Espace : Faut-il avoir peur de l’astéroïde 2024 YR4 qui se dirige vers la Terre ?
Houston, avons-nous un problème ? Le 27 décembre dernier, un astéroïde a été repéré par l’observatoire de Rio Hurtado, au Chili, se trouvant à 43 millions de kilomètres de la Terre. La probabilité que cet objet, appelé 2024 YRA, touche la planète est « légèrement supérieure » à 1 %, – une chance sur 83, selon les calculs de l’agence spatiale des Etats-Unis, la Nasa, et une chance du 88 selon l’agence européenne, l’Esa.
« On a effectivement trouvé que la trajectoire de cet astéroïde, qui fait entre 50 et 90 m de diamètre, pouvait conduire à un impact avec la Terre en décembre 2032 », confirme à 20 Minutes Patrick Michel directeur de recherche au CRNS et astrophysicien à l’Observatoire de la Côte d’Azur. Le spécialiste explique que cette observation a provoqué « une alerte » car elle a dépassé le « seuil des 1 % », défini par le Réseau international d’alerte aux astéroïdes, dont il fait partie, pour que le comité se réunisse et qu’il émette des recommandations à l’Onu.
Quelles conséquences si l’astéroïde touche la Terre ?
« Si jamais l’astéroïde 2024 YRA faisait effectivement 50 m de diamètre et entrait effectivement en collision avec la Terre, les conséquences seraient, au minimum, comme ce qu’il s’est passé dans l’atmosphère au-dessus de la baie de Tunguska, en Sibérie, en 1908, où un astéroïde avait pulvérisé 2.000 km2 de forêt », indique Patrick Michel. En résumé, si un objet comme celui-là explose au-dessus de Paris, « c’est tout Paris qui y passe ». Et s’il est plus grand, « ça peut avoir des dégâts à l’échelle d’une région », indique-t-il.
Pour l’instant, il précise qu’il n’y a aucune indication de l’endroit où l’astéroïde pourrait tomber. « Mais si on regarde simplement les statistiques, il est beaucoup plus probable que cela se passe au-dessus d’un océan ou d’un désert qu’au-dessus d’une zone habitée, car la Terre est en majorité déserte et liquide », pointe-t-il.
« Il n’y a pas de raison d’avoir peur »
Avant de s’imaginer le scénario d’un film catastrophe, l’astrophysicien, également auteur du livre À la rencontre des astéroïdes, assure : « Il n’y a pas de raison d’avoir peur, il y a plutôt de bonnes raisons d’être rassurés ! En réalité, cette alerte une très bonne nouvelle parce que ça montre qu’on est coordonnés et très bien organisés à l’échelle internationale pour répondre à ce genre de problème rapidement. »
« Et puis, si la probabilité qu’un astéroïde entre en collision avec la Terre est de 1 %, ça veut aussi dire qu’il a 99 % de chance de ne pas entrer en collision avec la planète », souligne-t-il en souriant.
Attendre jusqu’à 2028 pour prendre une décision
Les agences spatiales mettent tout de même tous les moyens nécessaires pour affiner la trajectoire de 2024 YRA et vérifier, parmi toutes les solutions, s’il y en a toujours une qui conduit à une collision vers la Terre. « Il y a de fortes chances que cette probabilité évolue dans les prochains jours et s’annule, qu’elle tombe à zéro tout simplement. Mais on reste vigilants car l’objet va s’éloigner en avril pour retourner dans la ceinture des astéroïdes entre Mars et Jupiter. Il ne sera plus observable et on restera dans l’incertitude des dernières probabilités. Il faudra attendre 2028 pour pouvoir recommencer à l’observer », détaille Patrick Michel.
Pour l’astrophysicien, il n’est pas nécessaire de prendre des décisions dès maintenant pour tenter de dévier l’astéroïde et annuler complètement le risque « vu la probabilité » qu’il nous rentre dedans et « notre capacité à déployer des missions spatiales de déviation rapidement, comme Dart ».
Un plan pour ne plus « avoir peur que le ciel nous tombe sur la tête »
Cet épisode est tout de même inédit. Pour le directeur de recherches au CRNS, c’est aussi lié à une meilleure organisation des agences spatiales et à des télescopes plus performants. « Ce n’est pas étonnant qu’on doive gérer ces situations qui étaient jusqu’à présent jamais arrivées, ou uniques. Avec nos avancées scientifiques, il est sûr que la découverte d’objets de cette taille-là, qui passent plus fréquemment près de la Terre, va augmenter drastiquement, dit-il. On va alors faire face à de plus en plus de scénarios qui dépassent les critères qu’on avait établis. Mais il vaut mieux le faire pour rien, que cela n’arrive vraiment. »
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Il conclut : « En termes de défense planétaire, on est en train de mettre en place des étapes qui offriront aux futures générations un plan qui leur permettra de ne plus avoir peur que le ciel leur tombe sur la tête parce qu’ils sauront y faire face. »