Espace : A quoi servent les satellites de la constellation française Kinéis, destinée aux objets connectés ?
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Kinéis se rapproche de son but. L’opérateur de satellites toulousain a désormais 20 des 25 satellites de sa constellation en orbite après le lancement réussi, samedi soir depuis la Nouvelle-Zélande, de cinq d’entre eux par une fusée Electron de la société Rocket Lab. La constellation de nanosatellites, qui devrait être complète en mars après le cinquième et dernier lancement, est la première européenne dédiée à l’Internet des objets ( « Internet of things », IOT) et doit permettre de transmettre rapidement des données d’objets connectés depuis n’importe où sur la planète.
L’opérateur promet ainsi d’éliminer les zones blanches et une récupération des données en moins de quinze minutes. Pour y parvenir, un émetteur fixé sur l’objet dont il doit transmettre les informations enverra régulièrement ses données par radiofréquence, données qui seront ensuite captées par les satellites – qui passent 80 fois par jour sur chaque point de la planète, d’après Kinéis – et renvoyées au sol, qu’il s’agisse de la localisation d’un conteneur de fret ou du niveau d’une cuve d’eau située en pleine forêt.
Des domaines d’application vastes
La constellation intègre aussi l’AIS (Automatic Identification System, Système automatique d’identification en français), utilisé par les bateaux pour connaître l’identité, la position, la direction et le statut des autres navires de la zone. Utilisant les ondes radio VHF, ce système permet notamment d’éviter les collisions et d’améliorer la sécurité en mer des bateaux, qu’ils soient des navires commerciaux, de plaisance ou de pêche.
Mais les utilisations de la constellation Kinéis sont bien plus vastes et couvrent de nombreux domaines : en plus de la surveillance des activités maritimes, l’entreprise fournira ses services pour la prévention des risques naturels, la surveillance des réseaux d’infrastructures et d’énergie, l’agriculture, le suivi du bétail et des animaux sauvages… Les projets en cours visent notamment à aider et géolocaliser les 55 millions de petits pêcheurs dans le monde privés de ligne de vie avec la terre, à mieux gérer les troupeaux et la propagation des maladies, à améliorer la détection précoce des feux de forêt, à éviter la perte de wagons de fret connectés, à suivre et surveiller les bateaux de plaisance, à surveiller des lignes à haute tension ou des niveaux d’eau ou à gérer des pipelines.
Une entreprise rodée
Bien que l’entreprise, qui construit les 25 satellites de la constellation, soit relativement jeune – elle a été créée en 2018 –, elle a été lancée par CLS (Collecte localisation satellites) et sa maison mère, le Centre national d’études spatiales (Cnes), et bénéficie donc de leur expérience. Le projet s’appuie notamment sur l’héritage de la technologie Argos, qui permet de géolocaliser n’importe quelle balise avec une précision de 150 mètres, mise en place depuis quarante ans par CLS. Kinéis a repris l’exploitation des neuf satellites du système en 2019.
Le lancement de l’avant-dernier groupe de nanosatellites de la constellation, samedi, s’est accompagné par la signature de trois nouveaux contrats, qui participeront au développement du service de Kinéis une fois les 25 satellites opérationnels. CLS, justement, prévoit de déployer 17.000 appareils actifs en 2025 et 30.000 en 2026 avec de la connectivité Kinéis. A terme, l’objectif de CLS est de renforcer le suivi de bateaux de pêche et de troupeaux.
Déjà des contrats
Le consortium Europorte-Kerlink a aussi passé une commande auprès de Kinéis, indique l’entreprise, à hauteur de 10.000 appareils d’ici à 2026. L’objectif est de déployer Track Value, qui « propose une réponse aux principales problématiques des acteurs de la logistique et du transport de marchandises comme la localisation en temps réel de wagons ou la maintenance prédictive du blocage de roues », indique dans un communiqué l’opérateur toulousain.
Kinéis figure aussi parmi les sept entreprises retenues dans le domaine du spatial pour le programme France 2030, un plan d’investissements de l’Etat de 54 milliards d’euros, qui doit notamment permettre d’investir dans les technologies innovantes. Dans ce cadre, les services de Kinéis seront utilisés « pour la mesure, le suivi et le contrôle de paramètres liés aux territoires (montée des eaux, départ de feux, etc.), à la logistique, aux réseaux, aux infrastructures de transport et d’énergie ou encore de positions d’équipements stratégiques », indique la société. Un développement rapide qui pourrait permettre à Kinéis de remplir son objectif : devenir, d’ici trois ans, une référence mondiale en matière de transmission de données IOT.