Donald Trump qualifie le mouvement antifa de terroriste pour « gagner des points politiques »

Donald Trump a annoncé qu’il allait désigner le mouvement « antifa » comme une « organisation terroriste » aux Etats-Unis, une semaine après la mort de Charlie Kirk. La Maison-Blanche n’a pas donné de précision sur cette désignation, dont l’application s’annonce floue, voire impossible.

« A MAJOR TERRORIST ORGANIZATION ». Depuis le Royaume-Uni, où il effectue une visite d’État, Donald Trump a annoncé sur son réseau Truth Social qu’il allait qualifier le mouvement « antifa » (antifasciste) d’« organisation terroriste » aux États-Unis. Cette déclaration fait suite à la mort de l’influenceur d’extrême droite, Charlie Kirk. Le président américain a également précisé que les personnes finançant les antifascistes seraient soumises à des enquêtes approfondies « conformément aux normes et pratiques juridiques les plus strictes ».

Ce n’est pas la première fois que le milliardaire manifeste son intention de s’en prendre à ce segment de « la gauche radicale », qu’il désigne comme son ennemi numéro un depuis le décès du porte-voix de la jeunesse trumpiste. En 2020, durant les manifestations parfois violentes déclenchées par la mort de George Floyd, un Afro-Américain tué par des policiers blancs, il avait déjà exprimé une menace similaire. « Les États-Unis vont inscrire les Antifa dans la catégorie des organisations terroristes », avait-il tweeté, alors avec moins de majuscules.

La Maison-Blanche n’a pas précisé les modalités de cette désignation, dont l’application semble floue, voire impossible. Il n’existe pas de liste d’organisations terroristes nationales aux États-Unis, seulement une qui concerne des organisations terroristes étrangères (FTO, « Foreign Terrorist Organizations »). « Cela soulève une question constitutionnelle et légale : peut-on classer des groupes internes, qui n’ont pas de liens ou de financements étrangers, comme des terroristes ? », s’interroge Mario del Pero, professeur d’histoire internationale à Sciences Po Paris. En 2020, Bruce Offman, chercheur en terrorisme à l’université de Georgetown, rappelait sur X que « seul le secrétaire d’État américain » pouvait valider une telle désignation, qui n’était que « étrangère » et « non nationale ».

De plus, la nature même du mouvement antifasciste américain complique son ciblage. En 2020, l’ancien directeur du FBI, Chris Wray, reconnaissait qu’il ne s’agissait « pas d’un groupe ou d’une organisation, mais d’une idéologie ». « C’est une marque, une nébuleuse, il n’y a pas vraiment d’organisation structurée avec un statut, un leadership, des cadres », souligne Mario del Pero auprès de 20 Minutes. Une multitude de groupes peuvent se revendiquer de ce mouvement, unis par leur lutte contre l’extrême droite, le suprémacisme blanc, la défense des droits des minorités ou encore la lutte contre le capitalisme. Certains ont recours à la violence, tandis que d’autres optent pour des méthodes pacifiques.

« La violence politique est un problème aux États-Unis. Depuis le XXIe siècle, elle émane de groupes paramilitaires, de milices, de suprémacistes blancs, mais des violences ont aussi été perpétrées par des groupes utilisant des idéaux politiques de gauche et antifasciste », explique Mario del Pero. Selon lui, le président républicain cherche à répondre à cette violence principalement pour « gagner des points politiques ».

« Donald Trump cherche à déshumaniser l’opposition politique en transformant sa frange la plus radicale en terroriste », ajoute le professeur d’histoire internationale, exprimant ses inquiétudes face à une possible « torsion autoritaire » du pouvoir aux États-Unis. « En désignant comme terroriste une nébuleuse, cela permet d’utiliser le pouvoir policier de manière discrétionnaire contre ceux considérés comme affiliés à ce mouvement. »

« Les MAGA ne se soucient pas des faits, il s’agit simplement de mobiliser une large étiquette pour étendre la répression », résume Mark Bray, historien et auteur de l’ouvrage L’antifascisme : Son passé, son présent et son avenir, sur BlueSky.