Exploitation des fonds marins : Une entreprise canadienne fait scandale en voulant contourner le droit international

Alors que les négociations internationales sur l’exploitation minière des grands fonds marins piétinent, une entreprise canadienne a pris tout le monde de court. The Metals Company (TMC) a annoncé vouloir contourner l’instance de l’ONU chargée de gérer ces ressources, et passer directement par l’administration américaine de Donald Trump afin d’obtenir le feu vert d’exploitation.
L’annonce a fait l’effet d’une bombe diplomatique et provoqué la colère de nombreux pays ainsi que l’indignation d’ONG environnementales. À la clé : des enjeux écologiques, juridiques et géopolitiques majeurs. On fait le point sur ce qu’il faut comprendre.
Qui est The Metals Company (ou TMC) ?
Anciennement appelée « DeepGreen Metals », TMC est une entreprise canadienne spécialisée dans l’exploitation de métaux critiques (nickel, cobalt, cuivre, etc.) en haute mer.
Elle veut extraire ces ressources dans les fonds marins internationaux, à plusieurs milliers de mètres de profondeur dans le Pacifique.
Pourquoi est-ce que le projet de TMC dérange ?
TMC veut contourner l’Autorité internationale des fonds marins (ou AIFM) qui est l’organisme international compétent, et demander une autorisation aux États-Unis puisque l’Océan en question est sur ses côtes. Sauf que le pays de Donald Trump ne fait même pas partie de l’organisation.
Pour contourner l’AIFM, TMC annonce dans un communiqué envisager de passer par sa filiale américaine, qui soumettrait une demande d’exploitation à la NOAA (National Oceanographic and Atmospheric Administration), l’agence fédérale américaine chargée des océans.
Mais au fait, l’AIFM c’est quoi ?
C’est une agence de l’ONU créée pour encadrer l’exploitation des fonds marins en dehors des zones nationales. Elle veille à ce que ces zones, considérées comme un « patrimoine commun de l’humanité », soient protégées et exploitées équitablement.
Les États-Unis peuvent-ils vraiment donner ce feu vert ?
Pas vraiment. Les États-Unis ne sont pas membres de l’AIFM ni de la convention de l’ONU sur le droit de la mer. L’agence américaine NOAA, jusqu’ici, seulement délivré des permis d’exploration, jamais d’exploitation.
Pourquoi TMC fait-elle ça maintenant ?
Parce que l’AIFM n’a pas encore adopté les règles encadrant l’exploitation minière. Les négociations durent depuis des années. TMC dit vouloir aller plus vite et se tourner vers un pays « plus réactif », alors que les États-Unis multiplient les initiatives pour sécuriser leur approvisionnement en ressources critiques, dans un contexte de rivalité croissante avec la Chine.
Qui s’est opposé à cette annonce ?
Une large majorité des pays membres de l’AIFM : la France, la Chine, le Brésil, l’Ouganda, la Russie, le Costa Rica ou encore le Chili. La secrétaire générale de l’AIFM a dénoncé une « violation du droit international ». Les ONG redoutent un « précédent » dangereux, et des dégâts irréversibles sur des écosystèmes encore peu connus. Certaines dénoncent une tentative de faire pression sur l’AIFM pour forcer la main à la régulation.
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Pour brouiller encore un peu plus les lignes, TMC affirme qu’elle prévoit toujours de déposer une demande officielle d’exploitation auprès de l’AIFM le 27 juin prochain, via sa filiale Nori, enregistrée à Nauru. Une double stratégie qui alimente les tensions et l’inquiétude dans la communauté internationale.