France : Le nombre de naissances n’a pas été aussi bas depuis la Seconde Guerre mondiale
Un nouveau record. Après un décrochage marqué en 2023, le nombre de naissances en France recule encore sur les neuf premiers mois de l’année 2024, confirme l’Insee ce vendredi. Entre janvier et septembre, il a baissé de 2,7 % par rapport à la même période l’année précédente.
Cette baisse ralentit mais elle intervient après un fort décrochage en 2023. Le nombre de naissances s’est replié cette année-là de 6,6 %, passant sous la barre symbolique des 700.000 pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Selon l’Insee, 677.800 bébés sont nés en France en 2023. Une baisse qui s’explique par de multiples facteurs.
Guerre, inflation, climat d’incertitude
« Pour se projeter dans la parentalité, il faut être habité par l’espoir, or, le climat d’incertitude actuel peut peser » sur la décision d’un couple d’avoir un enfant, indique à l’AFP Catherine Scornet, maîtresse de conférences à l’Université d’Aix-Marseille. Le contexte de guerre en Ukraine et au Proche-Orient, tout comme l’inflation et les difficultés économiques peuvent ainsi influencer le choix d’avoir ou non un enfant.
Le décrochage des naissances en 2023 avait conduit le président Emmanuel Macron à appeler au « réarmement démographique » du pays, suscitant un tollé dans les rangs féministes et de la gauche, qui y voyaient une tentative de contrôler le corps des femmes. Le chef de l’État avait annoncé des mesures visant à relancer la natalité mais ces projets de réforme ont été mis à l’arrêt par la dissolution de l’Assemblée nationale en juin.
Se réaliser autrement qu’en devenant parent
Le décrochage de 2023 s’inscrit « dans une tendance de long terme », relève l’Institut national de la statistique dans une étude publiée jeudi, confirmant les chiffres annoncés en janvier. Depuis 2010, le nombre de naissances a reculé chaque année, à l’exception de celle de 2021 qui a connu un léger rebond dans le contexte de crise sanitaire.
Pourquoi les Français font-ils de moins en moins d’enfants depuis une décennie ? D’une part, le nombre de femmes de 20 à 40 ans, soit en âge de procréer, a diminué. Mais surtout, ces générations moins nombreuses procréent moins. « On observe des changements d’aspiration en matière de reproduction, aujourd’hui on peut se réaliser autrement qu’en devenant mère ou père », commente Catherine Scornet. « Les femmes diplômées se projettent le plus en dehors de la maternité. »
Moins de couples avec trois enfants
L’Insee relève par ailleurs qu’en 2023, la baisse des naissances concerne pour la première fois depuis 2010 les femmes de tous les âges, y compris les plus âgées. Concrètement, « on observe une hausse du nombre de personnes qui n’ont pas d’enfant, qu’on peut lier à une moindre pression sociale à en avoir », estime auprès de l’AFP Didier Breton, chercheur associé à l’Institut national d’études démographiques et professeur à l’Université de Strasbourg.
En outre, « moins de couples qu’auparavant passent de deux à trois enfants, probablement en raison d’un choix lié au confort matériel », ajoute-t-il. Le nombre élevé de familles avec trois enfants était jusqu’alors une spécificité française, selon lui. La France « devient un pays européen comme les autres ».
Le taux de fécondité reste le plus élevé de l’UE
En 2023, le recul des naissances dans l’Hexagone en 2023 a été plus important que la moyenne des pays de l’Union européenne (-5,5 %). L’an passé, le nombre de nouveau-nés a diminué dans 22 pays de l’UE sur 27. La baisse s’est notamment accentuée dans l’ensemble des pays de l’ouest de l’UE. Elle est passée de -1,3 % en moyenne par an entre 2019 et 2022 à -5,7 % entre 2022 et 2023. Elle s’est aussi amplifiée dans les pays de l’est de l’UE, passant de -4,5 % en moyenne par an entre 2019 et 2022 à -9,3 entre 2022 et 2023.
Si on considère toutefois le taux de fécondité, celui de la France reste le plus élevé de l’Union européenne, avec 1,79 enfant par femme en 2022, dernière année pour laquelle cette donnée est disponible. Bien qu’il soit en repli, il se maintient bien au-dessus de la moyenne de l’UE, qui atteint 1,46.