Droits TV Ligue 1 : Valorisation, « contrat de merde », abonnés… Mais qu’est-ce qui retient DAZN dans ce bourbier ?

On serait à la place des présidents de Ligue 1, on ne bookerait pas tout de suite nos vacances estivales. Oubliés Mykonos, les Antilles ou les Maldives, les dirigeants français risquent de passer leur été bien au chaud, dans leur bureau, pour trouver une porte de sortie à la (nouvelle) crise qui secoue le foot français. Car il se pourrait bien qu’on reparle très vite de trouver un diffuseur pour notre championnat la saison prochaine. Souviens-toi l’été dernier.
Selon des informations de RMC Sports, DAZN voudrait rompre son contrat avec la LFP à la fin de la saison, après seulement une année à retransmettre la L1. Surprenant ? Pas forcément. Et ce n’est pas à cause de soporifiques Montpellier-Le Havre ou Reims-Nantes que la plateforme britannique compte abandonner, mais plutôt de promesses non tenues par la Ligue de football professionnel, à commencer par une faible valorisation du produit, alors que les clubs ne semblent pas enclins à ouvrir leurs portes.
Là où Canal + ou Prime Video arrivaient à proposer des insides, des longues interviews avec des joueurs phares de notre championnat, DAZN se retrouve les mains dans les poches, avec un match à diffuser, et c’est à peu près tout. Comme si les clubs de L1 s’étaient alliés pour que la plateforme n’ait rien à se mettre sous la dent. Les clubs, réticents à offrir plus de contenus à la plateforme, se sont pourtant plaints du traitement du championnat, à l’image d’Olivier Létang.
« Ils ont fait de la merde »
« Je suis d’accord que l’on ne peut pas garder un partenaire comme celui-là qui a un produit catastrophique », estime le président du Losc, dans des extraits audios d’une réunion entre les présidents de L1 datant du 14 février et dévoilés dans l’After Foot. « DAZN avait établi un plan d’action clair qui devait permettre un accès plus important à des interviews de joueurs prestigieux, mais aussi de pouvoir tourner des sujets dans des endroits plus exclusifs afin de valoriser les droits achetés », rapporte RMC Sports.
Un plan d’action réduit à l’état de poussière, donc, puisque la chaîne ne trouve pas son compte, comme dans la lutte contre le piratage, qui était l’un de ses chevaux de bataille pour mieux développer son produit. Et ce n’est pas l’action commune de lutte contre le piratage entreprise par les clubs de Ligue et Ligue 2, en accord avec la LFP, beIN Sport et DAZN, mi-mars, qui a bouleversé les habitudes de consommations des suiveurs du foot français, même si la plateforme y a aussi sa part de responsabilités pour avoir proposé un prix d’entrée exorbitant : 39,99 euros par mois en début de saison.
« Je ne vois pas les gens, nos consommateurs, nos supporters dans les villes, acheter des abonnements à ce prix-là », prédisait Marc Keller, le président de Strasbourg l’été dernier. La braderie générale organisée depuis quelques mois n’a rien changé et la plateforme est loin du million et demi d’abonnés ambitionnés. « Ils ont fait de la merde depuis le début, critique Jean-Michel Roussier, le président du Havre. Et ils continuent d’en faire. Ils se sont gourés sur leur business plan. Ce sont les seuls au monde qui imaginaient faire 1,5 million d’abonnés avec le produit de daube qu’ils nous livrent. »
« Un suicide collectif »
DAZN a bien tenté des coups de pression pour inverser la tendance. Mais après avoir payé seulement la moitié de son échéance de février et tenter d’obtenir une part fixe et une part variable sur la somme payée aux clubs, selon RMC Sports, la chaîne semble être à bout. Et la divulgation des audios des présidents n’a pas dû franchement leur donner envie de poursuivre l’aventure en L1.
Car, au-delà du président du HAC, celui du RC Lens, Joseph Oughourlian, ou celui du FC Nantes, Waldemar Kita, ont aussi élevé la voix. Et les oreilles du diffuseur ont dû exploser à distance. « On est en train de nous conduire à un suicide collectif, et personne ne bouge, s’énervait Kita, alors qu’à ce moment-là, DAZN avait décidé de mettre sous séquestre la moitié de son échéance de paiement, à savoir 35 millions d’euros, avant de finalement les payer le 27 février. Pourquoi c’est toujours le bordel ? De toute façon, ce contrat c’est de la merde. Si on n’a pas de plan B, on est morts. »
NOTRE DOSSIER SUR LES DROITS TV
De plan B, de vie et de mort, il en sera donc question plus vite que prévu si DAZN met fin à son contrat de manière prématurée, à la fin de la saison. Surtout si les Britanniques arrivent, comme l’indique RMC Sports, à faire sauter la clause dans le contrat de diffusion qui les lie avec la LFP qui l’empêche pour le moment de discuter avec d’autres acteurs. La Ligue devrait alors trouver une solution rapide pour la saison 2024-2025. Pendant ce temps, à la direction de DAZN, on profitera du soleil à Jersey et Guernesey.