France

Elections à la FFF : Noël Le Graët est-il revenu pour ruiner la carrière de Philippe Diallo ?

Qu’ils aient été déposés là par de petits hommes verts ou qu’ils soient le fruit de l’ingéniosité de nos chers ancêtres, les menhirs continuent de fasciner petits et grands à travers le temps. Mais tout ce que l’on sait vraiment, au fond, c’est que ces immenses blocs de granit qui peuplent les contrées bretonnes sont difficiles à bouger et parfaitement increvables.

Un peu comme Noël Le Graët, l’autre menhir costarmoricain, que l’on pensait définitivement perdu dans les oubliettes de l’histoire après son affaire de harcèlement sexuel et qui a fait contre toute attente un retour fracassant ces dernières semaines. Après avoir été blanchi par la justice des faits qui lui étaient reprochés, le père de l’En Avant Guingamp et ex-grand manitou du football français a choisi le journal L’Equipe pour renaître de ses cendres et envoyer quelques coups de biniou bien placés à ceux qui l’avaient trop vite enterré.

Le Graët assaisonne Diallo en pleine campagne

Le plus mémorable d’entre eux fut dirigé contre Philippe Diallo, son successeur à la tête de la FFF et qui remet la sienne en jeu ce samedi à l’occasion des élections fédérales. Quand notre confrère lui demande si Philippe Diallo a été digne de la charge dont il a hérité, NLG sort le bazooka. « Je n’ai pas d’avis. Il devrait jouer au Loto (sourire) ! Il est viré du syndicat UCPF, ex-Foot Unis, j’ai une place de libre, je me dis qu’il connaît le foot et le nomme trésorier. Avec le départ de Brigitte Henriques au CNOSF, je le promeus vice-président. J’aurais mieux fait de nommer une autre femme », tranche-t-il, sans qu’on sache s’il faut voir dans cette allusion à la gent féminine une note de second degré.

Ce qui est sûr, c’est que le père Diallo est rhabillé pour l’hiver. Pour comprendre le ressentiment qu’il nourrit à l’égard de son ancien bras droit, il faut prendre la phrase suivante : « Je ne sais pas si Florence Hardouin l’a averti de ce qu’elle allait faire contre moi, j’ai un doute. » Voilà, tout est là.

« Il était devenu un peu parano »

Persuadé depuis le début de cette affaire de l’existence d’un complot ourdi par le duo Florence Hardouin-Philippe Diallo et mené contre lui pour précipiter sa chute, Noël Le Graët a profité de sa nouvelle virginité judiciaire pour savonner la planche du président de la FFF dans la dernière ligne droite de sa campagne. Fin connaisseur du personnage, avec qui il a pu avoir maille à partir au moment de l’affaire Le Graët, Eric Borghini nous livre le fond de sa pensée.

« Quand Noël Le Graët dit que s’il n’avait pas nommé Diallo président de la commission des arbitres, personne ne le connaîtrait, il a totalement raison. Mais à la fin il n’était plus trop lucide, il s’imaginait que tout le monde était contre lui, il était un peu parano. Il n’y a jamais eu de complot ourdi contre lui par le duo Diallo-Hardouin. Noël a juste profité de la décision de justice pour régler quelques comptes et mettre quelques coups, mais il ne faut pas y voir plus que ça. La seconde lame contre Diallo ne tarde d’ailleurs pas à venir, plus violente encore, quand il annonce soutenir son adversaire, Pierre Samsonoff. « C’est un bon candidat, meilleur que Diallo. Je le soutiendrai. Il va faire une bonne liste, il connaît bien le foot amateur. Il est sérieux, intelligent et cultivé, ce n’est pas un farfelu », assène-t-il, en sous-entendant avec ses gros sabots que Philippe Diallo en est un, lui, de farfelu.

Un soutien naturel à Pierre Samsonoff

Dans un papier du Parisien et sous couvert d’anonymat, deux connaisseurs voient dans ce soutien le signe incontestable d’une velléité de vengeance de la part du Breton. Comme pour terminer le boulot avant de définitivement se retirer, lui qui avait assuré son équipe lors du fameux Comex post-Zidane Gate qu’il ne serait « pas le seul » à tomber dans cette sale affaire.

C’est peu ou prou ce que pense le président de la 3F quand il répond à nos confrères, lesquels lui demandaient si ce retour en force du Menhir n’était pas de l’ordre du « fantasme ou du bruit de couloir ». « Non, je ne crois pas que ce soit juste ça, assure-t-il. Je pense qu’il essaie de faire tout ce qui est en ses moyens pour aider cette liste concurrente. » Et donc le plomber, lui. Alors, du haut de ses 82 ans, Noël Le Graët aurait-il jeté ses dernières forces dans la bataille pour abattre celui à qui il a donné les clés de la bétaillère ?

« Je ne pense pas qu’il faille y voir quelque chose de machiavélique, juge Eric Borghini, membre du Comex et président de la Ligue Méditerranée. Ce soutien à Samsonoff est naturel. Noël et Pierre ont toujours été très proches de par leur amour pour l’En Avant Guingamp, club qu’ils ont dirigé tous les deux, l’un en tant que DG, l’autre en tant que président. A l’époque on disait même que Pierre était le fils spirituel de Noël. Je trouve donc logique qu’il le soutienne. »

« Noël a tourné la page de la Fédération »

Originaire des Côtes-d’Armor et grand fan de l’EAG, Pierre Samsonoff s’est en effet rapidement fait une place dans la seigneurie guingampaise de Monseigneur Le Graët en devant administrateur des Rouge et Noir. Un poste qu’il tiendra de 2010 à 2016, date à laquelle il monte à la capitale pour rejoindre son acolyte et devenir Directeur général adjoint de la Fédération Française de football. Et s’il finira par quitter le navire en 2021, frustré de voir le duo Le Graët-Hardouin n’accorder que peu d’importance au football amateur qu’il tient en haute estime, lui l’ancien directeur de la Ligue de football amateur au sein de la FFF, il ne restera pas fâché avec son ex-mentor.

Notre dossier sur Noël Le Graët

Pour Eric Borghini, voir Noël Le Graët en tireur de ficelles et Pierre Samsonoff en simple marionnette tient de l’enfumage. « Noël a 82 ans, il a été très malade, il ne faut pas s’imaginer qu’il va revenir peser et mettre son nez partout à la Fédération. D’autant que Pierre Samsonoff a de la personnalité, ce n’est pas quelqu’un qui se laisse faire. Noël a tourné la page de la Fédération, il ne va pas revenir, c’est du pipeau ça. Après, qu’il ait une petite satisfaction si Diallo est battu samedi, on ne peut pas l’exclure (rires). » En effet, sans être totalement acteur de cette pièce de théâtre grandeur nature, il y a fort à parier qu’il ne cracherait pas sur une vengeance par personne interposée. Voir son fils spirituel mettre le dernier coup de glaive à la carrière de Diallo serait forcément un joli cadeau de Noël avant l’heure.