France

Elisabeth Borne présente un plan pour lutter contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations

Systématiser les testings sur les discriminations à l’emploi, « élaborer des outils » avec les plateformes numériques et les influenceurs, rendre possible un « mandat d’arrêt » : le gouvernement annonce lundi un plan de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine.

Ce plan 2023-2026, qui sera détaillé par la Première ministre Elisabeth Borne et la ministre chargée de l’Egalité des chances Isabelle Rome, en présence de dix autres ministres, prévoit une série de mesures qui touchent différents secteurs, allant de l’éducation à l’emploi en passant par la justice ou le sport.

« Ne jamais céder à la banalisation »

« Depuis plus de 5 ans, nous combattons toutes les haines et traquons toutes les discriminations », a déclaré Elisabeth Borne, ajoutant que ce plan doit « permettre de mieux nommer et de mieux mesurer » ces phénomènes, « de mieux éduquer et former, de mieux sanctionner les auteurs de propos ou d’actes inacceptables et enfin de toujours mieux accompagner les victimes ».

« Pour ne jamais céder à la banalisation du racisme, sous toutes ses formes, et de l’antisémitisme, nous devons d’abord éduquer », a aussi plaidé Isabelle Rome. « Et dans le même temps, nous devons être intraitables avec ceux qui diffusent ce poison ».

Eisabeth Borne – dont le père, juif, a été déporté, puis a mis fin à ses jours quand sa fille avait 11 ans – prévoit notamment dans ce plan, « l’organisation d’une visite d’histoire ou de mémoire liée au racisme, l’antisémitisme ou l’antitsiganisme pour chaque élève durant sa scolarité ». Un « renforcement » de la formation des enseignants et des agents de la fonction publique d’Etat en général (forces de sécurité, agents d’accueil Pôle emploi, etc.) est également prévu, et doit commencer « dès début 2023 ».

« Logique graduée »

Le gouvernement entend également créer des peines aggravées en cas « d’infractions non publiques à caractère raciste ou antisémite commises dans l’exercice de leur fonction par des personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public ». Parmi ses mesures phares, le plan prévoit aussi de « systématiser les testings sur les discriminations à l’emploi », dans différents secteurs, privés et publics, en concertation avec les organisations syndicales et patronales et les associations notamment.

Le testing consiste à envoyer pour la même offre d’emploi deux CV identiques avec, comme uniques différences, notamment l’origine du candidat. Dans une « logique graduée », si les mauvaises pratiques perdurent, le gouvernement n’exclut pas des sanctions et de recourir à la pratique du « name and shame », publiant les noms des entreprises peu vertueuses.

Afin de « promouvoir la citoyenneté numérique », le plan prévoit d’impliquer « les plateformes et les influenceurs, dans un travail collaboratif pour élaborer des outils visant à améliorer les comportements des internautes ». Tout comme pour les victimes de violences sexuelles, le gouvernement souhaite sécuriser le dépôt de plainte. Les forces de l’ordre sont invitées à un meilleur recueil et traitement de celles-ci, via une « anonymisation partielle » ou grâce à « une grille d’évaluation ».

Un mandat d’arrêt

Le gouvernement entend encore inscrire dans la loi « la possibilité » d’émettre un « mandat d’arrêt » en cas de « condamnations à caractère raciste ou antisémite », de « contestation de crime contre l’humanité » ou « d’apologie de crime contre l’humanité ou de crime de guerre ». Ce pour permettre l’exécution des peines « lorsque les auteurs condamnés pensent y échapper en fuyant à l’étranger ».

Selon des données du ministère de la Justice, en 2021, « 7.721 affaires à caractère raciste, antisémite ou xénophobe ont fait l’objet d’une suite judiciaire ». Au total « 1.382 condamnations (ont été) prononcées pour des actes racistes, antisémites ou xénophobes ou commises avec cette circonstance aggravante ». Ce plan, qui fera l’objet d’un suivi semestriel, fait à la suite d’une vaste concertation. Sur le plan budgétaire, chaque ministère concerné a pris des engagements, mais l’enveloppe globale n’a pas été communiquée.

La majorité des mesures n’impliquent pas de dispositions législatives, mais le cas échéant, elles seront inscrites « au fil des opportunités des textes », indique le gouvernement. En mars 2018, Édouard Philippe avait présenté un précédant plan, qui mettait notamment l’accent sur la lutte contre les contenus haineux en ligne. Il prévoyait déjà de renforcer la formation de « l’ensemble des personnels » de l’éducation.