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« La Chambre d’à côté » : Pedro Almodóvar, l’homme qui aime les actrices et vice-versa

Pedro Almodóvar fait partie des cinéastes qui donnent envie d’être comédienne même si on n’a pas le moindre talent pour cela ! Sa façon de filmer les actrices témoigne de tant d’amour, voire de vénération, qu’on aimerait être devant sa caméra comme Julianne Moore et Tilda Swinton dans La Chambre d’à côté. Elles sont tout simplement merveilleuses dans ce film récompensé par le Lion d’or de la Mostra de Venise en septembre dernier.

Pour son premier long métrage en langue anglaise, le réalisateur parle d’amitié féminine. Une femme qui va mourir et une autre qui va la soutenir sont les héroïnes de cette œuvre sur la fin d’une vie débordant de vitalité au cœur même de l’agonie. « Pour raconter cette histoire, le genre le plus proche aurait été le mélodrame, mais j’ai essayé de faire un film tout en retenue en évitant le mélodrame », confie-t-il.

Femmes, femmes, femmes

Tilda Swinton et Julianne Moore émeuvent au plus profond. L’une, atteinte d’un cancer en phase terminale, parle. L’autre écoute intensément. Toutes deux confirment que le réalisateur n’a pas son pareil pour mettre en avant les femmes dans leurs forces mais aussi leurs faiblesses et leur complicité pendant les moments décisifs de leur existence. Ce nouveau duo féminin vient rejoindre une belle pléiade de stars que le cinéaste a rendues vibrantes et vivantes qu’elles soient « au bord de la crise de nerfs » ou en « talons aiguilles ». Mères ou amantes, elles habitent sa filmographie avec autant de charme que de personnalité.

Marisa Paredes, Penélope Cruz, Carmen Maura, Victoria Abril ou Rossy de Palma ont vu leur image sublimée par les soins du cinéaste. « Je tente de montrer la meilleure version des comédiennes avec lesquelles je travaille, disait-il à 20 Minutes il y a quelques années. C’est peut-être pour cela qu’elles déclarent aimer tourner avec moi. Elles sentent la passion que je ressens à leur égard ». Cette flamme brûle plus que jamais dans La Chambre d’à-côté.

Où sont les femmes ?

Il y retrouve Tilda Swinton qu’il avait déjà dirigée dans La Voix humaine d’après Jean Cocteau et y met en scène pour la première fois Julianne Moore pour leur faire vivre ensemble ce qu’il appelle « un amour sans les inconvénients de l’amour ». Traquant la moindre de leurs expressions, il les met à nu psychologiquement et les rend puissamment belles à chaque instant. Surtout quand la femme mourante demande à son amie de lui donner une ultime preuve d’attachement, la plus forte qui se puisse réclamer.

« Diriger mes interprètes est un bonheur constant, avoue le réalisateur. Les voir s’emparer du rôle, le modeler pour finalement se l’approprier a quelque chose de magique ». L’alchimie entre les deux actrices emporte le spectateur au cœur de l’émotion. Leurs visages marquent durablement comme si Pedro Almodóvar avait capturé leur essence pour nous la restituer avec une intense pureté. On sort de la salle avec l’impression d’avoir assisté à un petit miracle devant leurs performances entrecroisées.