Flottille pour Gaza : François Piquemal relate son incarcération en Israël
Le député LFI et candidat aux municipales de Toulouse, François Piquemal, a été arrêté le 2 octobre par l’armée israélienne à 40 miles (64 km) des côtes de Gaza, après avoir été détenu pendant cinq jours en Israël en tant que membre des 470 passagers de la Global Sumud Flotilla. À son arrivée à Paris, François Piquemal a déclaré qu’il n’avait pas eu le droit à une douche ni à une sortie pendant sa détention.
Arrêté le 2 octobre par l’armée israélienne à 64 km des côtes de Gaza, François Piquemal, député LFI et candidat aux municipales de Toulouse, est rentré en France après cinq jours de détention en Israël. Il faisait partie des 470 passagers de la flottille Global Sumud arrêtés par l’armée israélienne. Partie début septembre de Barcelone, la flottille avait pour but d’acheminer de l’aide humanitaire aux Palestiniens touchés par le blocus imposé par l’Etat hébreu.
À peine arrivé à Paris, François Piquemal témoigne auprès de 20 Minutes de son arrestation et des traitements qu’il a subis en prison.
Quand avez-vous été intercepté dans les eaux internationales par Israël ?
Le 2 octobre. Le 3, nous sommes arrivés de nuit dans la prison. Nous avons été libérés le 6 grâce à la mobilisation mondiale et populaire ainsi qu’au travail effectué par les militants et les équipes parlementaires. Même si nous n’avons été détenus que quelques jours, le temps paraît beaucoup plus long.
Comment s’est passée votre détention en prison ? Quelles étaient vos conditions de vie ?
Là-bas, vous alternez entre des moments d’enfermement total dans des cellules surpeuplées et des scènes d’humiliation, d’intimidation ainsi que des violences psychologiques et physiques. Chacun vivait des variations à ce niveau-là, mais tout le monde était réveillé deux fois par nuit pour éviter d’avoir quatre heures de sommeil consécutives. Nous n’avons pas vu de médecin ni d’avocat en cinq jours, et nous n’avons pas eu le droit à une douche ni à une sortie.
Vous étiez préparé à vivre cela ?
Nous savions que cela pouvait arriver, nous étions préparés mentalement. Une première flottille avait déjà été interceptée début juin avec à son bord Greta Thunberg et Rima Hassan. Comparé à la première flottille, nous étions beaucoup plus nombreux, ce qui nous donnait de la force. C’était différent, mais je n’ai pas envie de parler à leur place. Globalement, vous vivez pendant une courte période ce que vivent les prisonniers politiques palestiniens depuis des décennies.
Greta Thunberg et Rima Hassan ont témoigné des violences qu’elles ont subies… Avez-vous, vous aussi, vécu des scènes de sévices qui vous ont marqué ?
« À l’arrivée au port d’Ashdod, dès que nous avons posé le pied à terre, la première chose qui nous est arrivée, c’est une clé de bras, une main sur le cou et, moi, j’ai été projeté au sol parce que j’avais demandé d’aller doucement avec des personnes qu’ils avaient bousculées. » Ils ont voulu nous intimider physiquement dès le départ. Ensuite, ils nous ont amenés sur un grand terrain en bitume face à des hangars. Là, 150 personnes ont été mises au sol en leur disant de regarder leurs pieds. Ils ont commencé à arracher tous les effets personnels – bracelets, colliers – ainsi que tout signe de solidarité avec la Palestine, parfois avec un couteau. À côté de moi, une jeune femme a vu son bracelet du Somaliland, souvenir familial, arraché. Ma collègue Marie Mesmeur et moi avions nos écharpes parlementaires. Un gradé de l’armée les a jetées au sol, suivies de deux soldats qui les ont piétinées ostensiblement. Quand nous leur avons dit : « Vous n’avez pas traité de cette manière-là mon pays », ils ont répondu qu’ils s’en fichaient. C’est à ce moment-là qu’ils ont fait agenouiller certaines personnes sur le drapeau israélien, y compris Greta Thunberg.
Et en prison ?
Dans ma cellule, j’étais avec un Écossais et un Irlandais ayant besoin d’insuline, mais ils refusaient l’accès aux médicaments. Nous criions pour nous faire entendre. Un commando de soldats est alors arrivé à 22 heures avec les fusils pointés qu’ils chargeaient devant nous. Ils ont fait mettre tout le monde à plat ventre avant de nous menotter, en serrant les menottes jusqu’au sang. Un soldat israélien voulait même me briser les poignets en me demandant si je disais vraiment « Free Palestine ». Ensuite, nous avons été sortis pendant une heure et demie, avec des personnes âgées qui n’avaient toujours pas eu leurs médicaments. L’un d’eux a failli s’évanouir à cause de la douleur des menottes. Par la suite, nous avons été transférés dans une autre cellule de huit places, où nous devions dormir à 18. Ces séquences de violences et d’humiliations laissent entendre qu’ils se sentent en toute impunité. Ce sont quand même des ressortissants étrangers, ils pourraient craindre des répercussions, mais ils s’en fichent.
Avez-vous eu peur pour votre vie ?
Je n’ai pas eu peur pour ma vie, non. Nous savions qu’à un moment donné nous serions relâchés. La question était surtout : quand ? Ils nous ont menacés de nous garder plusieurs mois. Cela, j’y étais préparé. Je m’attendais à ce que notre mandat de député implique une écoute plus attentive, mais ce n’était pas du tout le cas, c’était plutôt l’inverse.

