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JO de Paris 2024 : Budget, transports, sécurité… Le chantier reste colossal à 500 jours du début des Jeux olympiques

Dans 500 jours, on sera le 26 juillet 2024, date du début des Jeux olympiques de Paris. La France accueillera les JO d’été pour la première fois depuis 100 ans, avec des défis autrement plus colossaux qu’en 1924. L’aimable compétition ressuscitée par Pierre de Coubertin à la fin du XIXe siècle est devenue une énorme machine qui fait toujours rêver les athlètes, mais trouble les nuits des organisateurs, pouvoirs publics en tête. Ce mardi, Emmanuel Macron organise d’ailleurs un déjeuner à l’Elysée, avec entre autres Tony Estanguet, patron du comité d’organisation (Cojo), et les responsables d’entreprises partenaires.

Où en est-on des infrastructures et du budget ?

Des ouvriers qui posent encore des câbles ou tentent de réparer quelques malfaçons alors que le tournoi démarre. C’est un classique des grandes épreuves sportives, et on ne voit pas pourquoi « nos » Jeux olympiques y échapperaient. Ce mardi sur France Inter, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a toutefois assuré que tout serait prêt « entre décembre 2023 et le printemps » 2024, « pour permettre ensuite au Cojo de prendre possession de ces lieux ».

Tony Estanguet s’est voulu optimiste dans Ouest France : « On est dans les temps. Que ce soit pour le village des athlètes, que j’ai visité la semaine dernière, avec des logements conçus de manière exemplaire et innovante. Le Centre aquatique olympique respecte aussi les délais. »

Pour le respect des finances, c’est autre chose en revanche. Courant décembre, le Cojo a (encore) acté une augmentation de 10 % de son budget, qui chiffre actuellement 4,4 milliards d’euros. En cause, l’inflation bien sûr, mais aussi des coûts initialement sous-évalués, en matière de masse salariale et de sécurité notamment. « Notre modèle s’appuie à 96 % sur de l’argent privé et les partenaires financent pour plus d’un tiers le budget du Cojo », indique Estanguet.

Au total, le budget des Jeux 2024 devrait s’élever à 8,8 milliards d’euros. L’estimation était « seulement » de 6,6 milliards en 2017. Là aussi, l’augmentation de la douloureuse est un grand classique de l’histoire des Jeux et ce n’est pas terminé. En janvier, la Cour des comptes indiquait qu’une partie des dépenses et du coût pour les finances publiques « ne sera connue qu’après l’événement ».

Quelle logistique pour 10 millions de spectateurs ?

Même si Lille, Châteauroux ou Tahiti, entre autres, recueilleront quelques miettes, l’immense majorité des épreuves se déroulera à Paris et dans sa couronne, essentiellement la Seine-Saint-Denis.

Sept millions de personnes sont attendues pendant les Jeux (26 juillet – 11 août). « C’est comme si on avait 50 matchs par jour pendant deux semaines ». Dimanche devant la presse, Laurent Probst a imagé efficacement le défi qui attend Ile-de-France Mobilités (IDFM), l’autorité organisatrice des transports de la région capitale dont il est le directeur général. Pour les Jeux paralympiques (28 août – 8 septembre), quelque trois millions de spectateurs devraient être présents, ce qui semble plus gérable a priori, sauf que l’on se trouvera alors en période de rentrée.

Les chiffres donnent le tournis : les JO pourront rassembler jusqu’à 500.000 personnes par jour, et ce total n’inclut pas le cyclisme ou le marathon, qui appâteront un nombre considérable de curieuses et de curieux amassés le long des parcours. Forcément, les transports en commun vont devoir suivre, puisque les voitures seront « machina non grata ».

Des transports à la hauteur, mission impossible ?

Les usagers de la RATP ne vivent pas actuellement la meilleure « expérience voyageurs » de leur vie, pour reprendre le langage LinkedIn. Et on ne parle pas ici des grèves, mais plutôt des rames régulièrement bondées qui donnent un petit côté bétaillère aux lignes les plus fréquentées. On peut donc légitimement écarquiller les yeux à l’idée du chantier à venir. « Il va falloir qu’on arrive à acheminer 800.000 personnes quotidiennement : 600.000 spectateurs et 200.000 accrédités », a indiqué la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra sur France Inter.

Promis, ça turbine : la ligne 14, qui doit être prolongée au nord jusqu’à Saint-Denis Pleyel près du village olympique et au sud jusqu’à l’aéroport d’Orly, « sera prête dans les temps, au printemps 2024 », assure AOC. Pour gérer les flux, il s’agira d’augmenter « la fréquence des trains et les bus de 15 % sur l’ensemble des lignes qui desservent les sites », développe la ministre. « On a des plans de recrutement en cours ».

Jean Castex, désormais à la tête de la RATP, doit viser plus de 6.000 embauches alors qu’il gère actuellement surtout la pénurie de personnel. « Nous allons tout faire pour être au rendez-vous », assure l’ancien Premier ministre. On a connu des discours plus volontaristes, alors que l’ex-locataire de Matignon doit aussi composer avec un climat social qui pourrait être encore assombri par l’ouverture à la concurrence du réseau d’autobus actuellement exploité en monopole par la RATP, six mois après les JO.

De là à envisager un report de cette mesure pour apaiser les tensions, il y a un pas que Clément Beaune, ministre des Transports qui discute sec avec Valérie Pécresse, la présidente de la région Ile-de-France, pourrait franchir.

Quelle sécurité après le fiasco du Stade de France ?

Des transports à la ramasse, des policiers et stadiers dépassés, des délinquants à la fête… Si la finale de la dernière Ligue des champions entre le Real Madrid et Liverpool, en le 28 mai dernier, se voulait une répétition des JO, autant refiler dès à présent la flamme olympique à Los Angeles, hôte de l’événement en 2028. Car même 10 saisons supplémentaires d’Emily in Paris ne suffiraient pas à redorer l’image de notre beau pays. Et on n’oublie pas non plus la menace terroriste.

Pendant les Jeux, Laurent Probst le directeur général d’Ile-de-France Mobilités annonce des pics à 1.000 personnes par minute. « Pendant plusieurs heures, c’est assez inédit à gérer », ajoute-t-il. Mais les regards se tournent aussi, ou surtout, sur la cérémonie d’ouverture avec les délégations défilant dans une centaine de bateaux sur la Seine, qui se veut aussi inédite que grandiose et difficile à sécuriser.

Tony Estanguet, président du comité d'organisation des Jeux olympiques (Cojo) de Paris 2024 présente la cérémonie d'ouverture programmée sur la Seine lors d'une conférence de presse, le 13 décembre 2021.
Tony Estanguet, président du comité d’organisation des Jeux olympiques (Cojo) de Paris 2024 présente la cérémonie d’ouverture programmée sur la Seine lors d’une conférence de presse, le 13 décembre 2021. – Alain Jocard / AFP

Pour l’heure, 600.000 spectateurs, dont 100.000 payants, sont annoncés, répartis selon un dispositif qui ferait passer le théorème de Fermat pour une addition de CE2. Mais cette affluence pourrait finalement être limitée à 500.000, voire moins. « On est encore à 500 jours, il reste du temps pour affiner ces jauges, et l’organisation logistique de cette cérémonie d’ouverture », a déclaré Estanguet à l’AFP.

Plus généralement, les autorités veulent sortir l’artillerie lourde pour que les Jeux se déroulent sans trop d’accrocs. « On a une très forte mobilisation des forces de sécurité intérieure, 45.000 quotidiennement, 30.000 pour la cérémonie d’ouverture », a détaillé Amélie Oudéa-Castéra sur France Inter, avec « au pic 20.000 à 22.000 agents de sécurité privée ». Reste aussi à recruter et à former lesdits agents de sécurité…

Où en est-on de la billetterie ?

La première phase de ventes de billets par packs a suscité une énorme grogne, symbolisée par les fameuses places à 24 euros vantées par le Cojo, mais aussi difficiles à repérer qu’un desman dans une rivière pyrénéenne. En revanche, les tickets à 690 euros, parfois pour de simples éliminatoires en athlétisme au Stade de France, ne sont pas passés inaperçus. Malgré des tarifs souvent exorbitants, 3,25 millions de places sont déjà parties, selon l’organisation.

La deuxième phase, à l’unité cette fois, va débuter ce mercredi, avec un nouveau tirage au sort pour écouler 1,5 million de billets. « Il n’y en aura pas pour tout le monde et je m’attends à ce que cette deuxième phase continue de générer des déceptions et des frustrations, reconnaît Estanguet. C’est inévitable, mais elle va encore une fois faire des heureux et il faut tenter sa chance. »

Le patron du Cojo s’attendait à pareils remous : « On savait que la demande était telle qu’elle ne pourrait pas « matcher » avec l’offre. Il y a beaucoup plus de gens intéressés que de billets disponibles même si on a 13 millions de billets [en incluant les Jeux paralympiques]. » Les recettes de billetterie prévues doivent rapporter près de 1,4 milliard d’euros, soit près du tiers du budget du Comité d’organisation des JO (Cojo). Alors oui, c’est souvent cher, mais pensez au prestige de la France au moment de casser votre PEL pour une épreuve d’haltérophilie, et ça passera tout de suite mieux.