France

Féminicide de Mérignac : «Il met le feu au corps allongé au sol »… L’effroyable mort de Chahinez Daoud devant la justice

«Un procès doit toujours s’attacher à comprendre comment on en est arrivé là, estiment maîtres Anaïs Divot et Elena Badescu, les avocates de Mounir B. Et le rôle de la cour et des jurés sera de laisser de côté la surmédiatisation de cette affaire. » On peut gager que ce ne sera pas chose facile tant ce féminicide, celui de Chahinez Daoud, avait choqué la France entière. Le planning familial de la Gironde et plusieurs collectifs défendant les droits des femmes et des enfants ont déjà annoncé une manifestation ce lundi avant l’ouverture du procès.

Ce 4 mai 2021, Mounir B., 44 ans, ex-compagnon de Chahinez, l’attaque dans la rue, devant le pavillon qu’elle occupe à Mérignac, dans la banlieue de Bordeaux. Il tire dans les jambes de cette femme de 31 ans. Puis il l’asperge d’un liquide inflammable avant de la brûler vive. Avant de prendre la fuite, l’homme incendie le domicile familial après avoir sorti le fils de Chahinez, endormi dans le logement.

A partir de ce lundi et jusqu’à vendredi, l’accusé est jugé devant la cour d’assises de la Gironde pour assassinat et deux délits connexes : destruction du bien d’autrui par un moyen dangereux pour les personnes et récidive de violence avec usage ou menace d’une arme sans incapacité. Sur les bancs des parties civiles : les parents de Chahinez, le voisin qui a tenté d’intervenir mais qui a été braqué par l’accusé avec une arme à feu et la société Domofrance, propriétaire du logement occupé par la victime. L’accusé est en détention à Mont-de-Marsan, dans les Landes, depuis le 6 mai 2021.

Un voisin braqué à l’arme à feu par l’accusé

La scène, d’une rare violence, s’est donc déroulée dans la rue, sous les yeux d’un voisin, un septuagénaire. A 18h25, lorsque les coups de feu retentissent, il sort de chez lui. « Il intervient pour faire cesser l’action alors que l’accusé met le feu au corps, alors allongé au sol », rapporte à 20 Minutes son avocat, maître Guillaume Sapata. Tout se passe très vite et le retraité n’a pas le temps de porter secours à la jeune femme : il se fait alors braquer par le quadragénaire, qui ne mettra pas sa menace à exécution.

L’audience sera l’occasion pour lui de « témoigner et de décrire l’horreur de la scène et de pouvoir exprimer les conséquences pour lui », ajoute son conseil. Il ne connaissait pas la victime, mère de trois enfants, qui avait porté plainte contre son ex-conjoint pour violences conjugales seulement deux mois plus tôt. Une plainte mal enregistrée par la police.

Il voulait « se venger de son infidélité », pas la tuer

Selon les avocates de l’accusé, ce dernier continue de contester la préméditation, assurant qu’il n’avait « pas pour dessein d’attenter à la vie de Chahinez ». D’abord poursuivi pour meurtre, Mounir B. est bel et bien renvoyé pour assassinat.

« L’enquête démontrait que depuis le matin des faits, celui-ci s’était tapi dans un véhicule, garé à proximité du domicile familial, afin de surveiller les allées et venues de Chahinez », écrit le parquet général de Bordeaux dans son dossier de synthèse. Lors de sa garde à vue, le mis en cause a reconnu avoir voulu « la punir » pour « se venger de son infidélité » mais conteste « l’intention homicide et la préméditation ». Il raconte avoir le sentiment que Chahinez s’est servi de lui pour s’installer en France avec ses trois enfants.

L’accusé avait déjà été condamné pour des faits de violences conjugales commis au préjudice de Chahinez le 25 juin 2020 et avait à ce titre interdiction d’entrer en contact avec elle. Le 15 mars 2021, elle avait déposé plainte pour de nouveaux faits de violences. Pointant un « fonctionnement défectueux du service public de la justice », le cabinet de Maître Plouton, l’avocat de la famille de Chahinez, a lancé il y a deux ans une procédure séparée contre l’Etat, pour faute lourde.

Toutes nos infos sur les féminicides

« Ces nombreux dysfonctionnements ont fait perdre une chance à Chahinez d’échapper à l’assassinat dont elle a été victime le 4 mai 2021 », écrit le conseil des parents de la victime. L’accusé encourt la réclusion criminelle à perpétuité.