Etats-Unis : Entre Donald Trump et Elon Musk, « l’idylle pourrait rapidement tourner au divorce »
Partout où Donald Trump va, Elon Musk suit. Sur les réseaux sociaux, nombreux sont ceux qui s’amusent à dire que le républicain a adopté le patron de Tesla. Il faut dire que milliardaire d’origine sud-africaine est omniprésent, au point de s’incruster sur la photo de famille du clan Trump le soir de la victoire – où Melania Trump était, elle, absente. Des réunions politiques du président élu aux parties de golf, le repreneur de X ne lâche pas Donald Trump d’une semelle.
A tel point que d’après le site d’information The Daily Beast, certains membres de l’équipe de transition du républicain compareraient Elon Musk à cet « invité qui ne part pas » quand la soirée est finie. « Il est omniprésent et prend énormément de place, il n’y a aucun doute là-dessus », sourit Jérôme Viala-Gaudefroy, docteur en civilisation américaine. Mais pour l’auteur de Les mots de Trump (Ed. Dalloz, 2024), la problématique vient surtout de l’influence que cette proximité lui confère.
Des « conflits d’intérêts » massifs
En désignant Elon Musk comme ministre de « l’efficacité gouvernementale », chargé de raboter le budget fédéral, Donald Trump est dans la « quasi-illégalité ». « Les Etats-Unis vont se retrouver avec quelqu’un qui sera juge et partie. Il a un nombre de contrats incalculables avec l’Etat fédéral et c’est lui qui va décider de quels budgets doivent être réduits ? », s’indigne Jérôme Viala-Gaudefroy, évoquant des « conflits d’intérêts » massifs.
Dans son livre Plainte contre X. Comment Elon Musk a cassé Twitter (Observatoire), le journaliste Ryan Mac notait que « quelqu’un de si riche, avec un tel empire et l’oreille du président américain, cela n’est jamais arrivé auparavant ». Pour lui, le patron de Space X est devenu « la personne non élue la plus puissante au monde ». Lors de son premier entretien en tant que président élu avec le dirigeant ukrainien Volodymyr Zelensky, Donald Trump était d’ailleurs accompagné d’Elon Musk.
Le risque de divorce
Mais la bromance entre les deux hommes peut-elle vraiment durer ? « C’est la question que tout le monde se pose. Ils sont très narcissiques, ont tous les deux une histoire de conflits avec leurs partenaires commerciaux et du mal avec tout ce qui est contrainte ou hiérarchie », égrène Jérôme Viala-Gaudefroy. La journaliste de CNN Kara Swisher estime elle aussi qu’à mesure que le pouvoir de Trump va augmenter, le besoin croissant d’attention d’Elon Musk va créer des frictions entre les deux hommes.
« L’idylle pourrait tourner rapidement au divorce, abonde Jérôme Viala-Gaudefroy. Si l’un des deux veut trop prendre la lumière, l’autre va en prendre ombrage. Mais Trump a été élu, pas Musk – malgré toute la puissance qu’il a. Ils ont tous les deux cette idée qu’ils sont les élus, qu’ils vont sauver le monde. Mais, dans cette vision, il ne peut en rester qu’un à la fin. » D’autant que l’écoute attentive dont dispose Elon Musk auprès du prochain dirigeant des Etats-Unis risque de lui attirer l’animosité de nombre de conseillers et politiques.
« Un mélange entre « Games of Thrones » et « House of Cards » »
Elon Musk pourrait donc suivre le même destin que Steve Bannon, figure de l’ultradroite américaine. Conseiller de Donald Trump lors de son premier mandat, il avait fini par être évincé après s’être étalé dans les médias et avoir osé contredire publiquement le républicain. Le site d’information Vox Media précisait d’ailleurs en 2017, après sa démission, que l’homme avait « de nombreux ennemis de l’intérieur », qui n’ont pas hésité à sauter sur l’occasion.
Elon Musk aurait donc tout intérêt à agir avec précaution, autant auprès de Donald Trump que de celles et ceux qui vont graviter autour de lui et pourraient, un jour, mettre le dernier clou dans son cercueil. Car même s’il est l’homme le plus riche du monde, avec plus de 300 milliards selon le magazine Forbes, il peut perdre son avantage aussi vite qu’il l’a gagné dans la cour de Donald Trump. « Ça va être un mélange entre Games of Thrones et House of Cards », prédit Jérôme Viala-Gaudefroy. Or, comme le disait Frank Underwood dans la série, « il ne faut que dix secondes pour écraser l’ambition d’un homme ».