France

Droit d’asile : A Calais, les associations sceptiques face au tour de vis de Londres

L’eldorado britannique fait grise mine. Mardi, le ministre de l’Intérieur du gouvernement de sa Majesté, Rishi Sunak, a présenté devant le Parlement un projet de loi visant à durcir un peu plus les conditions d’asile dans son pays. Pour simplifier, s’il était voté, le texte empêcherait notamment tout immigré illégal de déposer une demande d’asile en Grande-Bretagne, quelle que soit sa situation. Le projet de loi prévoit également des mesures d’expulsion rapides pour ces personnes, ainsi qu’une interdiction à vie de remettre les pieds en Grande-Bretagne.

Pour les associations françaises d’aide aux migrants, cette menace ne produira pas d’effet significatif sur les flux à moyen terme, voire même un effet inverse à court terme. « Clairement, ce texte vise les personnes arrivant en  »small boats », parce que ces opérations sont très visibles et mauvaises en termes d’image, et le gouvernement britannique doit montrer à son opinion publique qu’il agit », assure François Guennoc de l’Auberge des migrants. Une cible assumée pleinement dans la presse anglaise par Rishi Sunak, d’ailleurs.

Un texte de loi aussi illégal que dangereux

Pour Adèle, porte-parole d’Utopia 56 à Calais, va se dessiner le même scénario que lorsque le gouvernement britannique avait l’ambition de renvoyer les migrants illégaux vers de Rwanda : « Là aussi, l’objectif était de dissuader. Dans les faits, cela avait généré beaucoup d’anxiété dans les camps de personnes exilées à Calais mais cela n’avait pas non plus changé leur projet de vie de s’installer là-bas. » L’Auberge des migrants est aussi dubitative : « Sortie de l’UE, la Grande-Bretagne ne peut plus appliquer le règlement de Dublin, et ça m’étonnerait que l’Europe accepte que soit renvoyés sur son territoire les migrants depuis l’Angleterre », analyse François Guennoc. Selon lui, donc, il faudra donc bien que les Britanniques accueillent ces personnes.

Plutôt qu’une solution efficace contre l’immigration clandestine, les observateurs estiment que ce texte est aussi illégal que dangereux. Au lieu de diminuer le nombre de traversées illégales, Amnesty International UK assure à 20 Minutes qu’il y aura « une augmentation considérable du nombre de personnes qui se trouvent au Royaume-Uni, poussées dans l’ombre par crainte des autorités et ainsi exposées à encore plus d’exploitation et d’abus de la part de gangs criminels ».

Côté français, les associations redoutent un « mouvement de panique » en amont de l’adoption du texte : « On a déjà vu ça, les passeurs mettent la pression pour organiser plus de traversées avant que de nouveaux règlements soient appliqués », déplore François Guennoc. Un afflux est donc envisageable avec tous les risques que cela comporte.