France

Grève des éboueurs : Est-il légal de remplacer les grévistes ?

Depuis une semaine les éboueurs parisiens font grève. Selon les quartiers que vous fréquentez, vous n’avez pas pu rater les montagnes de sacs-poubelle qui jonchent les trottoirs, bloquent les entrées, et débordent même parfois sur les routes. La Mairie de Paris et le gouvernement se renvoient la balle pour mettre fin à ce fléau.

Dès mardi, le maire du 17e arrondissement Geoffrey Boulard, avait révélé que la Mairie de Paris « avait signé un contrat avec un prestataire privé pour collecter des déchets, la nuit, dans certains arrondissements de Paris impactés par la grève des éboueurs ». Des propos confirmés par la Ville de Paris le 14 mars sur son compte Twitter.

« Remplacer des grévistes par des entreprises extérieures, c’est illégal. Il faut faire attention avec la loi », a affirmé Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, à l’antenne de BFMTV. Qu’en est-il vraiment ? 20 Minutes fait le point.

FAKE OFF

C’est écrit noir sur blanc dans le Code du travail, article L1242-6 : « Il est interdit de conclure un contrat de travail à durée déterminée (CDD) pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu à la suite d’un conflit collectif de travail. » Même règle avec les intérimaires. En revanche, une entreprise peut tout à fait réorganiser les services et répartir les tâches.

En raison de cette interdiction, l’employeur ne peut ni recruter des travailleurs temporaires pour remplacer les grévistes ni confier le travail des grévistes aux travailleurs temporaires déjà en poste dans l’entreprise.

L’employeur qui ne respecte pas cette interdiction s’expose à une requalification du contrat CDD en contrat CDI et à une amende lourde. Le salarié temporaire aura alors droit à une indemnité d’au moins un mois de salaire, et il sera considéré comme travaillant en contrat CDI.

La sous-traitance est autorisée

Toutefois, des bénévoles peuvent tout à fait remplacer ces grévistes. Et il est tout à fait possible pour l’employeur d’avoir recours à une autre entreprise. Soit l’entreprise sollicitée intervient directement au sein de l’entreprise en grève en envoyant ses propres salariés. Il s’agira dans ce cas d’une sous-traitance et non d’un prêt de main-d’œuvre interdit par la loi. Soit l’entreprise sollicitée réalise elle-même la production dans ses propres locaux. Cette entreprise ne pourra en revanche pas recourir à du personnel intérimaire pour ce travail.

La Cour de cassation a statué à plusieurs reprises en ce sens. En février 2019, il a été ainsi jugé dans un conflit touchant le secteur des transports routiers, que la grève des chauffeurs n’interdisait pas à l’employeur d’user et de disposer de ses véhicules et de recourir à d’autres entreprises de transports.

En ce qui concerne la réquisition des grévistes dont il est question depuis le 15 mars, seul le préfet peut en donner l’ordre. La situation est donc parfaitement légale, puisque c’est le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, sur ordre du ministre de l’intérieur, qui a informé de sa décision de réquisitionner des éboueurs. Dès mardi soir, Gérald Darmanin avait prévenu que si la maire PS de Paris refusait de procéder elle-même aux réquisitions, l’État le ferait pour des raisons de salubrité publique.