France

Faut-il aller voir l’expo « Serial Killer » qui fait le buzz à Paris ?

Les tueurs en série fascinent. Il suffisait de voir la file d’attente devant l’entrée et les cris joyeusement scandalisés des visiteurs pour en être convaincu. Le cinéma avec Hannibal Lecter, Jason ou Mike Myers a beaucoup contribué au phénomène sur lequel l’exposition Serial Killer aux Galeries Montparnasse surfe avec enthousiasme. Quarante salles sont consacrées aux « serials killers » et il faut en moyenne deux heures pour tout explorer.

L’exposition est incroyablement généreuse. Reconstitutions de scènes de crimes, objets ayant appartenu aux tueurs (avec certificat d’authenticité), mèches de cheveux de Charles Manson et Ted Bundy, films en réalité virtuelle (on a un faible pour celui où on est la victime impuissante d’un sadique), cartels explicatifs et courriers des tueurs killers sont pléthore. Les « serial killers » d’hier et d’aujourd’hui sont à l’honneur et on fait même des découvertes. On est venu voir du tueur et on en a pour les 23 euros du prix d’entrée.

L’ensemble est un peu foutraque : il évoque une malle dans laquelle on aurait bourré ses vêtements au petit bonheur la chance. L’exposition y va franchement dans le gore et l’horreur est d’ailleurs déconseillée aux moins de 14 ans. Elle a été créée en Italie mais une salle est cependant dédiée aux tueurs français. Cocorico !

On peut se prendre en photo dans une chambre à gaz

Il est indispensable d’avoir le cœur bien accroché car photos et scènes de crimes façon musée Grévin sont des plus graphiques. On se demande brièvement quelle tête ferait les proches des victimes s’ils les voyaient ainsi exposées, surtout quand il s’agit de crimes relativement récents comme celui d’Armin Meiwes qui a mangé un petit camarade soi-disant consentant. En même temps, quand on va voir une exposition sur des tueurs en série, on ne s’attend pas à contempler des licornes chevauchées par des chatons.

La scie circulaire du tueur Robert Berdella et son certificat d'authenticté
La scie circulaire du tueur Robert Berdella et son certificat d’authenticté - Caroline Vié

L’exposition est-elle malsaine ? Sans doute et elle l’assume jusqu’à un certain point. On ne peut s’empêcher de sourire quand, dans la salle consacrée aux exécutions capitales – où on peut notamment se prendre en photo dans une chambre à gaz – un panneau nous explique que la peine de mort, c’est mal. On sourit un peu plus jaune dans la dernière pièce rendant hommage aux victimes et affirmant que l’exposition leur est dédiée.

Un peu trop ?

On découvre surtout qu’il existe de sacrés agités du bocal sans même parler des Jeffrey Dahmer ou autres Ted Bundy. Nicolas Claux, qui a fait de la prison en 1996 pour meurtre et actes de cannibalisme a même un pan de mur entier qui lui est dédié. Il a fourni une partie des artefacts. Il a notamment mis à disposition la correspondance qu’il a échangée avec certaines « stars » des tueurs en série tel Ed Kemper. L’homme fait maintenant commerce de sa passion, peint de très beaux portraits de tueurs et publie des biographies qu’on trouve en vente à la sortie. On nous chuchote que des photos dédicacées proposées pour 15 euros ont été retirées de la vente. On peut en revanche toujours acheter tee-shirt et bonnets si on a envie de porter les couleurs de, par exemple, Issei Sagawa, le Japonais cannibale. Faut le voir sur soi (ou pas).

NOS ARTICLES SUR LES EXPOSITIONS

Faut-il aller découvrir l’exposition Serial Killer ? La réponse est « oui » si on a envie d’être secoué et « pas vraiment » si on en attend une expérience éducative. Le sensationnalisme est l’ingrédient principal de l’entreprise. Plus que de renseigner sur les tueurs, l’exposition conduit à s’interroger sur les limites du visiteur et sur son sens de la morale. Jusqu’où peut-on aller trop loin est la question qui vient aux lèvres à la sortie. A chacune et à chacun de donner sa réponse.