d’enquête qui vous ont paru les plus alarmants, et que vous avez voulu inclure ?**
La commission d’enquête visait à explorer les réseaux sociaux afin de comprendre leur impact sur la santé mentale des mineurs. Nous avons examiné la manière dont certaines vidéos maintiennent les utilisateurs très longtemps sur la plateforme. Pour les jeunes, cela affecte la santé physique, le sommeil, la concentration et la santé mentale, car les algorithmes promeuvent des contenus radicaux et nuisibles.
Une mesure urgente est nécessaire : l’interdiction d’accès aux réseaux sociaux avant 15 ans, car nous faisons face à un désastre sanitaire. Il est impératif de ne pas attendre des années supplémentaires pour obtenir une régulation satisfaisante et de protéger les jeunes dès maintenant.
**Pourquoi 15 ans ?**
C’est l’âge recommandé par de nombreux professionnels de santé. Il coïncide avec l’entrée au lycée et la majorité sexuelle, ce qui signifie qu’à cet âge, les jeunes sont davantage en mesure de faire des choix éclairés. Plusieurs pays qui ont une avance sur nous ont également choisi un âge similaire. J’estime que c’est une option socialement acceptable : si j’avais proposé 18 ans, je doute que beaucoup m’auraient suivi.
**Pourquoi présenter ce projet maintenant ?**
Le calendrier européen est en notre faveur : en juillet, la Commission européenne a déclaré que nous pouvions légiférer sur les restrictions d’accès aux réseaux sociaux. Le Danemark, parmi les cinq pays à l’avant-garde du sujet, a déjà voté sa loi. La Commission met à notre disposition, à titre expérimental, un logiciel de vérification d’âge dès le premier semestre 2026.
**Ne serait-ce pas plus simple de réguler les contenus plutôt que d’interdire les réseaux sociaux ?**
Il est évident qu’il faut aborder cette question en matière de régulation, convaincre ces plateformes et s’assurer qu’elles adhèrent davantage à nos valeurs. Cela se travaille à l’échelle de l’Union Européenne, mais cela prend du temps.
**Dans cette proposition de loi, qu’est-ce qui est considéré comme un réseau social ?**
J’inclurais YouTube, par exemple, car elle présente les caractéristiques du défilement infini de vidéos. Cependant, je suis consciente que de nombreux jeunes et même des enseignants l’utilisent pour des contenus éducatifs. Pour l’instant, je n’ai pas inclus WhatsApp et les messageries, qui sont des outils utilisés par les jeunes pour leurs activités quotidiennes, et les en couper aurait des répercussions sur leur vie.
**Et le jeu vidéo en ligne ?**
Je préfère ne pas les inclure a priori, car dans le jeu vidéo, il n’y a pas cette passivité que l’on retrouve sur d’autres réseaux sociaux.
**On a vu, avec la réglementation des sites pornographiques, beaucoup de moyens de contourner la vérification d’âge. Vous ne pensez pas qu’il y aura également des failles ?**
Je ne considère pas que cela doit être un obstacle à l’action. Je fais confiance aux nouvelles technologies en développement, il existe de nombreuses startups, y compris françaises, qui travaillent sur ces problématiques.
**Comment garantir que les données personnelles des utilisateurs, notamment des mineurs, soient protégées ?**
Les logiciels devront être validés par un cadre établi par l’Arcom, ce qui empêchera les plateformes de choisir n’importe lequel. Celui proposé par la Commission européenne repose sur un système de double anonymat. L’Australie, qui a voté une interdiction d’accès aux réseaux sociaux pour les moins de 16 ans, va bientôt mettre en œuvre des solutions expérimentées, dont certaines par des startups françaises. Je suis donc confiante quant à notre capacité à trouver des solutions.
**On parle de problèmes de sommeil, de suicide, de troubles de l’apprentissage, de sociabilisation… Ne met-on pas tout cela sur le dos des réseaux sociaux ?**
Limiter la discussion à l’interdiction des réseaux sociaux n’est pas une solution attrayante pour la jeunesse, et ne saurait constituer une politique publique. Il est évident qu’un malaise existe chez les jeunes. Les pédopsychiatres affirment eux-mêmes qu’il n’est pas juste d’imputer tous les maux aux réseaux sociaux. Néanmoins, ils soulignent qu’une personne en détresse a tendance à se tourner vers ces plateformes, ce qui ne fait qu’aggraver la situation.

