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Investiture de Donald Trump : Immigration, grâces, transgenres… Que peut vraiment faire le président américain ?

La tempête Donald Trump se rapproche du sol américain et va frapper Washington à 18 heures (heure de Paris) ce lundi. « A partir de demain j’agirai à une vitesse et avec une force sans précédent pour résoudre chaque crise à laquelle notre pays est confronté », a promis dimanche le 47e président américain.

Dès le jour de son investiture, le républicain de retour à la Maison-Blanche entend signer « un déluge de décrets » présidentiels notamment sur ses thématiques favorites, l’immigration en tête, mais aussi le pardon des émeutiers du Capitole ou le « wokisme ». Jusqu’où peut-il réellement aller en se passant de la Chambre des représentants et du Sénat ?

La Constitution, garante du droit du sol

« Dès que j’aurai prêté serment, je lancerai le plus grand programme d’expulsions de l’histoire américaine », s’est engagé Donald Trump pendant sa campagne. Cela représente environ 11 millions de personnes selon les estimations relayées par l’AFP. Concrètement, il sera compliqué de passer par des décrets présidentiels pour mettre en œuvre sa politique. « Il peut réorganiser les services de l’État pour accélérer les expulsions d’immigrés sans papiers, mais dans le cadre des lois qui existent déjà », précise alors Corentin Sellin professeur agrégé d’histoire spécialiste des États-Unis, chroniqueur pour le site les Jours.fr à France Info. Donald Trump se confrontera par ailleurs au mur économique car l’agence chargée de ces expulsions « a besoin d’argent et pour l’instant son budget est tout à fait limité », souligne encore le spécialiste.

Le président élu veut aussi, dès le premier jour, mettre fin au droit du sol, qu’il juge « ridicule ». Là encore, il risque de se confronter à la dure réalité de l’Etat de droit. « Toutes les personnes nées ou naturalisées aux États-Unis et soumises à leur juridiction sont citoyennes des États-Unis et de l’État dans lequel elles résident », stipule ainsi le 14e amendement de la Constitution qui garantit ainsi le droit du sol. Tout décret sur la question s’exposerait à des recours en justice.

Une solution : amender la Constitution, mais cette démarche ne pourra se faire en un jour. Le milliardaire devra convaincre la majorité dans chacune des deux chambres du Congrès de la nécessité d’une telle mesure. Puis, le nouveau texte devra être ratifié par au moins 38 des 50 Etats américains, explique Slate. Ça ne sera pas demain la veille. En revanche, les experts s’attendent à ce que Donald Trump supprime une application utilisée par les demandeurs d’asile, ou un programme spécifiquement conçu pour les migrants en provenance de Haïti, de Cuba, du Nicaragua et du Venezuela.

La grâce des assaillants du Capitole, jusqu’où ?

Le 6 janvier 2021, une foule de partisans de Donald Trump a pris d’assaut le Capitole pour empêcher la certification de la victoire de Joe Biden, et près de 1.270 personnes ont été condamnées. Le président américain répète depuis longtemps qu’il pourrait décider d’en gracier et, dimanche, il a assuré à ses partisans qu’ils seraient « très heureux » de la décision qu’il prendra en la matière dès le lendemain.

Juridiquement, Donald Trump a les mains libres sur cette question. Joe Biden avait d’ailleurs usé de ce pouvoir avant de rendre les clefs de la Maison-Blanche en commuant la peine de 37 condamnés à mort le 23 décembre dernier. Ce n’est donc pas au mur juridique mais à un dilemme politique que cette promesse risque de se heurter. Donald Trump peut-il, politiquement, gracier le millier de personnes « ou simplement ceux qui n’ont pas fait de violences contre la police ? », s’interroge Corentin Sellin. « Car il ne faut pas qu’il contrarie son électorat », ajoute-t-il.

Exclure les personnes trans, entre lois et subventions

Sa bataille contre les « idéologies « wokes » de la gauche radicale » se traduit par la volonté de mettre fin au « délire transgenre », « d’un simple trait de plume » et « dès le premier jour ». Donald Trump entend ainsi exclure les personnes transgenres du paysage public, à commencer par l’armée et l’école. Dans le cadre de l’armée, il avait déjà interdit le recrutement des personnes trans lors de son premier mandat, une interdiction qu’a fait sauter l’administration démocrate de Joe Biden.

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Pour aller plus loin, et exclure les recrues, Donald Trump ne pourra pas se contenter d’un décret et devra faire voter une loi pour faire modifier le titre VII du Civil Rights Act de 1964. « Il faudrait justifier que cette catégorie de personnes pose des problèmes liés à l’armée. […] Mais ils peuvent encore s’en sortir en disant que c’est une question de sécurité nationale », expliquait à 20 Minutes la maîtresse de conférences à l’université de Bourgogne, spécialiste de droit constitutionnel, français et étasunien, Margaux Bouaziz en décembre dernier.

Concernant l’école, le président pourrait activer le levier des fonds alloués aux établissements d’enseignement qu’il considère comme « woke » et qui enseignent « la théorie critique de la race, le délire transgenre et autres contenus sexuels ou politiques inappropriés aux enfants ». « Mais pour sucrer les financements des écoles qui ont des programmes à l’endroit des personnes trans, il faudra qu’ils trouvent une qualification juridique », nuance Margaux Bouaziz. Le changement, c’est peut-être pas pour maintenant.