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Guerre en Ukraine : Pourquoi Vladimir Poutine veut-il une « zone tampon » à la frontière russe ?

Une nouvelle offensive se prépare dans les rangs de l’armée russe. Vladimir Poutine a fixé l’objectif de mettre en place une zone tampon à sa frontière avec l’Ukraine. Des déclarations jugées « agressives » par le chef de la diplomatie ukrainienne au moment où « des efforts sont activement déployés pour parvenir à un cessez-le-feu total et durable ».

Mais ça sert à quoi, une zone tampon ? Qu’est-ce que ça implique ? Quel est l’objectif du Kremlin ? Réponses avec Michel Goya, ancien colonel des troupes de marine, historien, stratégiste et auteur de L’ours et le renard – Entretiens sur la guerre en Ukraine (Perrin).

A quoi sert une zone tampon ?

En Ukraine comme dans d’autres conflits, une zone tampon est « une zone de protection que l’on met en avant pour éviter que son territoire soit attaqué », explique Michel Goya. C’est notamment ce qui a été mis en place par l’armée israélienne autour de la bande de Gaza, ou en Syrie dans la région du Golan.

Ici, la Russie veut se protéger de toute nouvelle incursion territoriale comme celle qui avait abouti à l’occupation de la région de Koursk pendant un an, en mettant « le long de sa frontière une zone, côté ukrainien, vide de troupes ukrainiennes et occupée par des troupes russes », développe l’historien. Si Vladimir Poutine n’a pas précisé l’étendue de la zone tampon, elle « n’a de sens que si elle est mise en place tout au long de la frontière », précise Michel Goya.

Qu’est-ce que ça changerait dans le conflit russo-ukrainien ?

Ce n’est pas une idée sortie du chapeau du chef du Kremlin. Car cette idée de zone tampon est dans les tiroirs depuis plusieurs mois et fait partie des exigences de la Russie pour d’éventuelles négociations. Moscou « a en effet pris conscience que la Russie pouvait être attaquée au sol ou dans les airs avec des drones ».

Ce projet de zone tampon en territoire ukrainien pourrait servir à justifier une attaque russe dans la zone de Soumy et de Kharkiv, et surtout « exercer une pression supplémentaire sur l’armée ukrainienne en l’obligeant à maintenir des forces dans cette région et délaisser un peu plus le Donbass », analyse Michel Goya.

La Russie a-t-elle les moyens de ses ambitions ?

Moscou a deux options pour constituer cette zone tampon : par la négociation, « en obtenant que les forces ukrainiennes se retirent sans même que des troupes russes ne pénètrent dans le secteur. On parle alors d’une zone démilitarisée le long de la frontière », pose Michel Goya. Une hypothèse peu probable.

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L’autre choix, « c’est la conquête par les armes en pénétrant sur le sol ukrainien le long de la frontière », poursuit l’historien, et donc « une nouvelle offensive ». L’armée russe en a-t-elle les moyens ? « Elle peut essayer, elle a encore des unités dans la région de Koursk », note Michel Goya. Leur tentative du côté de Kharkiv avait néanmoins à peine abouti. « Le plus probable est que ça débouche sur plein de petits combats », sans réussir à créer une réelle poche en territoire ukrainien, estime le spécialiste. D’autant que sans cessez-le-feu, il faudra tenir la zone face à l’ennemi.